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Actualités - OPINION

LA situation - Le cri « mobilisateur » de Joumblatt modéré par des déclarations de Gemayel et Geagea La manifestation du 14 février préparée dans un climat moins passionnel Fady NOUN

Dans un pays où la polarisation politique est si forte, l’acte politique, l’acte citoyen par excellence, pourrait bien être de garder le sens de la mesure, de rester modéré, même quand on sait avoir raison. C’est sans doute ce qui a poussé hier Amine Gemayel et Samir Geagea à modérer, par des déclarations sobres, dépassionnées, l’effet laissé la veille par la déclaration de Walid Joumblatt. À la décharge du chef du PSP, une source de la majorité a affirmé que le cri de guerre de M. Joumblatt a fusé comme « un acte de légitime défense » après des mois de sourdes et de moins sourdes menaces de l’opposition, et qu’il devait être pris pour ce qu’il est : un cri mobilisateur qui ne doit pas faire oublier la cause fondamentale pour laquelle il a été lancé : la volonté de liberté et d’indépendance, face à la machine à tuer qui a à son actif 29 attentats, depuis le 1er octobre 2004 (dixit Samir Geagea). Du reste, il semble que le chef du PSP ait discrètement établi des contacts, notamment dans les milieux diplomatiques européens, pour les rassurer sur ses intentions véritables, affirme notre correspondant diplomatique Khalil Fleyhane. Ces milieux ont quand même tenu à mettre en garde contre un climat de tension que mettrait à profit l’ennemi sans visage qui décime l’élite du pays, pour effectuer de nouveaux attentats et accentuer encore le climat de confusion qui règne. L’armée, de son côté, prend les précautions qu’il faut pour canaliser la foule qui se rendra, jeudi, place des Martyrs. Elle va s’interposer entre les deux espaces politiques qui s’y dessinent, pour empêcher toute friction entre la foule et les gardiens des tentes vides du centre-ville. Une source de l’opposition, citée par l’agence Markazia, a affirmé hier que la déclaration de Walid Joumblatt a « compromis » un geste de bonne volonté que le 8 Mars préparait pour le 14 février. Selon cette source, une délégation de l’opposition avait l’intention de se rendre sur la tombe de Rafic Hariri, jeudi, pour y déposer une gerbe, le tout assorti de déclarations « positives ». Loin de ces initiatives qui auraient pu déclencher une dynamique vertueuse et semer une graine de confiance entre les deux camps, le général Aoun a repris hier ses tirs d’artillerie politiques, accusant la majorité de ne pas vouloir associer l’opposition à la décision nationale à travers un gouvernement d’union nationale où elle aurait véritablement son mot à dire. Le général Aoun a par ailleurs raillé les slogans de la majorité et poussé la légèreté jusqu’à affirmer qu’il avait envoyé des « patrouilles » aux frontières pour vérifier si, véritablement, les Syriens se préparent à revenir... L’initiative arabe Alors que dans l’immédiat, toute l’attention se porte sur la manifestation monstre qui se prépare, sur le plan arabe, le Conseil des ministres saoudien a consacré hier une partie de sa réunion à la crise libanaise. Le Liban, toujours lui, était à l’ordre du jour de la réunion des ministres des AE de l’Union européenne, alors même que l’on perd espoir de voir la Syrie coopérer et user de son ascendant sur l’opposition au Liban pour faire élire un président. La mauvaise volonté syrienne est telle que même une déclaration « positive » de Walid Moallem formulant l’espoir qu’un président sera élu avant le prochain sommet arabe (29-30 mars, qui se tient à Damas, a été interprétée par les milieux diplomatiques comme signifiant que la prochaine échéance électorale, fixée au 26 février, ne sera pas encore la bonne. On spécule déjà, dans les milieux diplomatiques, sur les chances d’une participation libanaise au sommet arabe de Damas, alors même que le pays est sans président et que son gouvernement n’est pas reconnu par le pays-hôte... Lueurs d’espoir Dans ce sombre paysage, il existe quand même des lueurs d’espoir. Le commissaire du gouvernement près le tribunal militaire, Jean Fahd, a ainsi engagé hier des poursuites contre les militaires et civils impliqués dans la tuerie du 27 janvier dernier, à Chiyah. Auparavant dans la journée, devançant des conclusions qui s’imposaient, le général Sleimane exhortait les militaires à ne pas être démoralisés. On affirme de source judiciaire que ce n’était pas trop cher payer que de permettre à la justice de tirer au clair les bavures du « dimanche noir », au risque de provoquer un malaise au sein de l’institution militaire, puisque la paix civile était à ce prix.
Dans un pays où la polarisation politique est si forte, l’acte politique, l’acte citoyen par excellence, pourrait bien être de garder le sens de la mesure, de rester modéré, même quand on sait avoir raison. C’est sans doute ce qui a poussé hier Amine Gemayel et Samir Geagea à modérer, par des déclarations sobres, dépassionnées, l’effet laissé la veille par la...