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Actualités - CHRONOLOGIE

CAFÉS CULTURELS DE « L’ORIENT-LE JOUR » – Deuxième édition, au restaurant L’Atelier de l’USJ « Les galeries d’art au Liban entre hier et demain » : problèmes, défis et idées pour une conjoncture nouvelle...

Après une première édition qui avait enregistré un vif succès l’année dernière, les Cafés culturels de « L’Orient-Le Jour », organisés en collaboration avec la Maison du livre, ont repris, à raison d’une rencontre mensuelle, au restaurant L’Atelier de l’USJ, rue de Damas. Et c’est par le thème des « Galeries d’art au Liban entre hier et demain » qu’a été inaugurée cette deuxième saison. Animée par Gérard Katcharian – qui a commencé par dresser un intéressant panorama de l’éclosion et du rôle des galeries d’art en Occident puis chez nous –, la rencontre a réuni quatre des galeristes de la place locale et un public d’intéressés sinon d’avertis, parmi lesquels on notait la présence d’acteurs de la scène culturelle, d’attachés d’ambassades, de critiques et de collectionneurs... C’est en parfaite connaissance de cause que les quatre intervenants ont exposé, à tour de rôle et suivant des angles différents, les divers problèmes et défis auxquels sont confrontées les galeries libanaises à l’heure actuelle. Abordant la question de « La dynamique artistique entre hier et aujourd’hui », Nadine Begdache, propriétaire de la galerie Janine Rubeiz, a d’abord rappelé le rôle « utile et responsable de toute activité culturelle. Créer un espace culturel n’a rien de mondain (...) C’est un acte qui se situe dans la ligne d’une stratégie de développement culturel (...) Le public et les responsables doivent en prendre conscience », a-t-elle souligné. Poursuivant : « Bien que mal comprises par les mécènes, les collectionneurs et les institutions gouvernementales, les galeries libanaises jouent un rôle très important dans la société libanaise. Elles remplacent la carence de musées d’art moderne et d’art contemporain. Elles représentent les seules références pour les artistes qu’elles dévoilent au public, qu’elles exposent bon gré mal gré, qu’elles lancent sur les marchés internationaux, en participant à des foires internationales très coûteuses, à des biennales, à des ventes aux enchères, en engageant des frais extrêmement élevés par rapport à leur budget sans aucune aide financière. » Mettant en particulier l’accent sur l’absence d’aide de l’État, Nadine Begdache a donné des exemples flagrants de l’incurie de l’Administration dans ce domaine. « Les galeries d’art n’ont pas de statut spécifique au Liban. Elles sont, au regard des lois commerciales et du ministère des Finances, logées à la même enseigne que n’importe quelle boutique de meubles ou d’objets de maison. Il n’y a pas de taux différentiel de la TVA entre l’objet artistique et l’objet purement commercial, comme cela se fait dans les pays occidentaux (...) Tous les pays et notamment nos voisins arabes sont conscients que la culture est un facteur de développement local, mais malheureusement nos responsables en sont de moins en moins conscients », a-t-elle affirmé, rappelant notamment l’existence d’une loi inspirée de la législation française « qui fait payer une taxe de plus ou moins 1 % de la valeur d’une construction pour prévoir l’achat d’une œuvre d’art à exposer dans l’immeuble et encourager ainsi la production artistique. Une loi qui, si elle n’avait pas été oubliée, aurait pu créer une dynamique au niveau de la création artistique et de la ville alors que nous avions un chantier énorme de reconstruction », a regretté la galeriste, qui reste néanmoins convaincue de l’utilité de créer une nouvelle dynamique artistique au Liban. En appliquant certaines idées qui nous viennent de l’étranger, comme celles des voyages culturels, la délocalisation de l’art, « qui se retrouve partout de nos jours même dans les hôtels », mais encore en faisant en sorte que les expositions réagissent à l’actualité. Car « l’art est l’antidote de la mort de l’esprit collectif (...) et la création artistique est aujourd’hui ce qui reste d’un moment, d’une situation... » Solliciter la présence du public Invitée à s’exprimer sur le thème de « L’apport des artistes étrangers », Alice Mogabgab Karam, historienne de l’art et propriétaire de la galerie portant son nom, a signalé qu’il ne s’agit pas à proprement parler d’apport, mais plutôt de « contribution » des artistes venus de différents horizons. « L’intérêt des artistes qui viennent de dehors, c’est d’aiguiser le marché local et de créer une dynamique de compétition. Il