EFFEUILLAGE Pour le meilleur Lamia EL-SAAD

Je suis une union. Que je sois d’amour, d’argent ou de raison, j’unis pour le meilleur et pour le pire. Je suis un lien que rien ne doit délier et il fut un heureux temps où rien ne me résistait. Véritable nœud gordien il y a quelques siècles, je suis aujourd’hui presque plus facile à défaire qu’un nœud de marin. Je ne représente plus, et ce depuis un certain temps, une situation inextricable ; banalisé à l’extrême, le divorce est devenu monnaie courante. Seulement voilà… Ceux qui commettent l’imprudence de croire que je ne suis qu’un contrat que l’on peut résilier en apposant une signature se trompent lourdement ; les cœurs s’accommodent moins bien que les lois d’une rupture. Il n’est pas toujours facile de refermer son cœur, de tourner la page ; et cette liberté retrouvée laisse souvent un amer goût de regrets. Je suis un accomplissement ; la consécration d’une relation amoureuse. Et dire que l’on m’accuse de n’être que routine et d’éteindre la flamme qui brûle en ceux qui s’aiment ! Je peux offrir un quotidien si délicieux que le temps paraît toujours trop court. Mais je suis curieusement perçu comme une cage dorée qui enferme les hommes et les femmes et les empêche de respirer. Je suis un heureux événement. Ma célébration est en général suivie d’une grande réception qui offre aux nouveaux mariés l’occasion de partager leur bonheur avec ceux qu’ils aiment. Elle représente un grand moment qui se prépare avec minutie et où tout est étudié : plan de table, choix de la musique, menu et jusqu’au moindre détail de la décoration… Je suis un événement majeur qui mérite une fête mémorable ! Tout doit être parfait ! À croire qu’une fête réussie est la garantie d’un mariage heureux et durable… Bien que la durée soit, à n’en pas douter, mon plus grand défi, j’ai souvent pris d’excellents départs pour m’essouffler rapidement ; je réussis mieux les courses de vitesse que les courses d’endurance. Et j’en connais la cause : j’ai été galvaudé ! J’ai été sous-estimé, bradé, pris à la légère, traité comme un repas pris sur le pouce… Je suis un engagement, une parole que l’on ne reprend pas. Je suis un consentement mutuel, et mon importance me permet de solliciter une bénédiction divine pour devenir sacrement.