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WEB CULTURE - Ce réseau social de 40 millions d’utilisateurs va-t-il trop loin ? Le miroir à deux... Facebook Dossier réalisé par Maya GHANDOUR HERT

Il y a quelques mois, un mail tombe dans la boîte aux lettres de l’auteur de ces lignes. Il dit, en anglais : « Dania vous a ajoutée comme amie dans Facebook. Nous avons besoin que vous confirmiez que vous êtes réellement une amie de Dania. » Suivait le lien ad hoc. Qui diable était donc cette Dania ? Vague nostalgie remontée d’une cour d’école sous les pins. Et Facebook, quèsaco ? En un clic, l’immense communauté de « facebookers » s’enrichissait d’une âme. Plus de 46 millions de « facebookeurs » sur la planète, des centaines de milliers de nouvelles recrues toutes les semaines. De quoi ne plus se sentir seul… Au Liban, le phénomène dépasse la tendance pour devenir profondément ancré dans notre way of life. Aux événements mondains, à la plage, en classe, au boulot, prémunis de nos appareils, on clique pour poster les photos sur FB et « taguer » les personnes présentes sur le cliché. Sur Facebook, des millions de terriens sont désireux de tout dévoiler. Ou presque. Brrrr… Cela fait froid dans le dos. Les réseaux sociaux ont connu cette année une croissance effrénée. Ces sites proposent aux internautes de publier du contenu audio, photo, vidéo et de les partager avec les autres membres. Dernier né de cette tendance, le site Facebook qui a ouvert ses portes à tous les utilisateurs en septembre 2006 et qui, en un an, a connu une progression de 270 % ! Emblématique du Web 2.0, le principe de Facebook est de permettre à l’internaute de rejoindre en quelques clics une communauté de plus de 46 millions de personnes et d’interagir avec elles ! Le mode de fonctionnement est simple, chaque membre crée son profil en posant une photo (ou plusieurs, même des albums entiers pour les plus exhibitionnistes !), en donnant une multitude d’informations, futiles (votre humeur), intimes (marié, célibataire), professionnelles (mini-CV). Facebook vous informe de leur moindre mise à jour, calcule qui sont vos amis communs, indique ceux qui vous sont les plus utiles (application Socialistics). Un onglet « news feed » récapitule ainsi toutes vos actions récentes : une photo ajoutée, trois nouveaux amis... La page d’accueil « home » offre ce même récapitulatif, mais à l’échelle de votre réseau. Sans même l’avoir demandé, il vous indique que votre ami Mazen a mis à jour son profil – il se déclare « très inquiet pour le pays » –, que Ziad a rejoint un groupe de discussion intitulé « Boum dijj dijj.. Infijar ! Fi madraseh ? » et que Diana est désormais membre du groupe « Xanax est le 5e élément ». La réciproque est évidemment valable. Vos 105 amis savent désormais que vous avez perdu au quiz musical. Un comble pour le fou de rock que vous êtes. Ils se feront un plaisir d’en rire sur votre « mur » de messages. Vous ne cherchiez pas un job dans le domaine, n’est-ce pas ? Cette réactualisation partagée peut donner lieu à des quiproquos. Karim H. avait annoncé sur son Facebook son mariage. Avant de se raviser : trop intime. Il décoche la case marquée « Karim H. est marié à Tina N. », ce qui fait envoyer à ses amis le message suivant : « Karim H. et Tina N. ne sont plus fiancés. » Drame. Facebook permet aussi d’écrire des notes, de laisser des messages aux amis, voire de retrouver des gens. Comme le raconte Dina : « J’ai trouvé un cousin du Brésil dont je connaissais l’existence, mais ne l’avais jamais rencontré. Une tante aussi. Puis, de fil en aiguille, j’ai trouvé un groupe sur ma ville de naissance. » Car on peut aussi former des groupes, sur des thématiques variées. Facile et ludique Jusque-là, rien de révolutionnaire. Les véritables atouts de ce réseau sont technologiques : au