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Actualités - OPINION

La nouvelle diplomatie de l’UE à l’ère du Traité simplifié européen P. Fady FADEL

L’Union européenne (UE) est une organisation internationale régionale créée par le traité de Maastricht, signé le 7 février 1992. Elle est fondée sur les communautés européennes, complétées par des politiques et des formes de coopération diverses. En effet, l’Union européenne repose sur trois piliers : – les communautés européennes (premier pilier) ; – la Politique étrangère et sécurité commune ou PESC (deuxième pilier) ; – la Justice et les affaires intérieures (JAI) devenu le pilier de coopération en matière de police et de justice pénale (troisième pilier) suite au traité d’Amsterdam. L’UE est le résultat d’un processus de coopération et d’intégration entre États du continent européen, qui a démarré par la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA) en 1951 avec 6 pays (Belgique, Allemagne, France, Italie, Luxembourg et Pays-Bas). Après l’échec en 1954 de la Communauté européenne de défense (CED), deux traités conclus à Rome le 25 mars 1957 instituent la Communauté économique européenne et la Communauté européenne de l’énergie atomique (CEEA) ou Euratom. Les traités CECA, CEE et CEEA constituent ainsi les traités de base de l’ordre juridique communautaire, auxquels s’ajoutent l’Acte unique (1986), le traité sur l’UE (1992), ainsi que les traités d’Amsterdam (1997) et de Nice (2001). Le dernier traité à venir, et qui débloquera la vie institutionnelle au sein de l’UE après l’élargissement jusqu’aux 27 pays et le non-aboutissement du projet de la Constitution européenne, est le Traité simplifié européen, dont la rédaction devra être finalisée d’ici à la fin 2007. 1) État des lieux de la PESC Depuis l’entrée en vigueur du traité d’Amsterdam, le 1er mai 1999, un poste de haut représentant de la PESC est créé. Celui-ci « assiste le Conseil pour les questions relevant de la PESC, en contribuant notamment à la formulation, à l’élaboration et à la mise en œuvre des décisions politiques et, le cas échéant, en agissant au nom du Conseil et à la demande de la présidence, en conduisant le dialogue politique avec des tiers » (art. 26). Le Conseil européen de Cologne, le 4 juin 1999, l’attribue à M. Javier Solana, jusqu’alors secrétaire général de l’OTAN. Le haut représentant de la PESC est par ailleurs secrétaire général du Conseil de l’Union européenne. Il est également secrétaire général de l’Union de l’Europe occidentale. Sur la scène internationale, le haut représentant de la PESC est souvent accompagné du président du Conseil et du président de la Commission. Les États assurent pour six mois, à tour de rôle, la présidence du Conseil de l’Union européenne. Pour assurer une continuité, le système de la troïka a été instauré : la représentation de l’Union européenne associe le pays qui assure la présidence, celui qui l’a associé et celui qui lui succédera. Une Unité de planification de la politique et d’alerte rapide (Uppar) a été créée par le traité d’Amsterdam (1997) et placée sous l’autorité du secrétaire général du Conseil, haut représentant pour la Pesc, afin : – d’apporter une aide à la détermination des priorités stratégiques de l’action de l’Union et des moyens à mettre en œuvre ; – d’exercer une fonction de suivi et une fonction plus classique d’« analyse et prévision ». Un nouvel organe, le Comité politique et de sécurité (Cops), contribue à la préparation et au suivi des travaux de la PESC par des réunions bihebdomadaires. Il assure le suivi de la situation internationale, formule des avis sur la politique étrangère de l’UE à l’intention du Conseil, assure la surveillance des politiques mises en œuvre. Sa présidence est assurée par la présidence en exercice de l’UE ou en temps de crise par le haut représentant. Unités de base de la PESC, des groupes de travail fonctionnent en permanence, en fonction de sujets géographiques (Afrique, Asie, Proche-Orient) ou thématiques (désarmement, Nations unies, protocole de Kyoto), qui associent des représentants des États membres et qui préparent les travaux du Cops. Trois instruments sont à la disposition de la PESC pour la mise en œuvre de la volonté politique de l’UE en matière de diplomatie et de sécurité commune. En