Rechercher
Rechercher

Actualités - REPORTAGE

MÉDIAS « Mission : Fashion 07 », dans les coulisses d’un « prime »

Vous avez aimé « Star Academy » ? Vous allez adorer « Mission : Fashion ». Au départ de cette deuxième édition, 24 candidats, moitié stylistes et moitié mannequins, travailleront en tandem. Recrutés dans tout le monde arabe, du Golfe au Maghreb, en passant par l'Égypte, filles et garçons ont traversé les mailles d’un casting sévère. Attention : élite ! Le concept, purement libanais, est une idée Imagic pour la chaîne satellite LBC, réalisée par un Ghazy au sommet de sa créativité, et ses acolytes Rony Jazzar et Rawad Daou. « On ne pouvait pas imaginer ce programme sans la complicité d’Élie Saab », précise Ghazy. De fait, le géant libanais de la haute couture s’engage pour la deuxième année consécutive à accompagner les stylistes dans leur parcours jusqu’à la consécration, et même au-delà pour le finaliste. Tout au long de la semaine, les académiciens (faut-il dire « les missionnaires » ?) travaillent à la confection d’une robe aux mensurations du mannequin qui leur est assigné. Les thèmes varient. « Robe noire », « Tzigane », « Tapis rouge », les créateurs doivent se conformer au code. Ce soir, ce sera « Bal des débutantes ». Il faudra rivaliser de fraîcheur virginale. Ça commence dans les paillettes, ça finit dans les larmes. Glamour et grincement de dents. Capitole de samedi à jeudi, Roche tarpéenne le vendredi. Car chaque vendredi, il faut le savoir, deux couples styliste-mannequin sont mis en danger. L’un d’eux, sur verdict des téléspectateurs influencés par le jury, quittera « l’aventure ». Vendredi dernier, c’était mon jour de jury. Première télé, première téléréalité, premier « prime » et déjà, quelqu’un que je ne connais pas va subir mon humeur sélective. Connaissez-vous « le Château » ? Un palais des Mille et une Nuits aux confins d’Adma. Lumières nocturnes de la baie en contrebas, fluorescence de la bâtisse qui se détache, irréelle, sur fond de velours sombre. On croit voir un mirage. C’est un mirage. Derrière la façade, enchevêtrement de couloirs d’aéroport, studios en vrac, frénésie de coulisses. Sur l’interminable tapis rouge qui traverse la cour jusqu’à l’entrée, la belle Annabelle en robe du soir bleu canard d’Élie Saab présente déjà l’émission. Je tiens une coupe de champagne. Comment s’est-elle trouvée dans ma main ? Le mirage continue. Je pense : « Buvez, éliminez ? » Mais je refoule l’idée. L’heure n’est pas au cynisme, justement. J’étais d’ailleurs bien ingénue de me présenter à l’événement telle qu’en moi-même. En l’occurrence, simplicité ne faisait pas beauté, et la LBC ce soir-là, c’était Lumière, Bling-bling et Compagnie. L’habit de lumière fut donc acheminé d’urgence trois minutes avant l’entrée en scène. En attendant, passage obligé au studio de coiffure animé par Simon Mendelek. Bousculade de mannequins, gracieux échassiers dont les têtes, conformément aux lois de l’altitude et de la pesanteur, émergent de la brume de laque. Crêpage, ébouriffage, pose d’extensions, intervention des stylistes, retouche du maître. Une dysmorphophobie généralisée soulève des râles de toute part. On défait, on refait, on en veut aux miroirs. Je m’en sors avec trois coups de séchoir et une noisette de gel. L’épreuve maquillage est moins évidente. Au royaume de L’Oréal, silence de cathédrale. Pose de cils, « coups d’éclat », tests de couleurs, on se croirait dans une galerie du Louvre à l’heure où les étudiants des Beaux-Arts plantent leur chevalet. De fait, à la quatrième couche de fond de teint, on a quelque chose de la Joconde, le sourire en moins crainte de faire baver le gloss. Dans l’arène, les pros, le verre d’eau et la machine à noter Déjà les assistantes de production me bousculent. La scripte m’informe de l’ordre d’entrée. Sous la pluie de confettis, un spot impitoyable m’empêche de distinguer la table du jury. Je bifurque juste à temps. Il y a là Élie Saab « himself », parrain de l’émission, Maeva