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Santé - Cancer

Joseph Kattan : Les thérapies ciblées dans le traitement du cancer restent la grande découverte du troisième millénaire

Le Dr Joseph Kattan, président de la Société libanaise d'oncologie, insiste sur les avancées thérapeutiques effectuées dans le traitement du cancer. C'est une note d'espoir qu'il aime communiquer à l'occasion de la Journée mondiale du cancer, célébrée demain.
De nos jours, le cancer n'est plus cette maladie inconnue que l'on traite par tâtonnement. Certes, c'est une maladie qui continue à faire peur. Mais sa nature est de plus en plus connue et les traitements de certaines tumeurs sont plus ciblés, ce qui augmente considérablement les taux de guérison et de survie.
C'est justement cette note d'espoir que le Dr Joseph Kattan, président de la Société libanaise d'oncologie, désire communiquer à l'occasion de la Journée mondiale du cancer. « La grande percée effectuée dans le traitement du cancer à l'échelle mondiale demeure ce recours aux thérapies ciblées, la chimiothérapie n'est plus administrée à l'aveuglette», insiste-t-il. Et de rappeler : « La chimiothérapie a été découverte fortuitement il y a plus de quarante ans avec l'utilisation du gaz moutarde azoté, un gaz neurotoxique auquel recourait l'armée. Celui-ci détruit la moelle et entraîne une baisse du taux des globules blancs dans le sang. C'est ainsi que cette classe de médicaments a commencé à être administrée aux personnes qui souffraient d'un cancer du sang ou d'hémopathies malignes. D'autres dérivés ont été mis au point pour traiter le cancer, avec toujours pour principe de détruire les cellules qui se multiplient. Parallèlement, les chercheurs jouaient sur ce principe, en essayant de le modifier, de l'intensifier et de corriger ses effets secondaires. »
Ces travaux ont porté leurs fruits et, avec le début de ce troisième millénaire, les thérapies ciblées ont commencé à voir le jour. «La thérapie ciblée, c'est la thérapie intelligente qui sait établir une différence entre la cellule maligne et la cellule normale, explique le Dr Kattan. Contrairement à la chimiothérapie qui détruisait les cellules qui se multiplient, y compris les cellules normales entraînant ainsi tous les effets secondaires, la thérapie ciblée vise les cellules malignes, puisqu'elle vise un défaut ou une caractéristique à l'intérieur même de la cellule. Souvent elle est dirigée contre un récepteur de la membrane de la cellule ou une enzyme de la cellule qui n'existent d'ailleurs que dans les cellules malignes. Donc, d'un côté, on s'est débarrassé complètement des effets secondaires toxiques de la chimiothérapie. D'autre part, nous disposons d'un traitement bénéfique non toxique. Néanmoins, les thérapies ciblées ont des effets secondaires, mais qui sont acceptables et transitoires, la diarrhée ou l'acné à titre d'exemple. »

Effets miraculeux
Les thérapies ciblées connaissent un grand succès au sein de la communauté médicale et leurs effets curatifs sont « miraculeux » pour certaines formes de cancer, « comme la leucémie myéloïde chronique qui se transforme en leucémie aiguë après trois à quatre ans » de son apparition. « Dans le passé, nous ne disposions pas de traitements efficaces à proposer, remarque le Dr Kattan. Nous administrions différentes sortes de médicaments dans l'attente de la catastrophe. Aujourd'hui, nous disposons d'un médicament capable de corriger la leucémie myéloïde chronique, ce qui lui a valu son surnom de "comprimé magique". »
Les lymphomes, c'est-à-dire les tumeurs qui se développent à partir du système lymphatique, «deviennent elles aussi curables ». À cela s'ajoutent les thérapies ciblées utilisées pour traiter certaines tumeurs du sein. « Associées à la chimiothérapie, elles ont non seulement un effet thérapeutique, mais aussi préventif dans le cancer du sein, note le Dr Kattan. D'autres thérapies orales ou injectables ont fait leurs preuves dans le traitement du cancer du côlon ou des tumeurs pulmonaires. Désormais, nous disposons d'une liste de quelque 20 thérapies ciblées qui agissent seules ou associées à la chimiothérapie. »