premier lieu, il s’agit des orientations générales et des stratégies communes : elles sont fixées par le Conseil européen par exemple pour donner une visibilité et une cohérence forte à l’action de l’UE. Elles peuvent concerner des compétences relevant des trois piliers de l’Union. Arrêtée à l’unanimité, une stratégie commune permet au Conseil des ministres de l’Union européenne de statuer ensuite à la majorité qualifiée pour adopter une position ou une action commune. Par exemple, des stratégies communes ont été adoptées en 1999 sur la Russie et l’Ukraine, en 2000 sur la Méditerranée. Quant aux positions communes, force est de constater que le Conseil de l’Union européenne peut les définir afin de servir de fil conducteur à la politique menée par les États membres et leur permettre de coordonner leur action. Ces positions peuvent être formalisées dans des décisions du Conseil. Une fois qu’une position commune est prise par le Conseil, les États membres doivent veiller à ce que leurs politiques nationales s’y conforment. Les positions sont arrêtées à l’unanimité sauf lorsqu’elles sont prises en déclinaison d’une stratégie commune : la majorité qualifiée peut alors être utilisée. Certaines de ces positions communes ont eu une grande importance politique, comme celles sur les Balkans, le Burundi, le Rwanda, l’Ukraine, le Kosovo, le Liban ou encore sur des thématiques (armes biologiques, prévention des conflits…). Enfin, le Conseil de l’Union européenne peut adopter des actions communes qui visent à faire converger les actions conduites par les États membres sur la scène internationale, ainsi qu’à mettre en œuvre des moyens matériels et financiers dans le cadre d’une action conjointe. Leur mise en œuvre relève de la responsabilité de la présidence. Elles sont arrêtées à l’unanimité. Les modalités peuvent être décidées à la majorité qualifiée lorsqu’elles découlent d’une stratégie commune. Or l’accord conclu la nuit du 23 juin entre les États membres de l’UE, réunis en sommet à Bruxelles, prévoit l’ouverture d’une conférence intergouvernementale cet été qui doit aboutir à un traité réformateur de l’UE en décembre 2007. Son entrée en vigueur devrait être à la mi-mai 2009. Ce nouveau traité, dit simplifié, ouvre un nouveau chapitre dans la diplomatie européenne. Quelles en sont les orientations principales ? 2) Vers une nouvelle politique étrangère de l’UE En examinant l’implication de l’UE sur la scène internationale et l’efficacité de son action « politique », force est de reconnaître que l’UE accumule des retards. Le désaccord autour du titre de ministre des Affaires étrangères en est un exemple. L’Europe n’est pas un État souverain, encore moins une fédération, donc elle ne peut avoir de ministres, ont conclu les chefs d’État des Vingt-Sept. De la présidence du Conseil européen à la Commission à Bruxelles, les négociations sur le titre du successeur de l’actuel haut représentant de la PESC auront duré moins d’un an. Quel gâchis de temps et d’énergie ! Cela étant, il convient de considérer les nouvelles orientations de position et d’action communes sur la scène internationale à partir de 2009. Grâce au traité simplifié, la politique étrangère de l’UE gagnera en visibilité et en efficacité. À partir de l’entrée en vigueur du nouveau traité réformateur, la représentation de la politique étrangère sera assumée par une seule personne. Trois l’assurent actuellement ! Appelé de nouveau dans le traité à venir haut représentant, le chef de la diplomatie européenne sera également vice-président de la Commission européenne. Il assurera en sa seule personne la mission assumée aujourd’hui par le haut représentant de la PESC (Javier Solana) et par la commissaire aux Relations extérieures (Benita Ferrero-Waldna). Ces deux derniers postes seront donc supprimés. La présence du ministre des Affaires étrangères du pays qui assure la présidence semestrielle de l’UE sera inutile, du fait que celle-ci est remplacée par une présidence stable de l’UE. Le nouveau président du Conseil européen, élu par les représentants de l’UE pour une durée renouvelable de deux ans et demi, préparera et animera les sommets européens et représentera l’UE sur la scène internationale. Il serait intéressant pour les juristes d’examiner par la suite les compétences