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Actualités - CHRONOLOGIE

PHOTOGRAPHIE - Elle expose deux clichés au Salon d’automne du musée Sursock Les machines à visage humain de Nancy Haddad

Le processus photographique de Nancy Debs Haddad ressemble un peu au purgatoire dantesque. Les sujets qu’elle prend en cliché sont à l’origine des oubliés, des damnés, des objets sans vie, des tas de ferrailles. « Tout ce bas monde doit bénéficier d’une deuxième chance », se dit l’artiste. À travers son objectif, elle leur offre donc une deuxième vie, réhabilitant la réputation de ces rebuts de tout genre. Le recyclage artistique prend alors avec Nancy Debs Haddad un petit goût d’ « à la recherche du paradis perdu », puisque la jeune femme avoue retrouver dans ses œuvres des réminiscences visuelles de l’Afrique, où elle est née et a passé sa petite enfance. « Je ne me sens ni africaine, ni libanaise, ni européenne », souligne-t-elle pourtant. À l’instar de toutes les personnes qui ont beaucoup voyagé, elle s’adapte facilement à tout nouvel environnement. Elle s’est donc fabriqué une identité mélangée, comme un joker qui trouverait sa place partout où le hasard le mène. Ce métissage culturel, on le retrouve forcément dans ses créations. Il ne s’agit donc pas d’un simple heureux coup de chance si le tas de ferrailles qu’elle a photographié lors d’une pérégrination sur un cimetière de voitures ressemble à une sculpture multiforme. Auparavant, elle avait réalisé des clichés de ruines du centre-ville en y superposant des couleurs ou des ombres. Les clichés apparaissent ainsi comme des puzzles visuels, ou plutôt des rébus qui vont caractériser toute son œuvre. Nancy Haddad a ensuite glané ces fameuses photos au gré de ses promenades dans les cimetières de ferrailles. « J’essayais, par l’image, de leur donner une autre vie. » C’est dans ce même esprit de recyclage artistique qu’elle présente aujourd’hui, au musée Sursock, deux œuvres tirées de sa série des « Machines industrielles ». Animaux, masques africains ou Incas, le sauvage côtoie le futuriste, fruits de nombreuses rencontres fortuites lors de visites à des fabriques, des ateliers, des usines. Le monde industriel n’est pas non plus étranger à Nancy Haddad, qui a grandi « collée à l’usine de mon père ». Une usine de literie, terrain de jeux de la petite Nancy qui observait avec ébahissement ces « grosses machines qui pondaient des ressorts ». Le paysage industriel est, dans la grande majorité des cas, qualifié de lugubre, de sinistre. Les machines, en opposition à l’être humain, sont froides, impersonnelles. Mais pour la photographe, il s’agit indubitablement d’un monde fascinant fait de cuves, de machines, de tuyaux, de cadrans, de vannes, de commandes, de boutons, de tableaux électriques et de mille autres choses ! Les robots coupent la tôle, machinent des pièces, soudent l’acier, assemblent des automobiles. En bons travailleurs consciencieux qu’ils sont, ils demeurent invisibles et ne font parler d’eux qu’occasionnellement. Non anthropomorphes, ils ne possèdent ni charme ni attrait spécial pour leurs collègues humains. Mais pour Nancy Haddad, il lui a toujours semblé que cette race d’êtres artificiels ne méritait ni malveillance ni répulsion. Car, pour l’instant, encore dépourvus de conscience, et même s’ils ne sont dotés que d’un minimum d’intelligence, ces robots ne connaissent pas le péché, ne commettent pas les atrocités de l’homme. Une théorie qui va dans le sens des lois de l’Humanique, d’Isaac Asimov dans Les robots et l’empire : « Un être humain ne doit pas faire de mal à un robot ou, par son inaction, permettre que du mal soit fait à un robot, à moins que ce mal ne soit nécessaire pour protéger du mal un être humain ou pour exécuter un ordre capital. » Comme ces lois, le robot n’est-il pas encore une fois une sorte de miroir qui ne fait que nous renvoyer notre image déformée ? Ceci devrait donner à réfléchir à plus d’une personne dans le monde ! Maya GHANDOUR HERT
Le processus photographique de Nancy Debs Haddad ressemble un peu au purgatoire dantesque. Les sujets qu’elle prend en cliché sont à l’origine des oubliés, des damnés, des objets sans vie, des tas de ferrailles. « Tout ce bas monde doit bénéficier d’une deuxième chance », se dit l’artiste. À travers son objectif, elle leur offre donc une deuxième vie, réhabilitant...