Sensibilisation au diagnostic précoce
La deuxième grande percée effectuée dans la lutte contre le cancer demeure, selon le Dr Kattan, la sensibilisation au diagnostic précoce grâce à un dépistage dans le cadre d'une politique nationale. «Quatre cancers peuvent profiter de ces programmes de dépistage, remarque-t-il. Il s'agit du cancer du sein, du côlon, de la prostate et du col de l'utérus. »
«La vaccination oncologique est également un domaine très prometteur, qui demeure au stade de l'investigation, poursuit l'oncologue. Nous disposons toutefois du vaccin anti-HPV qui prévient le cancer du col de l'utérus. Il est vrai qu'il ne s'agit pas d'un vaccin anticancer, mais c'est un vaccin antivirus qui élimine la cause du cancer. »

Incidence du cancer
En ce qui concerne l'incidence du cancer au Liban, le Dr Kattan distingue entre «la vraie et la fausse augmentation » du nombre des cas. «Partout dans le monde, toutes les deux décennies, l'incidence du cancer augmente de 3 cas par an sur 100000 habitants, explique-t-il. Le rapport 2004 du Registre national du cancer fait état de 180 nouveaux cas par an sur 100000 habitants. C'est un chiffre énorme qui demeure toutefois inférieur aux chiffres observés en Europe (plus de 200 cas par an) ou aux États-Unis (près de 300 cas par ans). Cela est dû, d'une part, à l'augmentation de l'espérance de vie, la moyenne d'âge au Liban étant aux alentours de 70 ans. D'autre part, la levée du tabou qui entourait la maladie fait qu'on en parle plus. À cela s'ajoute le taux de survie et de guérison qui a considérablement augmenté. Le dépistage constitue lui aussi un facteur important dans cette fausse impression d'augmentation du nombre des cas. Depuis que la campagne nationale de dépistage du cancer du sein a été lancée il y a plusieurs années, l'incidence du cancer du sein a augmenté, puisqu'un grand nombre de cas est découvert à un stade précoce. La mortalité a toutefois diminué. »
Au Liban, comme partout dans le monde, le cancer du sein demeure la principale tumeur détectée chez la femme (35 %), suivi du cancer du côlon et du poumon. Chez l'homme, le cancer du poumon demeure en tête de liste (16%), suivi du cancer de la prostate (15%) et du côlon (14 %).
« La particularité au Liban demeure toutefois l'augmentation des cas de cancer de la vessie par rapport aux autres pays, constate le Dr Kattan. Le cancer de la vessie fait partie des cinq premiers cancers les plus fréquents. Dans d'autres pays, cette forme de tumeur est à la dixième position ou plus. Malheureusement, nous ignorons encore la cause de cette tumeur, ce qui ouvre le domaine des recherches épidémiologiques. Il est sûr que le tabac joue un rôle dans l'apparition de ce cancer, mais le narguilé en est-il vraiment plus responsable que le tabac ? Les recherches le démontreront. »

Augmenter la survie des cas inguérissables
Avec toutes les avancées effectuées dans le domaine de la recherche oncologique, pourrait-on un jour réguler le cancer ? « Depuis que le cancer a été diagnostiqué il y a plusieurs décennies, nous avons effectué des pas de géant dans la compréhension de la nature de cette maladie et des moyens de la traiter, répond le Dr Kattan. Au lieu de parler d'une maladie mortelle, on parle aujourd'hui d'une maladie guérissable dans 60 à 70 % des cas, tous moyens thérapeutiques confondus. Les recherches se poursuivent pour que les 30 à 40 % puissent être traités comme les autres maladies chroniques. Je peux assurer que nous sommes en train de témoigner des avancées thérapeutiques pour pouvoir, au moins, augmenter la survie des cas encore inguérissables. Si on arrive à le faire, on pourra tourner la page du cancer et s'intéresser à d'autres maladies qui, bien que non médiatisées, sont sérieuses, comme les maladies du système ou encore les maladies nerveuses. »
De nos jours, le cancer n'est plus cette maladie inconnue que l'on traite par tâtonnement. Certes, c'est une maladie qui continue à faire peur. Mais sa nature est de plus en plus connue et les traitements de certaines tumeurs sont plus ciblés, ce qui augmente considérablement les taux de guérison et de survie.C'est justement cette note d'espoir que le...

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