Courrier « Shortbus », un film qui ne sortira probablement pas au Liban

Dans la lignée de ces longs-métrages qui abordent la sexualité librement en montrant des images ultrasulfureuses (et qui sont d’habitude accueillis avec plus ou moins de la réticence par le public et la critique), Shortbus est un de ces films explicites qui suivent plusieurs personnages new-yorkais dont les aventures tragicomiques oscillent entre sexualité et sentiments. Le film tourne autour de Shortbus, lieu hors normes où politique, art et sexe se mélangent, dans le New York de l’après 11-Septembre et des années Bush, une ville où, dit-on, il n’est pas très facile de vivre. Dans cet endroit, ces gens à part tentent de s’aider les uns les autres dans un joyeux bordel, performances et amitiés mêlées. Le réalisateur John Cameron Mitchell part du principe que le sexe décrit l’homme bien mieux que n’importe quel mot, que n’importe quelle image. Il a engagé ici des acteurs quasi inconnus et a travaillé à partir de leurs personnalités durant deux ans pour construire le scénario (un scénario chaotique qui, d’ailleurs, n’a visiblement pas pris autant de temps que la préparation des scènes orgiaques désordonnées et de mauvais goût). Face à tout cela, je ne peux que me poser la question : aurions-nous perdu une certaine pudeur au cinéma ? Je pense notamment au film japonais mythique L’empire des sens, ou encore au film anglais plus récent Nine Songs, des films qui disent être de l’art alors qu’ils déguisent sans trop de difficulté de la pornographie bon marché, classés X. Dans tous les cas, si la censure de notre cher pays s’avère conformiste pour ce film et qu’elle n’accepte pas de l’exhiber à l’affiche libanaise, ne pleurez pas messieurs dames car nous ne perdons pas grand-chose. Élias ABOU CHARAF