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Actualités - OPINION

Les inventeurs

Au début du XXe siècle a été créé en France le concours Lépine pour récompenser une invention innovante. Le concours Lépine a eu un grand succès, à tel point qu’il est devenu annuel et se poursuit depuis plus d’un siècle maintenant. Chez nous, c’est la même chose. Depuis septembre, on devient de plus en plus inventifs pour empêcher la Chambre des députés de se réunir pour élire un futur homme de la situation. Certes, me direz-vous, il y en a des tas, à quoi bon en élire un ? Chaque région a son chantre qui nous vante les louanges de tel ou de tel autre quand ce ne sont pas ses propres louanges. Forcément, le Liban est loin d’être le pays de la médiocrité ; nous sommes tous extraordinaires et géniaux, chacun dans son style, mais géniaux quand même. D’ailleurs, pour être inventeur, il faut du génie et de la science. Dieu merci, nous ne manquons pas de génies. Nous n’avons au Liban que des personnes hors normes. Et puis, chaque fois qu’une échéance arrive, il y en a un qui se réveille et qui s’écrie : Eurêka ! Et c’est reparti pour un tour... Le seul problème est qu’on ne connaît pas leurs valeurs à ces génies en herbe. Ingrats que nous sommes ! Nous leur cherchons toujours noise. C’est normal, nul n’est prophète en son pays. En fait, le martyr, c’est loin d’être le peuple, mais bien ces incompris de la civilisation qui nous font grâce de leur savoir en politique et en analyse psychologique de la parole donnée ou proférée. Car, bien entendu, nous ne sommes pas assez intelligents pour deviner que 1 + 1 = 2 , il faut que quelqu’un vienne nous l’expliquer en long, en large et en détail. Le seul problème est qu’il n’y a pas moins de 10 analyses pour une équation bête et stupide. C’est là que réside le génie : nous ne saurons jamais quelle est la bonne analyse. Et si toutes les analyses ne nous satisfont pas, on en trouvera toujours un de perdu, dans ce vaste monde sans pitié et sans scrupules, pour nous en inventer encore une, histoire de nous perturber encore plus. Et si on n’en trouve pas un (à moins de l’inventer, car tout peut se faire), on devra tenter de comprendre la parole acquise comme si on entendait parler le messie. Enfin, de ce côté, nous sommes gâtés, car ce ne sont pas les prophètes qui nous manquent. Alors pour peu, on se croirait dans Alice au pays des merveilles. Et quelles merveilles ! Des perles rares. Nous avons hérité de tous ces hommes au sens aiguisé en politique et qui ont réponse à tout. Et quand ils n’ont pas de réponses (ce n’est pas encore arrivé, je vous rassure), ils en inventent une ou, mieux encore, ils rejettent la faute sur les autres car les autres, c’est l’enfer et c’est à cause d’eux que nous en sommes là. Tout cela revient à dire qu’il faut avoir l’esprit inventif pour savoir où l’on va et pour ne pas stagner, une inaction dans laquelle nous excellons actuellement. Et pour mettre de l’ambiance et retarder toute solution, quoi de mieux qu’une explosion et encore d’innocentes victimes. Pour quoi et pour qui ? Bien entendu, ce n’est pas leur faute. Il faut aller voir plus loin, beaucoup plus loin. Car la seule chose qu’ils n’ont pas réussi à inventer, c’est la solution au problème, bien qu’elle soit en eux. Car le problème, c’est bien eux et pas nous. Mais ça, ils ne risquent pas de le trouver, c’est au-delà de leurs capacités. Jean-Paul MOUBARAK
Au début du XXe siècle a été créé en France le concours Lépine pour récompenser une invention innovante. Le concours Lépine a eu un grand succès, à tel point qu’il est devenu annuel et se poursuit depuis plus d’un siècle maintenant.
Chez nous, c’est la même chose. Depuis septembre, on devient de plus en plus inventifs pour empêcher la Chambre des députés de se...