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Actualités - REPORTAGE

Londres et Berlin mettent en garde contre une aggravation des conflits au Proche-Orient et dans le monde Le réchauffement climatique, plus qu’un danger pour l’environnement, une menace pour la paix Rania MASSOUD

La conférence des Nations unies sur le changement climatique, qui rassemblait à Bali les représentants de 190 pays, a finalement permis de dégager, vendredi, un accord à l’arraché. Peu avant cette conférence particulièrement âpre, plusieurs voix européennes, dont celles de Berlin et Londres, se sont élevées pour mettre en garde contre la menace que représente une hausse des températures pour la paix mondiale – surtout au Proche-Orient. Selon eux, les effets du réchauffement climatique, qui commencent à se faire sentir sur toute la planète, ne constituent pas uniquement une menace pour l’environnement et la santé, mais également un risque pour la sécurité. «Le réchauffement climatique provoque déjà des violences et alimente l’instabilité internationale », a récemment déclaré Frank-Walter Steinmeier, le ministre allemand des Affaires étrangères, dans une interview accordée à Reuters. Selon lui, il est temps de se pencher sur les tensions causées par la raréfaction des ressources naturelles et l’accès limité à l’eau potable. « Il faut trouver des solutions politiques aux problèmes climatiques qui alimentent les tensions au Proche-Orient et en Afrique », a ajouté M. Steinmeier, tout en indiquant que l’installation par les Russes d’un drapeau au fond de l’océan Arctique faisait craindre des rivalités nouvelles, semblables à celles que le monde a connues pendant la guerre froide. « Je ne parle pas de guerres, mais de profondes ruptures, a-t-il toutefois souligné. Les intérêts divergents peuvent mener à des conflits, c’est pourquoi nous devons agir maintenant. »  Même son de cloche du côté de Londres qui, par la voix de l’ancienne ministre des Affaires étrangères, Margaret Beckett, a affirmé que le réchauffement climatique alimente déjà des conflits, notamment en Afrique et au Proche-Orient. « En Égypte, le niveau du Nil pourrait baisser de 80 % à cause du réchauffement climatique, ce qui obligerait des millions de personnes à se déplacer et créerait une véritable crise dans le pays », soulignait-elle dans une interview accordée au Guardian, en mai dernier. Selon un rapport européen indépendant, le nombre de « réfugiés climatiques » va excéder celui des réfugiés politiques dans les prochaines décennies. « Le Proche-Orient, qui compte 5 % de la population mondiale, mais seulement 1 % de ses ressources hydrauliques, est la région qui sera la plus affectée par la hausse des températures », indiquait-elle. La Commission européenne avait par ailleurs, dès le début de l’année, mis en garde contre la menace du réchauffement climatique sur la paix mondiale et sur le risque d’éclatement de nouveaux conflits régionaux. Selon les scientifiques, la température moyenne mondiale a déjà augmenté de +0,74°C en 100 ans et pourrait grimper de +1,8 à +4°C d’ici à la fin du siècle. À Bali, l’Organisation météorologique mondiale a annoncé que la décennie 1998-2007 a été la plus chaude depuis que les températures sont enregistrées sur la planète. Plusieurs régions de l’Europe ont connu leur printemps le plus chaud, des vagues de chaleur extrême ont touché le sud-est de l’Europe et le Proche-Orient en juin et juillet. Le World Wild Fund mentionne également les sécheresses persistantes qui frappent la région, et qui ont entraîné de graves pénuries d’eau et des vagues d’incendies de forêt géants. « Le Proche-Orient connaîtra d’ici à 2050 une baisse de 10 à 40 % de ses ressources aquatiques », indique pour sa part George Ayoub, professeur de génie environnemental à l’American University of Beirut (AUB). « Les pays du Golfe ne seront pas particulièrement affectés étant donné qu’ils utilisent un système de dessalement de l’eau pour la rendre potable ou pour l’irrigation, explique-t-il. Parallèlement, des pays comme le Liban, la Syrie, la Jordanie, l’Irak, les territoires palestiniens, Israël et l’Égypte souffriront d’une grave pénurie d’eau. » Un rapport publié en 2001 par Johns Hopkins University et l’AUB sur l’impact du réchauffement climatique sur le Proche-Orient révèle que d’ici à quelques décennies, le prix de l’eau dans la région pourrait rapidement augmenter, ce qui affectera gravement le secteur de l’agriculture, principalement au Liban, en Syrie, en Irak et dans les territoires palestiniens. En 2000, l’ancien responsable israélien chargé de la gestion de l’eau, Meir Ben Meir, avait indiqué à la BBC prévoir une pénurie d’ici à quelques années. « Je peux assurer que si la région connaît un manque en ressources aquatiques, et s’il y a une pénurie, alors il ne fait aucun doute que la guerre va éclater », avait-il dit en réponse à une question sur le conflit relatif à l’eau entre Israël, les Palestiniens, le Liban, la Jordanie et la Syrie. « Les Israéliens sont sûrement très intéressés par les ressources aquatiques de leurs voisins, comme le Liban, par exemple, mais afin d’éviter toute pénurie, ils tentent de développer des technologies de dessalement de l’eau qui leur permettraient de transformer l’eau salée de la mer en eau potable », affirme de son côté le Dr Ayoub. « Plusieurs pays arabes, comme le Liban et l’Irak, ne devraient – normalement – pas connaître de pénurie, mais seulement s’il y a une bonne gestion de l’eau », tient-il à souligner. Selon lui, il existe plusieurs plans de prévention sur la table et qui méritent d’être étudiés, mais malheureusement, la volonté d’agir n’arrive souvent que trop tard.
La conférence des Nations unies sur le changement climatique, qui rassemblait à Bali les représentants de 190 pays, a finalement permis de dégager, vendredi, un accord à l’arraché. Peu avant cette conférence particulièrement âpre, plusieurs voix européennes, dont celles de Berlin et Londres, se sont élevées pour mettre en garde contre la menace que représente une hausse...