partagées et les compétences exclusives entre le nouveau président et le haut représentant concernant la politique étrangère, une fois qu’on ait achevé la rédaction du traité réformateur. Quoi qu’il en soit, il convient de signaler que le partage de responsabilité à l’échelle internationale en réduisant le personnel, simplifiera les procédures de contact entre l’UE et le monde. L’on comprend aujourd’hui les plaintes des secrétaires d’État américains qui ne savent pas quel numéro composer pour « joindre l’Europe ». Un fait plus significatif encore, et qui, heureusement, disparaîtra avec la réforme en cours : le quartette sur le Proche-Orient – qui vient de nommer à sa tête Tony Blair – comporte en effet six représentants : un Russe, un Américain, le secrétaire général de l’Onu et trois Européens ! La « double casquette » du futur chef de la diplomatie européenne n’est pas un simple artifice. Elle démultipliera sa force de frappe. Grâce à sa fonction de vice-président de la Commission, il disposera des 6 milliards d’euros de budget annuel que l’Exécutif européen consacre à ses relations extérieures. Relayée par les 120 délégations de la Commission à l’étranger, l’action du haut représentant sera appuyée, à Bruxelles, par un « service extérieur commun », sorte de superministère des Affaires étrangères de l’UE, composé de fonctionnaires européens et de diplomates venus des États membres. À terme, ce service pourrait compter plusieurs milliers de personnels, auquel il faut adjoindre l’état-major européen actuel, le « quartier général » des opérations de gestion de crise, opérationnel depuis peu, et la possibilité, entérinée par le nouveau traité, de créer des « avant-gardes » dans la défense et, pourquoi pas, une armée commune (Le Figaro, samedi 30 juin et dimanche1er juillet 2007). Dans l’attente d’examiner les dispositions précises relatives à la diplomatie et à la défense, nous pouvons quand même déduire qu’il existe une nouvelle orientation de mettre en place une politique étrangère et une défense européenne constructives et évolutives. Jusqu’ici, la volonté politique des 27 pays a fait défaut. En effet, en cas de menace à la paix ou d’agression guerrière, les actions des délégations de la Commission européenne dans le monde et le budget qui leur est alloué manquent d’efficacité s’il n’y a pas d’orientation et de volonté communes. La politique étrangère reste soumise à la règle de l’unanimité. Un veto d’un État membre risque de bloquer une orientation et une position, voire une action quasi communes. Or, tout en admettant que, sur le Moyen-Orient aujourd’hui, l’UE est en grande harmonie avec les États-Unis (positions et actions), il n’en demeure pas moins que les divergences de fond entre les anciens États membres et les nouveaux États adhérents demeurent profondes face aux enjeux des rapports de force avec la Russie. Lorsque l’UE est divisée, comme elle l’est aujourd’hui sur la question de l’énergie face à la Russie, elle est inefficace, attentiste. Lorsqu’elle est vraiment unie, l’organisation européenne est capable de peser sur la scène internationale, comme elle le fait sur le climat, sur la question du nucléaire en Iran ou sur quelques aspects de la crise au Moyen-Orient. Le nouveau visage de l’action commune européenne à l’international peut être vu dans la composition des bataillons de la Finul, à majorité dominante européenne. Si les missions de maintien de la paix et la gestion de crise réussissent à l’UE à l’échelle internationale, ce pourrait être un gage d’autorité et de pouvoir grandissants en vue d’autres missions plus complexes, comme celle de l’imposition de paix (mission de guerre). De nouveau, tout est à prouver à partir du Moyen-Orient, et plus particulièrement du Liban. Cela s’avère encourageant, mais fait également peur. P. Fady FADEL Docteur en droit public et secrétaire général de l’Université antonine Article paru le Mardi 10 Juillet 2007
L’Union européenne (UE) est une organisation internationale régionale créée par le traité de Maastricht, signé le 7 février 1992. Elle est fondée sur les communautés européennes, complétées par des politiques et des formes de coopération diverses.
En effet, l’Union européenne repose sur trois piliers :
– les communautés européennes (premier pilier) ;
– la Politique...