Rechercher
Rechercher

Actualités - RENCONTRE

RENCONTRE - Après Paris, elle signe ce soir à la CD-Thèque, Achrafieh, de 18h00 à 21h00 Les exercices de style de Zeina Abirached

Elle est pétillante, le regard curieux, avide de détails dans la rue, dans la vie, la sensibilité impatiente d’éprouver ou de se rappeler. Zeina Abirached cohabite parfaitement avec la petite fille qui est encore en elle. Elle continue de chatouiller sa nostalgie et de la caresser tendrement. Le résultat de cette entente : « 38 rue Youssef Semaani », ou un retour sur les lieux de ses premières et tendres années. Zeina Abirached dessine en noir et blanc, le trait appuyé, le détail souligné, dans un cadrage serré qui devient un peu sa marque de fabrique. Ce qui ne l’empêche pas de voir, en toute subtilité, le monde et ses couleurs. À l’ALBA, déjà, la jeune femme s’était distinguée avec [Beyrouth] Catharsis, un petit album qu’elle avait écrit et dessiné dans le cadre d’un projet lancé par l’atelier de recherche Chez moi, chez toi. L’histoire de ce livre, qui avait obtenu le premier prix au Concours international de la BD de Beyrouth, était, comme une fenêtre ouverte sur le passé, à la fois l’histoire de cette petite fille née en 1981, l’histoire, à travers son regard, d’un quartier, d’une ville prise entre deux murs, entre deux guerres et peut-être aussi l’histoire d’un ballon qui recouvre sa liberté. « Depuis, la ville est entrée en moi et je ne crois plus aux histoires d’Indiens, ni aux chasseurs d’oiseaux», avait-elle conclu dans [Beyrouth] Catharsis. Portrait d’un immeuble «J’ai écrit et dessiné 38, rue Youssef Semaani pendant ma première année à Paris», raconte Zeina. Paris où, après avoir suivi un cursus spécialisé en animation à l’École nationale des arts décoratifs (Ensad), elle se consacre actuellement à l’écriture de bandes dessinées. « J’ai voulu explorer un autre lieu de mon enfance, mon immeuble. » L’immeuble existe toujours, la rue aussi. « Les personnages qui peuplent l’immeuble existent ou ont existé », précise-elle, amusée. Je leur ai simplement inventé de nouveaux noms ! » Il y a Antoinette Hanafiyyé, Elmer Hajj-Boutros, Maryvonne Samboussik, Oscar Daoud, Thérèse et Théodore Marsabén, Jérémie Zallzalé, Roxane Kebbé, Claudine Roukoz, Désiré Aflatone, Ernest Challita, Rimone Talifone, Médée Abdo et même Karamazov Abou-Esber, le chat d’Antoinette. Il y a des dessins exquis, ponctués de maisons bien de chez nous, des linges accrochés aux balcons, des textes poétiques et de délicieuses drôleries. Ce monde vu à travers le regard de Zeina, quelque part entre Zazie dans le métro et les personnages de Georges Perec, est peuplé de visages, de personnages loufoques, mais jamais caricaturaux et de parfums d’Orient. « On peut considérer ce livre-objet comme un “ exercice de style ” où je brosse rapidement l’ambiance d’un microcosme spécifique, où je pose les bases d’une narration et où je joue à suggérer des histoires sans jamais les expliciter. » L’auteur a choisi un format inédit, le livre est une planche horizontale de trois fois cinq bandes, sous étui, que le lecteur peut déployer à sa guise. « J’ai voulu ainsi proposer plusieurs sens de lecture, un peu comme dans Milliards de poèmes de Queneau, et suggérer une déambulation du regard similaire à celle d’un narrateur dans l’espace de l’immeuble. Le lecteur peut ainsi s’improviser un parcours dans l’immeuble, décider de s’arrêter en chemin, revenir en arrière, retrouver un personnage, passer plus de temps avec l’un ou l’autre. » Et le noir et blanc «car, dit-elle, j’ai découvert la calligraphie arabe, l’encre de Chine, les estampes japonaises, l’expressionnisme allemand, Cartier-Bresson et Tati... » De passage à Beyrouth où elle va signer ces deux ouvrages, Zeina Abirached va également faire un détour par le « 38 rue Youssef Semaani » pour y poursuivre son travail de mémoire déjà entamé. « Mes deux BD peuvent être un peu considérées comme une bande-annonce à deux volets de la BD que j’écris actuellement. Je pose ainsi mon cadre, je prépare le terrain, je défriche mes souvenirs.» Puis elle compose, avant que le lecteur, au Liban et en France, ne déguste... Carla HENOUD
Elle est pétillante, le regard curieux, avide de détails dans la rue, dans la vie, la sensibilité impatiente d’éprouver ou de se rappeler. Zeina Abirached cohabite parfaitement avec la petite fille qui est encore en elle. Elle continue de chatouiller sa nostalgie et de la caresser tendrement. Le résultat de cette entente : « 38 rue Youssef Semaani », ou un retour sur les lieux de ses...