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Actualités - CHRONOLOGIE

PORTRAIT D’ARTISTE - Parmi la sélection du 27e Salon d’automne du musée Sursock Alain Vassoyan: faire œuvre de saltimbanque...

Son Trou de mémoire est... exposé au Salon d’automne du musée Sursock*. Une œuvre interactive qui se présente sous forme de boule lumineuse en fibre de verre, percée d’un trou par lequel on aperçoit, à l’intérieur, une sorte de micro-manège qui tourne grâce à un petit moteur. Ce dernier fait circuler en boucle des éléments divers: figurines, branchages et clous. Lesquels butent, à chaque tour, contre des verres à pied provoquant une sonorité cristalline et régulière. Comme le bruit des souvenirs: ces appels de la mémoire auxquels on évite souvent de répondre. Née d’une idée grave, à savoir une «envie de réfléchir sur la mémoire collective – ou est-ce plutôt l’absence de mémoire? – du pays», cette installation, signée Alain Vassoyan, a néanmoins ce côté ludique propre à toutes les œuvres de cet artiste qui se définit comme un «saltimbanque» des arts plastiques. Un jeune homme qui préfère élaborer des créations amusantes plutôt que faire de «l’art prise de tête» et qui clame, haut et fort, n’avoir envie de sortir de son lit le matin que pour rire! Un parti pris de légèreté assumée qui n’exclut cependant ni la profondeur de sa réflexion ni celle de son émotion. À l’origine de l’élaboration de son Trou de mémoire, par exemple, une phrase tragique: «Celui qui oublie son passé est condamné à le revivre.» À méditer. Sauf que Vassoyan vous invite à y réfléchir de manière tactile! «J’aime faire un travail qui donne envie aux gens de le toucher, qui attise leur curiosité, les intrigue, les réveille, dit-il. Je travaille d’ailleurs beaucoup sur la jonction de deux thèmes antinomiques dans le but de créer une tension.» Un art construit donc sur une réflexion en profondeur, mais toujours enrobé de «dérision, de désinvolture, de jeu». Comme un cuisinier... Lorsqu’il est rentré au pays en 1997, après quinze ans d’absence, entre la France et le Canada, Alain Vassoyan a retrouvé avec émotion ses jouets d’enfant. De cette rencontre avec les objets qui ont bercé sa jeunesse, de ce «dialogue entre eux et moi, mais aussi des objets entre eux», est né un ensemble d’œuvres sculpturales élaborées à partir d’éléments de récupération. Dont une fresque géante qui s’étale sur un mur de huit mètres sur le site de l’Orange mécanique à Sin-el-Fil. Baptisée L’animal urbain, elle est réalisée en plâtre, fibre de verre, ciment, métal, fer soudé et divers matériaux recyclables... Un mélange de «matières premières», d’«ingrédients» qu’Alain Vassoyan affirme «accommoder comme un cuisinier». «Joujou» Après cette phase d’œuvres de récupération, Alain Vassoyan a eu envie d’expérimenter le travail de la figure humaine, mais de façon non académique. C’est ainsi qu’est né, un peu par hasard, sous les mains de ce professeur d’histoire de l’art et de modelage à l’ALBA, Joujou, son personnage fétiche, sorte d’image tridimensionnelle – élaborée en fibre de verre et papier mâché – du jeune garçon libanais. Sympathique et caricatural, le Joujou de Vassoyan est confronté, au gré de l’imagination de son créateur, à des situations hors contextes. Joujou et Jouliat, Joujou et Jouliette ou Le Joujoument dernier sont ainsi autant de caractères qui jouent sur les registres symboliques tirés de l’inconscient collectif libanais et universel. Aujourd’hui, les «Joujoumaniaques» – comprenez: les collectionneurs de la série des Joujou – s’arrachent chaque nouvelle figurine éditée en trois pièces seulement. Mais pour ce créateur multiforme et adepte de «l’art total» – celui qui mélange les genres, les médias, les disciplines (sculpture, son, image, etc.) –, il était hors de question de dormir sur les lauriers récoltés par son Joujou. Alain Vassoyan, pour qui la vie et l’art sont faits de renouvellements constants, cherche par-dessus tout à continuer à expérimenter de nouvelles expressions. Ainsi, il y a deux ans, il a saisi le prétexte d’un concours international lancé pour la commémoration du dixième anniversaire de la reconstruction de la ville de Kobé, au Japon, détruite lors d’un violent séisme en 1995, pour réaliser un tableau lumineux intitulé Transmigration. Peinture de lumière Élaborée en diodes électroluminescentes qui, au moyen d’un programme informatique, donnent naissance à 16 scènes mouvantes en boucle sur un écran, cette «toile en lumière froide» avait été exposée parmi la centaine d’œuvres sélectionnées sur huit mille, durant tout un mois en 2005, au musée Hyogo du Japon. Une «peinture de lumière» à laquelle Alain Vassoyan avait décidé de s’atteler en série après son expérience japonaise et après avoir mis les dernières touches à Trou de mémoire, son œuvre charnière. Sauf que les événements dramatiques qui se sont succédé après l’attentat de Hariri en ont décidé autrement. La guerre de juillet, surtout avec ses images d’enfants massacrés, va engendrer chez Vassoyan un effroi tel que, pour l’exorciser, il va revenir à ses personnages caricaturaux. Lesquels seront cette fois les acteurs d’une vidéo d’animation satirique réalisée avec la complicité de Karim Khneisser (qui en a signé le montage et les arrangements musicaux). Une vidéo qui – en déroulant des images de ces personnages en silicone et résine qui se démembrent, s’amputent et se recomposent de multiples manières – «raconte», mais toujours de manière «bédésque» et colorée, la vision cauchemardesque des enfants mutilés par la guerre. Pour exorciser le tragique, partager ses réflexions ou raconter ses histoires d’objets, Alain Vassoyan a définitivement choisi son art: celui de la dérision... Zéna ZALZAL * La XXVIIe édition du Salon d’automne du musée Sursock a été prolongée jusqu’au 15 février.
Son Trou de mémoire est... exposé au Salon d’automne du musée Sursock*. Une œuvre interactive qui se présente sous forme de boule lumineuse en fibre de verre, percée d’un trou par lequel on aperçoit, à l’intérieur, une sorte de micro-manège qui tourne grâce à un petit moteur. Ce dernier fait circuler en boucle des éléments divers: figurines, branchages et clous....