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Actualités - OPINION

Pamphlet… à retardement

L’« Homo libanicus » est une variété rare de l’Homo sapiens… Sauf que, dès qu’il s’agit de la chose publique, il n’est plus « sapiens » pour un sou. Dès qu’on lui parle de « démocratie » et que l’on évoque devant lui la possibilité d’« élections », il se sent d’abord élec… trifié. De Docteur Jeckyll qu’il prétend imiter, il se transforme derechef en Mister Hyde. La promotion sociale, l’illusion d’un pouvoir quelconque sur ses semblables, la fatuité maquillée en dignité, l’appât miroité de gains détournés, tout cela se conjugue, se construit, se synthétise dans son cerveau pour ne plus provoquer en lui qu’un irrésistible bond en avant et une agressivité tant physique que mentale à faire pâlir les mânes des préhominiens sortis des cavernes. Jamais on n’aura vu autant de facultés, de talents et de brio se combiner de la sorte en un phénomène vivant, illustrant une variété spécifique dont cet Homo libanicus est le seul représentant. Franc-parleur, hâbleur, menteur, possédé ou vendu, il manie l’art de métamorphoser les tares en autant de qualités. Il est, bien sûr, patriote et souverainiste. Serviable et généreux de sa personne. Compatissant envers les plus humbles et chevaleresque face à ses concurrents. Il ne rêve que d’aider le bon peuple, de réformer les institutions (toujours déficientes) d’être le héraut de la paix et de la justice, et de contribuer à faire du « Parlement » qui l’abritera le haut lieu de l’éthique et de la morale, quitte à ne fermer ni l’œil ni le portefeuille, 24 heures sur 24 et 365 jours par an. Le tout, multiplié par quatre, avec possibilité certaine de renouvellement. Il y a cent ans que « ça doure » ! Depuis que les imbéciles d’Occidentaux se sont avisés, en 1920, d’octroyer un semblant d’indépendance à une portion chaotique du Moyen-Orient. Portion qui n’est ni moyenne, ni orientale selon la moitié de ses habitants, ni occidentale (quelle horreur !) selon l’autre moitié. Alors que voulez-vous ? Se laisser faire comme un benêt ? l’Homo libanicus se redressera sur ses pattes arrière et, sans trop réfléchir, trouvera plus d’un tour dans son sac. Avec ça, qui de vous, lecteurs, osera encore dire (ou penser) que le Liban n’a pas « progressé » depuis ? Au départ, il ne comptait que 55 députés. Il en est aujourd’hui à 128. L’économie s’y traitait en petites livres libanaises. Elle « ronfle » aujourd’hui à coups de dollars américains. On y trouvait deux millions de résidents. On en compte à présent quatre, sans parler des hôtes permanents. Les zones constructibles couvraient dix pour cent du territoire et s’écartaient stupidement du rivage et des plages. Elles ont envahi, de nos jours, les soixante-dix pour cent du sol national avec, en prime et pieds dans l’eau, le béton hideux et incorruptible. Il n’est pas jusqu’à la paysanne qui, le nombril à l’air, ne campe la femme moderne. Et les citadins, écartelés entre le cabriolet sport de Monsieur VIP et le 4x4 de Madame-son-amazone, font office de protagonistes dans un film de science-fiction planant dans l’espace. Les ennuis politiques attisaient les orateurs et se réglaient à la bonne (ou mauvaise) franquette entre le minaret et le clocher. On les règle, à présent, à coups d’obus ou au son crépitant des kalachnikovs. Le Liban n’avait qu’une armée nationale. Il en a aujourd’hui deux, dont l’une affiche une résistance à toute épreuve et à toute usure. Sans omettre (mais veuillez patienter) l’éventualité de deux gouvernements et de deux présidents qui s’entre-déchireront dans ce mouchoir de poche. Les députés pouvaient encore s’invectiver. Aujourd’hui, ils s’insultent. Même le climat s’est mis de la partie. Il est devenu, lui aussi, excessif. Et vous me direz que les Libanais du XXIe siècle, ainsi rodés depuis des décennies, ne sont pas « progressistes » ? Souvenez-vous de ceux de 1975 qui en furent les timides pionniers : les kamikazes actuels les feraient mourir d’envie… Me demanderez-vous enfin pourquoi j’écris ? Mais pour vous dérider, bonnes gens ! Un sourire est toujours bon à prendre. Et n’oubliez surtout pas, Beyrouthins et Metniotes, d’aller voter… consciencieusement, demain dimanche. Louis INGEA Architecte d’intérieur

L’« Homo libanicus » est une variété rare de l’Homo
sapiens…
Sauf que, dès qu’il s’agit de la chose publique, il n’est plus « sapiens » pour un sou.
Dès qu’on lui parle de « démocratie » et que l’on évoque devant lui la possibilité d’« élections », il se sent d’abord élec… trifié. De Docteur Jeckyll qu’il prétend imiter, il se transforme...