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Le sort d’une République

Alors qu’une nouvelle République vient de naître dans les Balkans, une autre semble condamnée à l’implosion en Orient. Au moment où le monde salue l’arrivée du nouveau-né dans le concert des nations, il semble s’accommoder de la disparition d’un membre fondateur de la grande famille des nations. Car ce qui est en jeu sous nos yeux n’est pas moins que le sort d’une République. Le Liban est au bord du gouffre. Deux places. Deux discours. Deux sentiments. Deux drapeaux. Deux armées. Presque deux peuples. Sous d’autres cieux, une situation similaire se serait rapidement conclue par un partage sanglant du territoire. Mais chez nous, on aime faire durer le plaisir. Alors, les deux parties s’égosillent à affirmer leur attachement à l’unité du pays et au refus de toute division. Même si leurs actes quotidiens ne font que renforcer jour après jour les chances de son morcellement. Quand quelqu’un se décide au suicide, la société dont il est membre intervient pour l’en empêcher. Par la force s’il le faut. Les grands de ce monde qui ont protégé et accompagné l’indépendance du Kosovo ont l’obligation morale et politique d’intervenir au Liban pour empêcher le suicide d’une République. Au nom de l’assistance à une République en danger, la communauté des nations doit intervenir avant qu’il ne soit trop tard. Et puis que l’on cesse de se mentir à soi-même et aux autres. Le problème ne réside pas seulement dans les ingérences étrangères et dans la volonté syrienne de préserver sa « chasse gardée ». Nous, Libanais, sommes incapables de nous entendre. Trop de choses nous séparent. Nos joies et nos peines ne sont pas les mêmes. Nous ne vibrons pas pour la même cause. Est-ce une raison pour faire capoter la République ? Sous d’autres cieux, cette question aurait été un non-sens. Quand les composantes d’un pays arrivent à un tel degré de mésentente, ça suppose une remise en cause des fondements du contrat national. Et, dans ce cas, deux solutions s’imposent : soit le pays s’offre un vainqueur et un vaincu, soit son architecture est remodelée pour tenir compte des aspirations des uns et des autres. Mais au Liban, la situation est différente. Quelle que soit la gravité de la mésentente entre les communautés libanaises, les grands de ce monde ont structuré le pays de façon à ce qu’il baigne ad vitam aeternam dans le ni vainqueur ni vaincu, avec une architecture géographique intouchable, car relevant de l’équilibre du monde. Alors puisque nous n’arrivons pas à nous entendre et qu’il nous est interdit d’avoir un vainqueur et un vaincu ou de remodeler la géographie politique du pays, les grands de ce monde doivent s’occuper de leur descendance. Ils ont peut-être prévu beaucoup de situations à l’origine. Ils semblent quand même en avoir oublié une : le suicide. La République libanaise, rejeton du Congrès de Versailles et de la Société des nations, semble décidée et poussée au suicide. Alors, Messieurs du monde, soit vous nous protégez de nos voisins, soit vous nous autorisez un vainqueur et un vaincu, soit vous désacralisez la géographie politique du pays. Faute de quoi, vous assisterez, en direct, à la disparition d’une République. Raymond NAMMOUR
Alors qu’une nouvelle République vient de naître dans les Balkans, une autre semble condamnée à l’implosion en Orient.
Au moment où le monde salue l’arrivée du nouveau-né dans le concert des nations, il semble s’accommoder de la disparition d’un membre fondateur de la grande famille des nations.
Car ce qui est en jeu sous nos yeux n’est pas moins que le sort...