LITTÉRATURE Littell: «Il faudra du temps» pour expliquer le succès des «Bienveillantes»

L’écrivain américain Jonathan Littell, prix Goncourt 2006 pour Les Bienveillantes, estime qu’il faudra «du temps et du recul» pour expliquer le succès fulgurant de son livre, dans un entretien au Monde daté de vendredi. Littell, qui n’accorde les interviews qu’au compte-gouttes, affirme avoir «beaucoup discuté des raisons du succès, sans trouver de réponses», notamment avec l’académicien Pierre Nora du comité de lecture de Gallimard. «Deux grandes hypothèses se dégagent. La première tient au nazisme et au rapport que les Français entretiennent avec cette période de l’histoire. La deuxième relève davantage de la littérature. Gallimard avait constaté, depuis plusieurs années, une demande pour des gros livres, plus romanesques, très construits», note-t-il dans cet entretien publié dans le Monde des livres. «Il faudra en tout cas du temps et du recul pour expliquer ce succès. Voir, par exemple, comment le livre est reçu en Israël, aux États-Unis et en Allemagne nous permettra de comprendre ce qui s’est passé en France», dit-il. Paru le 21 août, Les Bienveillantes (Gallimard) – un pavé de plus de 900 pages sur les confessions d’un ancien nazi –, s’est vendu à 250000 exemplaires avant même d’obtenir le Goncourt et a atteint depuis les 300000. Jonathan Littell, absent lors de l’attribution du Goncourt, évoque sa réserve par rapport aux prix littéraires, qui «ont naturellement tendance à mettre les livres les uns contre les autres». Il revient sur son rapport à l’écriture et les critiques dont il est l’objet. «On avance par l’écriture et l’on arrive à un endroit où l’on ne pensait jamais se retrouver. C’est pour cela que je suis tout à fait prêt à accepter les critiques qui disent que je me suis trompé avec ce roman, que j’ai fait des choses fausses, inacceptables», déclare-t-il. «Il se peut ici, comme ailleurs, que je me sois planté. C’est un roman», résume-t-il à propos des «erreurs d’interprétation» relevées par des historiens.