s’agit aussi de montrer quelque chose qui n’a pas été vu, montré ou même suggéré », a-t-elle indiqué. Affirmant que les galeristes continuent de travailler et essayent de faire de leur mieux, malgré les temps difficiles, pour présenter « un choix d’œuvres qui ont comme dénominateur commun la qualité et le sens du beau », Mogabgab a toutefois pointé un doigt accusateur vers le public libanais qui, « malgré toutes nos sollicitations, ne se déplace pas assez pour voir les expositions qui continuent à lui être présentées. On ne veut pas (uniquement) de votre chèque, c’est votre présence qu’on veut », a-t-elle lancé à la cantonade. Beyrouth, incubateur d’art Rhétorique de professeur-conférencier et d’historien d’art pour Saleh Barakat, par ailleurs propriétaire de la galerie Agial qui, avant de poser le sujet de « La recherche d’un nouveau rôle pour Beyrouth », a résumé les quatre phases par lesquelles sont passées les galeries d’art libanaises. « Avant 1975, on pouvait voir et acheter à Beyrouth des Calder, des Georges Mathieu, des Max Ernst... Les galeries exposaient des artistes d’Europe, des États-Unis, du Liban et du monde arabe. Les touristes achetaient des œuvres d’art à Beyrouth. C’est Dar el-Fan, par exemple, qui a exposé en 1973 les premiers artistes saoudiens. Et lors de son passage à Beyrouth en 1966 ou 1967, David Rockefeller y avait acheté un grand nombre d’œuvres d’art. En 1975, la plupart des galeries ont fermé. Celles qui subsistaient pouvaient à peine gérer leur survie au Liban, voire même dans leur région. Les bons artistes libanais sont ainsi partis pour l’Europe et les États-Unis, et les moins bons se sont tournés vers le Golfe. Après 1993, avec la reconstruction, s’est profilé le rêve que Beyrouth, qui bénéficiait d’une bonne presse et d’un certain nombre de collectionneurs, redevienne la plate-forme de l’art dans la région, d’autant qu’elle n’avait pas été remplacée jusque-là. Malheureusement, cela n’a pas duré longtemps, depuis quelques années, à partir surtout de 2005, la situation a régressé. De nouveaux centres artistiques ont éclos ailleurs dans la région. Des galeries d’un grand professionnalisme ont ouvert au Caire, en Jordanie (où exposent les artistes irakiens) à Damas... Et, l’argent aidant, la plate-forme commerciale de l’art a déménagé pour de bon dans les pays du Golfe. » Malgré ce triste constat, Barakat n’en demeure pas moins convaincu que Beyrouth a malgré tout un rôle à jouer. « La conjoncture ayant changé, il faudra peut-être faire en sorte que cette capitale devienne un incubateur de talents, qu’elle soit une source de production d’œuvres, de livres, de manifestations... Il faudra être pragmatique et s’adapter : on produira à Beyrouth, quitte à vendre dans les pays du Golfe... Où cependant l’image de l’art libanais – très bien reçu à New York ou à Paris – est à refaire », a-t-il souligné. Engendrer une dynamique commune Enfin Nathalie Khoury, directrice de la galerie Sfeir-Semler (dont la galerie-mère, fondée par Andrée Sfeir, se trouve à Hambourg), a défini le rôle de cet espace, ouvert à Beyrouth il y a trois ans, pour essayer de dresser un pont entre les scènes artistiques émergentes occidentale et moyen-orientale. « Concrètement, il s’agit de propulser les artistes libanais et ceux de la région sur les marchés d’Europe en montrant leurs œuvres dans des expositions, des foires internationales et en proposant leur travail à des collectionneurs et des musées à l’étranger, a-t-elle expliqué. En parallèle, la galerie Sfeir-Semler de Beyrouth représente des artistes internationaux au Moyen-Orient, ce qui engendre une dynamique entre les artistes occidentaux et orientaux. » Une dynamique que la galeriste voudrait accentuer en demandant à ses artistes étrangers de venir créer des œuvres spéciales pour la galerie de Beyrouth. Un débat intéressant a suivi les interventions et donné lieu à un brassage d’idées, d’opinions et de suggestions dont certaines méritent d’être examinées de manière plus approfondie. Notamment la recommandation de Gérard Katcharian, lequel a conclu la séance en soutenant que « pour que Beyrouth reprenne le rôle qui était le sien au départ, il faut que les galeristes se regroupent et travaillent ensemble ». Z.Z.
Après une première édition qui avait enregistré un vif succès l’année dernière, les Cafés culturels de « L’Orient-Le Jour », organisés en collaboration avec la Maison du livre, ont repris, à raison d’une rencontre mensuelle, au restaurant L’Atelier de l’USJ, rue de Damas. Et c’est par le thème des « Galeries d’art au Liban entre hier et demain » qu’a...