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Actualités - CHRONOLOGIE

THÉÂTRE - Le Festival d’automne de Paris à l’heure de Rabih Mroué « Make me stop smoking », une performance pour réactiver sa mémoire

À peine engagés dans la petite salle du Point éphémère, les spectateurs découvrent amusés qu’ils vont s’installer sur des tabourets « tam-tam » fluorescents disséminés selon un arc de cercle autour de la table de Rabih Mroué. Celui-ci arrive quelques instants plus tard. Il lance le support visuel depuis son ordinateur, jette un dernier coup d’œil sur ses notes et débute sa performance en anglais. « Make me stop smoking. » Un titre griffonné parmi tant d’autres dans un carnet destiné aux titres des projets futurs de l’artiste. Un titre qui ne laisse en rien présager le sujet de la performance, car, comme il le précise, un titre n’est pas censé avoir un lien avec l’œuvre. Sans transition apparente, se succèdent sur l’écran différents supports médias archivés par l’artiste : articles de presse, vidéos du Beyrouth des années 60, discours télé de Ben Laden… L’artiste s’interroge alors. Pour quelles raisons s’acharne-t-il depuis une vingtaine d’années à accumuler toutes ces traces du passé liées tant à son histoire personnelle qu’à l’histoire collective de son pays ? Que faire de cette matière qui s’accumule chez lui – et en lui – et qu’il n’arrive pas à détruire. Quelle valeur donner à ces archives par essence non protégées et périssables ? Par sa performance, Rabih Mroué tente de répondre à ces questions. Il va en premier lieu s’attaquer à ses archives inutiles, simulacre d’archives qu’il s’amuse à parodier : un vieux dossier de demande de subvention au ministère de la Culture laissé sans suites, dont il va même présenter au spectateur le budget, un projet photo sur des bouches d’égouts de villes européennes qu’il aurait abandonné en cours de route en découvrant avoir été devancé par l’éditeur Taschen…Par cette parole publique, Mroué enterre une fois pour toutes ces dossiers inutiles. Puis il aborde ses archives actives, celles qui le hantent continuellement et qui motivent sa démarche artistique : avis de disparition de civils qu’il collectionne depuis une dizaine d’années, vidéo où s’affichent des combattants druzes à la fin d’une journée de massacres dans le Chouf en 1983, vidéo d’une future kamikaze communiste qui précise ses motivations avant de se donner la mort… Mroué commente et explique mais, par moments, c’est l’ellipse qui l’emporte, preuve que son travail de mémoire n’est pas abouti. En fin de performance, il s’attarde sur le sourire de la kamikaze et confie son désir de créer quelque chose autour de ce sourire. Rabih Mroué construit et déconstruit. Il se souvient et oublie. Devant les spectateurs, il réactive cette mémoire en marche. Connaître son histoire pour s’en libérer : tel est le pari de l’artiste en entreprenant cette performance. La démarche libératrice, très intéressante en soi, est rattrapée par des imperfections dans la présentation – supports, transitions, progression – qui ne rendent pas l’objectif de la performance évident de prime abord. Heureusement pour lui, Mroué use avec brio d’une autodérision et d’un humour qui le sauvent de certaines situations désagréables. Sarah HATEM
À peine engagés dans la petite salle du Point éphémère, les spectateurs découvrent amusés qu’ils vont s’installer sur des tabourets « tam-tam » fluorescents disséminés selon un arc de cercle autour de la table de Rabih Mroué. Celui-ci arrive quelques instants plus tard. Il lance le support visuel depuis son ordinateur, jette un dernier coup d’œil sur ses notes et...