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Mise en place d’un système de monitoring du rendement des députés Un observatoire parlementaire dont l’ambition est de devenir une autorité indépendante de contrôle

Créer une autorité capable de rendre compte du travail des députés, sur le plan des politiques publiques et indépendamment de leurs opinions politiques : tel est l’objectif de l’Observatoire parlementaire libanais, Lebanese Parliamentary Monitor. Derrière ce projet ambitieux et unique dans le monde arabe, un groupe de jeunes de différents horizons, soutenus par le programme USAid, le National Democracy Institute et Amideast, qui se sont mis à pied d’œuvre en novembre 2006 pour entamer les recherches nécessaires à la mise sur pied de ce projet. Une première équipe a donc entamé le travail de recherche en novembre de l’année dernière, puis en janvier de nouvelles personnes se sont greffées au groupe d’origine. Elles ont envoyé 126 lettres aux bureaux des 126 députés de la Chambre, leur exposant les différents objectifs de l’Observatoire parlementaire. À ce jour, elles ont obtenu trois réponses, dont deux inutilisables. Mais loin de se décourager, ces jeunes avouent avoir pensé : « C’est bien, nous avons déjà trois réponses », au lieu de jeter l’éponge et de renoncer. Certains d’entre eux étaient déjà membres d’une organisation non gouvernementale appelée Nahwa el-mouwatiniya (Vers la citoyenneté), d’autres travaillaient pour des ONG internationales, comme le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), mais tous ont une même ambition désormais : faire de cet observatoire une institution, une autorité indépendante, à l’instar de ce qui se fait dans les pays européens, autorité qui aurait un poids important et dont les députés tiendraient compte tout au long de leur mandat. Ce projet vise à instaurer la transparence entre les citoyens et leurs députés qui, souvent, une fois élus, négligent les politiques publiques pour ne se consacrer qu’aux aspects purement politiciens de leur mandat. Une manière de propulser donc le Liban dans le XXIe siècle parlementaire et de redonner confiance aux citoyens en leurs représentants, surtout en l’absence d’un système unifié de rapport parlementaire. Les membres de l’Observatoire parlementaire libanais se fondent sur deux types de sources pour rassembler les informations dont ils ont besoin. Une source directe, d’abord, en interrogeant directement les principaux intéressés. À ce jour, ils ont déjà rencontré 26 députés qui ont répondu à leur questionnaire. Ce questionnaire comprend trois questions standard, qui sont posées à tous les députés : 1- Quelles sont pour le député les politiques publiques les plus importantes et qu’il considère comme prioritaires ? Quels sont les principaux projets qu’il a réalisés dans ces domaines ? 2- Quels sont les projets qu’il envisagerait de lancer si le Liban ne passait pas actuellement par une crise politique ? 3- Quelle est la position du député par rapport aux cinq politiques publiques que l’association considère comme étant prioritaires : justice, droits de l’homme et libertés publiques, loi électorale, aides sociales, sécurité et institutions sécuritaires ? Ensuite, les sources indirectes permettent d’apporter un complément d’informations indispensables. Ces sources sont assurées par les médias écrits en langue arabe : an-Nahar, al-Akhbar, al-Moustaqbal, al-Balad, mais aussi par les revues parlementaires. Les membres de l’observatoire ont dû passer des journées entières à revoir les archives des journaux pour reconstituer l’œuvre de chaque député et avoir une base de données suffisamment fournie pour leur permettre, par la suite, de diffuser les informations ainsi glanées, en ligne, sur le site de l’observatoire dont l’adresse est : http://lpmonitor.org Ils ont passé à la loupe le travail « législatif et de contrôle » de chaque député, indique ainsi Ayman Mehanna. Il explique que les informations ont été classées selon les cinq politiques publiques considérées comme prioritaires, à savoir : justice, droits de l’homme et libertés publiques, loi électorale, aides sociales, sécurité et institutions sécuritaires. Mais ces informations ont aussi été classées en 25 catégories, renvoyant à des catégories de politiques très détaillées et parfois en