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Actualités - CHRONOLOGIE

Conférence - Arrêter la cigarette, seule prévention au cancer du poumon, qui tue le plus Le cancérologue libano-américain, Gabriel Sara : « L’espoir est aujourd’hui permis »

« Plus de 50 % des cancers ont été guéris en 2006 aux États-Unis. » Quant à la recherche, elle fait des « pas de géant », alors que « les traitements sont de plus en plus performants ». C’est par cette note d’espoir adressée aux personnes atteintes de cancer que l’oncologue Gabriel Sara, installé depuis 25 ans à New York, a entamé sa conférence au Centre sportif, culturel et social du Collège Notre-Dame de Jamhour, devant un public principalement composé d’élèves de terminale et de parents d’élèves. Une conférence destinée à expliquer le cancer, baptisé par les Libanais « Haydak el-marad » (cette autre maladie), car il les terrorise, les paralyse, au point de ne pas pouvoir le nommer. L’intervention du cancérologue a par la même occasion mis l’accent sur les dangers du tabac, responsable, dans 90 % des cas, du cancer du poumon, de même que l’intervenant a insisté sur l’importance du dépistage, notamment pour les cancers du sein, du côlon et du col de l’utérus. «Le cancer survient lorsque des cellules se rebellent et refusent de mourir selon le principe normal de renouvellement des cellules, qui suit un programme bien déterminé. Ces cellules se multiplient alors, formant ainsi une tumeur. C’est le début d’un cancer. Lorsque cette tumeur atteint les vaisseaux sanguins, elle lance dans le corps ce qu’on appelle les métastases » : c’est par ces mots simples que le professeur en médecine clinique à l’Université Columbia explique le cancer. « Il est important de vulgariser le concept », précise ainsi le Dr Gabriel Sara. Cette vulgarisation est essentielle pour se débarrasser de la peur et mieux aider les malades, insiste l’oncologue « senior attending » à l’hôpital St Luke’s-Roosevelt, à Manhattan, détenteur de trois boards américains en médecine interne, cancérologie et hématologie. Maladie taboue Le Dr Sara insiste aussi sur l’importance de la communication honnête entre le médecin et son patient, qui instaure une réelle complicité, mais aussi et surtout entre le malade et son entourage. « Il y a trop de non-dits, regrette-t-il. Le malade a pourtant besoin de savoir et de connaître ses choix de traitement, car la vérité libère. Il doit aussi savoir que l’on peut vivre avec le cancer. Le problème, déplore encore le cancérologue, est qu’on ne parle que des échecs. On ne raconte pas les guérisons, car le cancer est une maladie taboue. » Retraçant l’évolution des différentes formes de cancer, depuis 1930 jusqu’à 2002, à partir d’études menées aux États-Unis, le professeur Gabriel Sara précise qu’autrefois, c’était le cancer de l’estomac qui était responsable du plus grand nombre de décès. Mais aujourd’hui, constate-t-il, « c’est le cancer du poumon qui tue le plus, alors qu’il était rarissime au début du siècle ». « Il tue chaque année presque deux fois plus de femmes que le cancer du sein. Il tue autant que les cancers du sein, de l’utérus, du côlon et de l’ovaire réunis », tient-il aussi à préciser. Ce cancer est directement lié à la consommation de tabac et touche non seulement les fumeurs mais aussi les fumeurs passifs (qui ne fument pas mais respirent la fumée des autres). L’oncologue explique alors, toujours à partir d’études scientifiques menées aux USA, la corrélation parfaite entre les dépenses publicitaires consacrées au tabac et la hausse du nombre de personnes mortes du cancer du poumon, 20 ans plus tard. D’abord chez l’homme, directement ciblé par la publicité du mythique cow-boy américain (qui est d’ailleurs décédé du cancer du poumon), puis chez la femme, quelques années plus tard, lorsque les publicitaires ont commencé à courtiser cette dernière. Ainsi, selon les statistiques, à partir des années cinquante, c’est le cancer du poumon qui tue le plus d’hommes, et depuis 1985, ce