Lefebvre, mannequin international, Youssef Sibahi, grand nom égyptien de la mode, Nadine Mezher, conseillère en stylisme des participants. Les quatre permanents, plus Ingie Chalhoub, du groupe de luxe éponyme, et ma consœur May Menassa, papesse de la culture au an-Nahar. À côté de l’incontournable verre d’eau, la machine à noter. La consigne est de faire une critique constructive, la note n’étant pas nécessairement à la hauteur du compliment. « Fais ce que dois », me suis-je dit en tordant le cou à mon aménité naturelle. Il fut parfois difficile de distinguer le détail tzigane entre une robe noire plutôt flamenco, ce qui est tangent, une autre rose et or taillée pour Barbie dans sa version Raiponce, ou une troisième qui portait un curieux petit volant au niveau du ventre. Dans l’ensemble, les stylistes avaient adopté le vocabulaire le plus courant de la culture tzigane : fluidité et ampleur de la jupe, liberté des couleurs, débauche de falbalas. Les mannequins qui défilaient sous le regard pointu de Maeva avaient parfois l’air de s’ennuyer. Au moment de présenter les robes d’Élie Saab, elles ont cru bon d’adopter une certaine morgue à la hauteur de l’événement. On aurait tellement aimé leur voir un vrai sourire. Certaines dont on voyait saillir l’os du bassin, d’autres dont les omoplates battaient comme des ailes de poulet déplumé semblaient ignorer les nouvelles normes anti-anorexie. Je songe en moi-même que démarche et mensurations idoines ne suffisent pas à donner de l’esprit à une robe. On a beau dire, un mannequin n’est pas un cintre. Élie Saab, un parrain serein et déterminé C’est un Élie Saab très force-tranquille qui me tire de ma perplexité. Le Libanais le plus médiatique a la modestie des grands. Je suis bluffée par ses qualités d’écoute et de synthèse. Visiblement, il n’est pas là pour le décorum, mais pour faire avancer les choses. Dans son esprit, ce pays possède un potentiel de créativité rare dans la région. Il a tout pour devenir une plate-forme mondiale de la haute couture. Il faut qu’il y parvienne. Voilà pour le credo. Quant à l’esprit « Tzigane », thème de la soirée, Saab souligne à juste titre qu’un travail de recherche, un effort de documentation auraient aidé à mieux le définir. D’une petite phrase, le parrain de l’émission renvoyait à leur manque de culture les stylistes qui croient qu’il suffit d’un coup de crayon et d’un baiser « lipstick » de la muse pour créer une robe. Interrogé sur la qualité des mannequins, Saab constate qu’il n’est pas courant de trouver sous nos latitudes des filles dont les mensurations répondent aux cahiers de charge des « défilés ». Les Méditerranéennes sont plutôt petites et rondes, ce qui ne les rend pas moins sexy. Mais on voit plus souvent des Nordiques et des Africaines évoluer sur les podiums. D’emblée, affirme le créateur, on peut dire que les jeunes femmes sélectionnées pour l’émission sont déjà des perles rares. Youssef Sibahi saisit la perche pour s’inscrire en faux contre l’anorexie, un mal qui pousse de plus en plus d’adolescentes et de jeunes femmes à se détruire pour une idée « culturelle » du beau charriée par les professionnels de la mode. Les lumières éteintes, je me fraie un chemin vers la sortie parmi les balais ciseaux qui ramassent les dernières paillettes. La fête est finie. Près du rideau noir, Issam pleure. Le jeune Jordanien vient d’être exclu de la « school of fashion » au profit de Seema, une styliste du Bahreïn. Dura lex. Mais je quitte la piste avec la certitude qu’une révolution libanaise se prépare dans le domaine de la mode. Elle trébuche encore, mais elle ira loin. Saab le veut.
Vous avez aimé « Star Academy » ? Vous allez adorer « Mission : Fashion ». Au départ de cette deuxième édition, 24 candidats, moitié stylistes et moitié mannequins, travailleront en tandem. Recrutés dans tout le monde arabe, du Golfe au Maghreb, en passant par l'Égypte, filles et garçons ont traversé les mailles d’un casting sévère. Attention : élite ! Le concept, purement...