sous-catégories, de manière à affiner la recherche le plus possible et de pouvoir répondre aux attentes des citoyens. Le site Internet ne fonctionne pas encore. Il devait être lancé le 14 août dernier, mais il est toujours en construction et sera disponible très prochainement, indique M. Mehanna. Ce dernier cite les principaux collaborateurs au sein de l’équipe de l’observatoire : Yasmine Nsouli, Mohammad Atwi, Carmen Geha, Anthony Ghossein et Karim Mufti. Réactions des députés Comment les députés ont-ils réagi lorsque les membres de l’observatoire les ont contactés pour la première fois ? Karim Mufti indique qu’ils ont eu droit à toutes sortes de réactions, du style « Nous n’avons pas besoin de vous », « Je ne reconnais pas le Parlement ». « Certains nous ont carrément raccroché au nez, ajoute M. Mufti, d’autres ont prétexté les vacances d’été, ou encore les raisons de sécurité et leur déplacement à l’étranger. » Mais parfois, certains députés ont pu réserver de bonnes surprises aux jeunes chercheurs, un député du bloc Hezbollah les ayant remerciés de l’avoir poussé à se « gratter la tête, pour la première fois depuis mon élection en 2005 ». Cependant, après d’intenses contacts, parfois indirects, l’ONG a réussi à rassembler des informations sur 26 députés, majorité et opposition confondues. « Nous avons réussi à créer un effet boule de neige que les députés prennent de plus en plus au sérieux. Nous avons obtenu le soutien de nombreux députés qui sont très actifs. Évidemment, ceux qui travaillent le moins ou ne font rien ne sont pas très enthousiastes par rapport à notre projet. Il y a réellement des députés qui ne font rien ; il y en a même un qui a notifié le Parlement qu’il se retirait des toutes les commissions auxquelles il adhérait. » De plus, le fait de faire partie d’une commission parlementaire est souvent « un bluff, puisqu’il est impossible de savoir, au sein d’une commission, quel député a travaillé réellement et lequel n’a pas fait grand-chose ». « Il est important de fournir à la société libanaise une information concise et complète concernant l’action des députés », ajoutent Karim Mufti et Kamel Mehanna. C’est pourquoi il faudrait parvenir à terme à un lobby au sein du Parlement qui réclame « la publication des rapports de commissions de lois », pour que les citoyens et tous les gens intéressés aient accès à l’information par le biais du site Internet. Sur le site Internet qui est en cours de construction, l’objectif est à terme de parvenir à offrir une recherche pointue et aussi affinée que possible, selon un large éventail de critères : le non du député, la région libanaise concernée, le domaine de politique publique, etc. L’ONG veut offrir un vrai outil aux citoyens, lesquels pourront juger de la performance de leurs députés, mais aussi aux associations qui travaillent dans un domaine précis et qui veulent savoir quel serait l’interlocuteur le plus efficace dans un domaine donné, et enfin aux députés eux-mêmes qui pourront connaître le rendement de leurs collègues. Le but ultime étant d’institutionnaliser cet Observatoire parlementaire pour qu’il devienne à terme une autorité indépendante de surveillance mais non d’évaluation, la surveillance permettant uniquement de reporter et de classer par catégories le travail de chaque élu. « En Irlande, où le contrôle peut aller très loin, il est permis de demander une baisse de l’indemnité de transport du député si celui-ci habite très près du Parlement. Au Liban, nous n’en sommes pas encore là, mais nous aspirons à terme à élargir la palette d’indicateurs et d’aboutir à un système de “ranking”, de classification, en fonction du rendement de chaque député, une manière efficace et constructive de les mettre en concurrence », souligne M. Mufti. Une manière efficace aussi d’aider les électeurs à choisir leur prochain représentant, à la lumière du travail qu’il aura fourni tout au long de son mandat.
Créer une autorité capable de rendre compte du travail des députés, sur le plan des politiques publiques et indépendamment de leurs opinions politiques : tel est l’objectif de l’Observatoire parlementaire libanais, Lebanese Parliamentary Monitor. Derrière ce projet ambitieux et unique dans le monde arabe, un groupe de jeunes de différents horizons, soutenus par le programme USAid, le...