même cancer tue plus de femmes que le cancer du sein. Le Dr Sara déplore par ailleurs que les publicités s’adressent aujourd’hui à des publics de plus en plus jeunes. Fumeurs passifs, attention danger Face au cancer qui peut prendre diverses formes, trois mesures sont à prendre, le dépistage, la prévention et le traitement. « Si le dépistage consiste pour une population normale à effectuer des tests, dans l’objectif de déceler une éventuelle tumeur, la prévention, elle, est importante chez les sujets à risque (tumeurs familiales, fumeurs, prostituées...). Quant au traitement, il est prescrit lorsque la maladie se déclare », note le médecin. À titre d’exemple, le Dr Sara indique que le dépistage du cancer du sein par une mammographie est nécessaire chez les femmes à partir de l’âge de 40 ans, d’autant que les chances de guérison de cette forme de cancer sont très élevées, plus particulièrement lorsque la maladie est dépistée à un stade précoce. « Allez voir votre médecin. Faites votre mammographie, lance Gabriel Sara aux femmes. N’ayez pas peur. » Il insiste, par contre, sur l’importance de la prévention pour éviter le cancer du poumon. « La prévention la plus efficace est d’arrêter la cigarette », conseille-t-il, le tabagisme étant, dans 90 % des cas, responsable du cancer du poumon. Le professeur lance, par la même occasion, un avertissement aux non-fumeurs ou fumeurs passifs qui fréquentent les lieux enfumés, et qui sont considérés comme une population à risque. « Ils devraient prendre davantage de précautions, car ils peuvent eux aussi être atteints », estime-t-il. Et de constater, avec consternation, combien les Libanais fument dans les bars, les boîtes de nuit et l’ensemble des lieux publics. D’ailleurs, précise-t-il encore, « beaucoup de formes de cancer sont liées au tabac ». Par contre, constate le professeur, le dépistage d’un tel cancer est très difficile, d’autant que seule une petite partie des malades atteints du cancer du poumon sont guérissables. À titre indicatif, sur 175 000 nouveaux cas de cancer du poumon diagnostiqués en 2006 aux États-Unis, seulement 13 000 ont été guéris, alors que 162 000 n’ont pas survécu. Nouveau vaccin En revanche, pour certaines formes de cancer, comme celui du col de l’utérus, le dépistage et la prévention sont tous deux efficaces. D’ailleurs, précise le Dr Sara, le cancer de l’utérus tend à diminuer. Quant au traitement, « il est très efficace, les cas de guérison étant nombreux ». Il précise qu’un vaccin a même été récemment lancé sur le marché, lié au cancer du col de l’utérus. Le professeur évoque également le cancer du côlon et du rectum, « qui apparaît généralement après l’âge de 50 ans, dont le dépistage est très efficace et le taux de guérison très élevé ». Après avoir expliqué les différents traitements, notamment la chirurgie, la radiothérapie, la chimiothérapie, l’immunothérapie, la biothérapie ainsi que les traitements alternatifs, le professeur Gabriel Sara précise que les décisions de traitements doivent être individualisées en fonction de chaque malade, de la forme et du stade de son cancer, d’où l’importance du dialogue entre le malade et son médecin. Quant aux malades condamnés, le traitement est préconisé dans la mesure où il améliore la qualité de vie et diminue les symptômes. L’espoir est aujourd’hui permis, même si de nombreux malades sont condamnés et que le traitement ne servira, pour certains, qu’à améliorer leur qualité de vie et les symptômes de leur maladie. Car la recherche fait des pas de géant et apporte, chaque jour, des réponses à « cette autre maladie », que l’on a toujours peur de nommer. Anne-Marie EL-HAGE

« Plus de 50 % des cancers ont été guéris en 2006 aux États-Unis. » Quant à la recherche, elle fait des « pas de géant », alors que « les traitements sont de plus en plus performants ». C’est par cette note d’espoir adressée aux personnes atteintes de cancer que l’oncologue Gabriel Sara, installé depuis 25 ans à New York, a entamé sa conférence au Centre...