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ARCHITECTURE - Les habitants délaissent les vieilles habitations pour des bâtisses au style pompeux et nouveau riche Deux fois millénaire, la cité de Herat dévorée petit à petit par le béton

La cité de Herat, à l’ouest de Kaboul, en Afghanistan, autrefois étape prisée de la Route de la soie, est tiraillée entre une reconstruction à l’ancienne de ses monuments, palais et maisons en ruines ou leur démolition pour des bâtisses de verre fumé et de béton. Le combat semble donner raison à la démolition, même si elle est illégale. La reconstruction est longue. Il faut trouver les crédits, les artisans de techniques à l’ancienne et refaire les plans d’architecture à partir des ruines du temps et de la guerre. Herat, l’une des rares cités d’Asie centrale à avoir conservé sa structure médiévale, n’est plus ce qu’elle était : des quelque 200 000 habitants estimés dans les années 80, elle en abrite aujourd’hui environ trois millions et ses bâtiments de béton et de briques s’étendent à des miles à la ronde. Les habitants qui délaissent les vieilles habitations du vieux centre pour le béton justifient leur choix par « l’absence de confort : eau courante, eau chaude, électricité et sanitaires », explique Bismillah Fateh, de la Fondation Agha Khan pour la culture (AKHCP), engagée dans la renaissance de nombreux sites et logis de la cité plus que deux fois millénaire. « C’est un combat de tous les jours », dit Daoud Sadiq, un architecte de la fondation qui fait remettre en état la citerne et sa mosquée Malik, au pied de l’imposante citadelle Ikhtyaruddin, dont l’actuelle structure toute rénovée remonte au XVe siècle. Le palais d’Attarbachi, autrefois un très riche commerçant, est reconstruit avec la bénédiction du propriétaire. Autour d’une cour rectangulaire, les appartements d’hiver et d’été se font face. Les ouvriers achèvent le toit en y insérant une grande bâche imperméabilisante, une note contemporaine aux techniques traditionnelles. Les colonnades de stuc, renforcées par un grillage asphalté, sont badigeonnées d’un matériau à base de « pierre à chaux, de cendre et de lin », explique Daoud Sidiq. Pour les protéger des aléas du temps, rien de mieux dit-il, que de « mélanger du blanc d’œuf, de l’huile de cuisine et de la farine ». « Cela fait trois mois que nous travaillons à faire renaître l’ancienne demeure », explique à l’AFP ce passionné de vieilles pierres. Que deviendra ce joyau rené de ses cendres ? « C’est au propriétaire de décider », répond-on à la fondation. Au détour des ruelles étroites, les célèbres maisons Kebabi et Akhawan entièrement refaites ont été rendues à leurs propriétaires ou descendants. Pour entrer derrière les portails de bois massif, il faut frapper de l’un des deux heurtoirs aux sons différents, selon qu’on est une femme ou un homme afin d’être accueilli par un hôte du même sexe. Dans ces dédales, les demeures réémergent d’un long sommeil. Des pavés neufs mènent au quartier juif, fui par ses habitants à la fin des années 70. Deux synagogues ont été reconverties en mosquée et en école, une reste en ruines et l’autre aux peintures intérieures bleues chatoyantes est en réparation. Le hammam, redevenu fonctionnel, accueille une clientèle masculine. Le coût des reconstructions ? Il y a certes un soutien d’ONG européennes, mais « ce n’est pas un programme très cher », se contente de répondre un cadre de l’AKHCP, Anna Soave. La commission conjointe de développement Herat créée en 2005, entre autorités locales et gouvernementales, reste handicapée par l’absence de coordination des organismes qui la soutiennent. Résultat : une accélération des démolitions et constructions de villas illégales au style pompeux et nouveau riche. Le gouverneur de la province, Hossein Anvari, affirme que « toute construction illégale doit être détruite » et, selon lui, aucune bâtisse nouvelle ne peut dépasser « sept mètres de haut » dans le centre-ville. Mais il y en a des dizaines. Elles croissent et se multiplient.
La cité de Herat, à l’ouest de Kaboul, en Afghanistan, autrefois étape prisée de la Route de la soie, est tiraillée entre une reconstruction à l’ancienne de ses monuments, palais et maisons en ruines ou leur démolition pour des bâtisses de verre fumé et de béton. Le combat semble donner raison à la démolition, même si elle est illégale. La reconstruction est longue. Il faut...