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Actualités - ANALYSE

ANALYSE Les défis du nouveau président : réformer la Russie et gérer l’inconnue Poutine

Dmitri Medvedev, qui a émergé dès son élection avec une stature de président, a devant lui l’énorme tâche de réformer le plus grand pays du monde et de gérer au mieux le scénario inédit en Russie d’une direction bicéphale. Vladimir Poutine et son successeur, élu avec environ 70 % des voix à l’issue d’un scrutin soigneusement orchestré, « vont devoir échanger leurs places et deux centres du pouvoir vont apparaître », résumait hier l’édition russe de l’hebdomadaire Newsweek. M. Medvedev aura en effet à ses côtés, ou face à lui, un Premier ministre qui aura été le n° 1 pendant huit ans et n’a visiblement pas envie de jouer les seconds rôles (M. Poutine a assuré le 14 février que le gouvernement serait « l’Exécutif suprême »). Les luttes intestines entre clans, feutrées comme du temps de l’URSS, ne font que commencer, soulignent à cet égard les analystes. Et ceux-ci ont tendance maintenant à parier que M. Medvedev, au départ constamment dans l’ombre de son mentor, mais bientôt virtuellement tout-puissant au sommet de l’État en vertu de la Constitution et de la pratique institutionnelle russes, en sortira vainqueur. La majorité d’entre eux jugent, en outre, à l’instar d’Alexandre Konovalov de l’Institut des évaluations stratégiques, « qu’il serait vain d’attendre » une quelconque démocratisation, telle qu’ardemment espérée par certains dans les médias et l’intelligentsia. Interpellé au cours d’une conférence de presse à l’issue de son élection, M. Medvedev, un juriste de formation aujourd’hui âgé de 42 ans, s’est borné à répéter que sa politique serait « une continuation directe de celle de Vladimir Poutine ». Une réponse a priori convenue, à des lieux de son retentissant « La liberté est meilleure que l’absence de liberté » lancé en janvier 2007, au Forum économique de Davos, en Suisse. Dans le domaine économique, les défis à relever sont colossaux, avec le risque d’une nouvelle accélération de l’inflation (déjà galopante à 11,9 % l’an dernier) lorsque les prix des produits alimentaires seront libérés, en principe le 1er mai, après avoir été bloqués en octobre en vue des législatives de décembre. Tandis que la croissance (autour de 8 % en 2007) demeure étroitement liée aux cours volatils du pétrole, dont la Russie est le deuxième exportateur mondial. Pour le reste, on en était encore une fois réduit aux supputations des uns et des autres. « La politique du président Medvedev vis-à-vis des milieux d’affaires ira dans le sens du développement de l’activité, de l’esprit d’entreprise et des libertés économiques », prédit ainsi le président de la Chambre de commerce et d’industrie russe, Alexandre Chokhine. Un « optimisme » que ne partage absolument pas Alexeï Malachenko, du centre Carnegie de Moscou. Le fond du problème, rappelle-t-il crûment, « c’est la bureaucratie et la corruption. Tout est pourri. Je ne crois pas que Medvedev soit à même de changer ce système ». Et que va-il faire dans la sphère sociale, après avoir été chargé ces deux dernières années au sein du gouvernement des « projets nationaux » destinés à améliorer les conditions de vie de ses compatriotes (logement, éducation, santé, etc.) et à inverser le déclin démographique ? Au plan international, M. Medvedev, qui a semblé dès le soir de son élection habité par la fonction présidentielle avec tous ses attributs, a pris soin de marteler que « c’est le président qui détermine la politique extérieure en vertu de la Constitution ». Mais il ne sera vraisemblablement pas tenté d’infléchir la diplomatie russe, facteur important de la popularité de M. Poutine, note Nikolaï Petrov, un expert du centre Carnegie. « Penser qu’il va changer la politique étrangère russe, c’est se bercer d’illusions », selon lui. Bertrand de SAISSET (AFP)
Dmitri Medvedev, qui a émergé dès son élection avec une stature de président, a devant lui l’énorme tâche de réformer le plus grand pays du monde et de gérer au mieux le scénario inédit en Russie d’une direction bicéphale.
Vladimir Poutine et son successeur, élu avec environ 70 % des voix à l’issue d’un scrutin soigneusement orchestré, « vont devoir échanger...