niveau des fonctions plus avancées, il est possible de créer des liens vers son blog ou vers son site, offrir des cadeaux virtuels, ou encore « to poke » ses contacts (c’est un moyen de faire coucou à quelqu’un sans pour autant lui écrire un message, comme ça, pour le fun). De jouer aussi, car on joue beaucoup sur Facebook (c’est ce qui frappe le néophyte). À des quiz, des tests, des idioties. Sur FB (pour les intimes), on s’offre des verres virtuels, on se teste, on se moque, on se transforme même en loup-garou, en vampire. Sans autre but apparent que celui de rire et de rester en contact avec ses amis. Le site ne s’arrête pas là et cumule les applications annexes, le but étant de faire du réseau social un véritable système d’exploitation. À titre d’exemple : Rock your Firefox permet aux membres du réseau de partager leurs extensions préférées avec leurs contacts ; Nudgemii est une application qui permet de recevoir gratuitement des SMS d’autres inscrits sur son mobile et The Filter est un outil qui facilite l’écoute et le partage de musique sur Facebook, permettant même sa synchronisation avec un iPod. Le succès du site repose donc premièrement sur sa simplicité d’utilisation – nul besoin d’être un docteur ès sciences pour entrer dans l’univers du Web 2.0 – deuxièmement, sur la possibilité de regrouper sur une même plate-forme divers outils multimédias et, troisièmement, sur la facilité pour le « facebookeur » de créer son propre réseau social. Érosion de la vie privée Facebook a récemment informé ses membres d’une nouvelle fonction de recherche ouverte au public, qui montrera sur Google la photo vignette tirée de la page de profil du membre de Facebook, accompagnée de liens permettant d’interagir avec celui-ci. Cependant, il faudra s’inscrire sur Facebook pour pouvoir ajouter un ami ou lui envoyer un message. « Les utilisateurs qui souhaitent restreindre l’information affichée publiquement ou se soustraire complètement à la fonction peuvent changer leurs paramètres de confidentialité. Ils disposent d’un mois pour le faire », indiquait le message. Malgré que Facebook se soit fait rassurant, plusieurs personnes se sont dites déçues du geste. « Cette initiative fait du réseau social Facebook un véritable annuaire des pages blanches sur le Web », a commenté le spécialiste technologique Om Malik sur son blogue GigaOm. Malik et d’autres se disent préoccupés de la « retraçabilité » des données laissées derrière eux de façon routinière par les utilisateurs de sites de « réseautage » social et autres communautés en ligne. Certains s’inquiètent à la perspective de voir du contenu personnel être regroupé à des fins de marketing ou autres. Des experts en sécurité ont souligné le risque que pose l’affichage public de sa date de naissance – une des options du profil de Facebook – parce que cette donnée est traditionnellement utilisée par les banques pour identifier leurs clients. Certes il y a un côté ludique et « espion » qui a favorisé le buzz, car tout le monde voit ce que vous faites sur FB. Facebook parie sur l’envie des gens d’échanger et de partager. Mais aussi, à l’évidence, d’espionner et de s’exhiber. En quelques mots, Facebook c’est tout un programme basé sur votre vie privée, celle de vos proches, déballée aux yeux de ceux que vous aurez choisi d’inviter dans votre groupe d’amis. Bref, Facebook c’est inutile, futile et très « additif ». En plus, Big Brother is watching you. À vous de voir.
Il y a quelques mois, un mail tombe dans la boîte aux lettres de l’auteur de ces lignes. Il dit, en anglais : « Dania vous a ajoutée comme amie dans Facebook. Nous avons besoin que vous confirmiez que vous êtes réellement une amie de Dania. » Suivait le lien ad hoc. Qui diable était donc cette Dania ? Vague nostalgie remontée d’une cour d’école sous les pins. Et...