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Actualités - OPINION

La rose des vents Par Dominique Chevallier *

Le Liban devient-il le tombeau d’ambitions syriennes et d’autres qui n’y prennent garde ? Il ne suffit pas d’y avoir des armes et des agents à tout faire. Le caveau s’ouvre à ceux qui l’ont creusé pour un Moyen-Orient où la fureur de la mort enferme les êtres et leurs mythes. Le pouvoir syrien s’imagine-t-il encore posséder un rôle-clé puisqu’il est ménagé par des puissances occidentales et par des États de l’Orient musulman ? En réalité, son territoire ne représente plus qu’un espace transitaire pour l’Iran, des richesses saoudiennes, des mouvements trop armés, des « services » divers et des trafiquants aux bras longs. Une telle situation présente de nombreux leurres, car, en fin de compte, elle accroît les dangers par les dépendances multiples qu’elle crée. À quoi les dirigeants syriens rêvent-ils lorsqu’ils font chanter en sommant de choisir entre eux, baassistes, et les Frères musulmans ? Les gouvernements islamiques, iranien ou saoudien, maîtrisent déjà de nombreux fondamentalistes de l’islam. Quant à l’État d’Israël, il laisse courir puisque la Syrie assadienne lui sert de tampon et qu’il la tient aussi par le Golan. Mais la politique du pire ne conduit qu’au pire. Une pieuvre enserre le Liban de ses cruels tentacules. Elle n’hésite pas à faire couler beaucoup de sang pour donner l’illusion de sa force. Qui en seront les prochaines victimes ? Si l’axe stratégique et pluricommunautaire qu’est le Liban vient à éclater, l’explosion soufflera sur les feux régionaux, bouleversera la zone méditerranéenne et modifiera les relations internationales. Des rumeurs circulent sur des écoutes téléphoniques qui compromettraient des députés libanais et de hauts responsables syriens dans les assassinats de Rafic Hariri, d’hommes de confiance de feu Hafez al-Assad et de tant d’autres. Que valent-elles ? Qu’attendre du rapport sur le premier de ces meurtres que les Nations unies doivent remettre en mars 2008 au Tribunal pénal international ? J’ai passé l’âge des interdits. Je ne cache pas mes dégoûts. Que des partisans libanais de Michel Aoun viennent manifester à Paris devant les portes du Canard enchaîné parce que ce journal satirique a publié des on-dit sur les comptes bancaires de ce général en retraite fait plus que sourire en France. Mais au Liban, il faut toujours pleurer. J’ai vu récemment un très vieil ami libanais, musulman éduqué par les jésuites. Nous sommes tous les deux à la frontière de l’éternité. Il s’interroge sur le sens des messages religieux. Seul celui du Christ se sacrifiant sur la croix lui paraît novateur. La souffrance révèle l’homme à lui-même par la mort. Le vœu de Bouddha sur la conscience reste flou et peut tout aussi bien relever de l’inconscient. La révélation faite à Moïse n’est qu’une morale de comportement. Celle de Mahomet est identique, mais plus exigeante, plus comminatoire. N’existe que la nouveauté christique, quoique l’incarnation reste pour mon ami une invention invraisemblable. Je lui réponds que le sang porte témoignage de notre humanité dans l’infini du cosmos. Depuis cette conversation, le général Hajj a été assassiné. La paranoïa meurtrière emportera-t-elle un jour ceux qui en sont atteints ? Avec des roses blanches et rouges, j’offre chaleureusement à tous les Libanais mes vœux les plus amicaux. * Professeur émérite à la Sorbonne. Article paru le vendredi 4 janvier 2008
Le Liban devient-il le tombeau d’ambitions syriennes et d’autres qui n’y prennent garde ? Il ne suffit pas d’y avoir des armes et des agents à tout faire. Le caveau s’ouvre à ceux qui l’ont creusé pour un Moyen-Orient où la fureur de la mort enferme les êtres et leurs mythes.
Le pouvoir syrien s’imagine-t-il encore posséder un rôle-clé puisqu’il est ménagé...