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ÉCLAIRAGE Deux logiques s’affrontent, avec pour enjeu l’échéance présidentielle

Avec leurs résultats mitigés, tant à Beyrouth, où le faible taux de participation soulève de nombreuses interrogations, qu’au Metn, où en dépit de la victoire du candidat aouniste, le président Amine Gemayel se considère victorieux sur le plan politique, les élections partielles occupent encore la scène médiatique. Mais déjà, tous les regards se tournent vers l’échéance présidentielle. Le président de la Chambre, qui garde un mutisme inhabituel, est une fois de plus au cœur des spéculations, tant en raison de la séance de l’élection qu’il a fixée au 25 septembre qu’à cause de l’initiative qu’il serait en train de préparer. Mais aussi bien chez les forces du 14 Mars que du côté de l’opposition, nul ne semble y placer beaucoup d’espoirs, estimant que ni l’équation interne ni la situation internationale et régionale ne semblent favoriser un compromis. Sur le plan interne, chaque partie fait assumer à l’autre la responsabilité de l’impasse actuelle, et la vie politique tourne dans un cercle vicieux dont nul ne sait comment sortir. Toutefois, selon un membre des forces du 14 Mars, l’élection partielle du Metn aurait montré qu’une partie des chrétiens a été sensible à l’argumentation du camp de la majorité, puisqu’elle a voté en faveur du président Amine Gemayel, contre le candidat du général Aoun lequel, toujours selon cette personnalité du 14 Mars, avait raflé toutes ces voix au cours des élections de 2005. La même personnalité estime ainsi qu’il y a eu un grand changement au sein de l’opinion publique chrétienne, et que si la majorité sait bien exploiter cette nouvelle tendance, très bientôt le chef du CPL ne serait plus qu’un courant minoritaire chez les chrétiens. De toute façon, toujours selon cette personnalité du 14 Mars, le général Michel Aoun ne peut plus prétendre à la magistrature suprême en se basant sur le fait qu’il est le principal représentant de la communauté chrétienne. L’argument selon lequel il faudrait choisir « l’homme fort » au sein de chaque communauté pour les trois principaux postes de l’État serait ainsi tombé, affirme ce membre de la majorité parlementaire. Il n’en reste pas moins convaincu toutefois que l’opposition va continuer à affirmer que le général Aoun est son candidat à la présidence de la République pour justement saboter cette échéance. Selon cette personnalité, l’opposition veut provoquer une vacance à la tête de l’État pour plonger le pays dans le chaos et l’affaiblir, pour qu’il soit une carte maîtresse entre les mains des Syriens et des Iraniens. Ce membre du 14 Mars s’étonne de l’accusation portée contre ce camp de servir la politique américaine, affirmant que les États-Unis n’ont pas une politique précise au Liban et qu’ils n’ont qu’une priorité : assurer leurs intérêts vitaux. Or, dans cette optique, le Liban n’est pas, pour eux, un enjeu. Par conséquent, ils ne s’intéressent pas vraiment à ce que fait la majorité, contrairement à ce que prétend l’opposition. Cette dernière rejette totalement les allégations du 14 Mars. Pour elle, les élections partielles ont été un échec pour la majorité : à Beyrouth, avec un taux de participation inférieur à 20 %, le Courant du futur n’a pas réussi à mobiliser les électeurs, et même chez les sunnites, il y aurait, selon elle, un recul dans la popularité du candidat « haririen ». Au Metn, la polémique se poursuit d’ailleurs jusqu’à aujourd’hui et le CPL ne reconnaît qu’une perte de 3 000 voix maronites, affirmant que c’est une baisse minime dans les circonstances actuelles et tout à fait justifiée, puisqu’il s’agissait d’élire un remplaçant à un jeune ministre assassiné avec tout le potentiel émotif qui accompagne ce genre de tragédie. Sans oublier le fait que le Metn est le fief des Gemayel et que par conséquent, l’ancien chef de l’État avait un avantage au départ. D’autres arguments sont aussi avancés, notamment l’utilisation de l’argent de la part de la majorité pour soudoyer les électeurs. Mais ce que l’on retient de toutes ces accusations et contre-accusations, c’est que chaque partie continue à croire qu’elle est en droit d’imposer « son » candidat à la présidence de la République. Si les élections partielles s’étaient terminées sur des résultats plus décisifs, une partie aurait pu être poussée à être plus conciliante. Mais face à cette situation en demi-teinte, chaque camp reste sur ses positions et rien n’indique qu’un compromis est en vue. Si la majorité accuse l’opposition de vouloir le chaos, l’opposition, elle, pense que la majorité la place devant le choix suivant : soit elle assure l’élection d’un candidat issu des rangs du 14 Mars, en participant à la séance d’élection présidentielle, soit elle sabote cette élection et le gouvernement actuel prendra le pouvoir sans partage, en attendant l’organisation de nouvelles élections. Or, les deux cas de figure sont rejetés par l’opposition qui, tout en ne dévoilant pas son propre scénario, se contentant de réclamer la formation d’un gouvernement d’union nationale, affirme qu’elle ne se laissera pas faire et qu’elle ne permettra pas à la majorité de gouverner le pays exclusivement. Elle dément bien sûr faire le jeu de la Syrie et de l’Iran, ajoutant qu’elle ne cherche qu’à obtenir une participation effective au pouvoir, en rapport avec sa représentativité populaire. L’opposition explique par contre que le véritable objectif de la majorité est de détruire le Hezbollah, à la demande des Américains. Le projet consistait à isoler ce dernier sur la scène locale et à le faire ensuite tomber sous la pression populaire. Or, l’entente conclue entre le Hezbollah et le CPL a déjoué ce plan. D’où la haine vouée au général Aoun, qualifié depuis « d’empêcheur de tourner en rond ». Mais, toujours selon l’opposition, Michel Aoun a agi par conviction, offrant une solution négociée au problème des armes du Hezbollah, que, pour l’instant, aucune force n’a pu neutraliser. L’opposition estime aussi que plus le temps passe et plus le nombre de Libanais convaincus de la justesse des options du chef du CPL augmentera... En attendant, les deux parties sont d’accord pour considérer que s’il n’y a pas d’entente sur l’échéance présidentielle, le pays se dirige vers une crise sans précédent... Scarlett HADDAD

Avec leurs résultats mitigés, tant à Beyrouth, où le faible taux de participation soulève de nombreuses interrogations, qu’au Metn, où en dépit de la victoire du candidat aouniste, le président Amine Gemayel se considère victorieux sur le plan politique, les élections partielles occupent encore la scène médiatique. Mais déjà, tous les regards se tournent vers l’échéance...