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CONCERT - À l’Assembly Hall (AUB) Fluides et passionnées, ces sonates pour violon et clavier…

Présentés par le Kulturzentrum et l’ambassade d’Allemagne au Liban dans une tournée au pays du Cèdre, deux musiciens haut de gamme ont donné un concert à l’Assembly Hall (AUB). Sous les feux de la scène, Annette Barbara Vogel avec un violon Lorenzo Storioni, aimablement alloué par la Fondation art et culture du Land Nordrhein-Westfalen à Düsseldorf, et Stéphan Sylvestre au clavier pour lui donner la réplique. Une réplique devant un auditoire des plus restreints, une quinzaine de personnes, pour une prestation pourtant d’une grande qualité. Inexplicable absence du public quand, le même soir, se donnait un autre concert en ville, pour un quartette de clarinette présenté par le Conservatoire national supérieur de musique où la salle Aboukhater (USJ) affichait, comme d’habitude, presque complet ! Public peu nombreux certes, mais extrêmement attentif pour un menu sélectionné avec soin où, pour un dialogue fluide et passionné, le violon et le clavier, au meilleur de leur forme car servis par deux interprètes au-dessus de tout éloge, avaient des résonances particulièrement séduisantes. Un menu comprenant, avec Mozart, Fauré et Szymanowski, trois horizons mais deux périodes pour un discours au langage chatoyant, intense et coloré. Ouverture en douceur avec la Sonate KV454 en si bémol majeur pour violon et clavier du génie de Salzbourg. Trois mouvements (largo, andante et allegretto) pour une narration tout en charme et grâce. Pas d’état d’âme pour le compositeur de La flûte enchantée, mais un constant jaillissement de mélodies heureuses où la musique est un rêve ouaté avec des éclats de tendresse indicible. Notamment avec un archet qui invite aux voyages les plus lointains pour des sonorités soyeuses, diaphanes, chargées de toutes les promesses des joies de la vie... Jamais le clavier ne prend les rênes du pouvoir, mais soutient, avec une fermeté veloutée, les insaisissables lignes d’une mélodie aux contours caressants, surtout dans ce frileux andante tout en frémissements secrets… De Mozart à Szymanowski… Changement de cap, de tonalités et de couleurs musicales avec la Sonate n°1 en la majeur op 13 pour violon et piano de Gabriel Fauré, le plus inspiré des mélodistes français. Autres sonorités, autres mélodies, autre univers, autres aspirations que ceux de l’enfant prodige. Rythmes accélérés, tension dramatique, couleurs vives ou estompées, force d’un archet aux abords de la colère, grondement sourd du clavier qui abandonne brusquement ses tornades pour se lover en une grappe de notes opalescentes, voilà les frontières imperceptibles de l’opus de Fauré aux teintes bien impressionnistes pour une musique de chambre. Quatre mouvements (allegro molto, andante, allegro vivo, allegro quasi presto) pour traduire les remous intérieurs du compositeur de l’infortuné Pénélope…Œuvre brillante avec des moments d’exaltation pour un violon véhément, ardent, passionné. Discours enflammé pour un clavier qui n’est guère en reste avec ses trémolos et ses arpèges volcaniques ou perlés et ses envolées lyriques volant souvent la poésie au violon... Belle et grave mélancolie pour cet andante tout en teintes fines et « pastellisées ». Avec un rien pour la méditation et la pose romantique… Dans le même sillage de modernité, mais où souffle quand même un certain esprit foncièrement polonais, on conclut, après un petit entracte, avec la Sonate en ré mineur op 9, toujours pour violon et clavier, de Karol Szymanowski. Dans le registre grandiloquent et agité, cet opus tout en grands accords plaqués et tirades ne craignant ni le pathétique ni le mélodrame, la sonate de Szymanowski n’est pas sans rappeler certains grands maîtres, d’Alexandre Nikolaevitch Scriabine à Bella Bartok, en passant par Igor Stravinsky. Haletante, emportée, secouée entre fureur et passions apaisées, traversée d’éclairs fulgurants entre élans indomptables et cris du cœur, cette œuvre flamboyante et éruptive a bien des aspects révolutionnaires. Avec une subtile synthèse de l’esprit polonais et de l’inspiration européenne. Belle conciliation qui garde intacte toute la modernité des audaces contemporaines tout en ne négligeant guère les assises classiques pour une narration vibrante, tout comme celle des œuvres de Tchaïkovsky dont il partage les tourmentes et les ambiguïtés secrètes. Une œuvre d’une force brûlante qui va au-delà de ce qu’elle dit…Reflets insoupçonnés et impitoyables qu’un miroir sans concession renvoie en toute brutale et lumineuse franchise. Une œuvre qui subjugue, interprétée avec émotion et intelligence. Applaudissements marqués, mais pas de bis. Pour les « happy few » présents, un vrai régal. Quant aux mélomanes absents, ils ne sauront jamais ce qu’ils ont raté… Edgar DAVIDIAN

Présentés par le Kulturzentrum et l’ambassade d’Allemagne au Liban dans une tournée au pays du Cèdre, deux musiciens haut de gamme ont donné un concert à l’Assembly Hall (AUB). Sous les feux de la scène, Annette Barbara Vogel avec un violon Lorenzo Storioni, aimablement alloué par la Fondation art et culture du Land Nordrhein-Westfalen à Düsseldorf, et Stéphan...