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religion Le père Boulad, jésuite égyptien, célèbre « l’heureuse faute » du pape sur l’islam

Recteur des collèges jésuites du Caire, le père Henri Boulad estime le temps venu de « la clarté, de la sortie de l’ambiguïté » avec l’islam « face à la poussée de l’intégrisme musulman ». Ce catholique égyptien, né à Alexandrie en 1931, considère que le propos de Benoît XVI sur l’islam, pour « malheureux et regrettable » qu’il soit, n’était pas « pur hasard » et pourrait inaugurer « un dialogue plus vrai et franc ». « Si faute il y a eu de la part du pape, elle pourrait être heureuse : c’est une felix culpa », dit le père Boulad à l’AFP, en reprenant l’expression de saint Augustin sur le caractère salvateur du péché originel. Dans son modeste bureau du collège de la Sainte-Famille, dans le quartier de Fagallah, creuset de l’élite cairote depuis plus d’un siècle, il estime aujourd’hui que « nous ne sommes qu’au commencement de l’épreuve ». Pour lui, l’islamisme « reflète l’essence même d’un islam figé, comme un poussin dans un œuf. C’est un type de totalitarisme de la pensée ». Le souverain pontife, citant un empereur byzantin du XIVe siècle, avait, dans un discours le 12 septembre, évoqué un lien entre islam et violence, et soulevé le problème du rapport entre foi musulmane et raison. « Il n’avait pas besoin de cette référence, mais elle reflète bien sa volonté de clarifier ce qui sépare l’islam et le christianisme sur ces questions fondamentales », a dit le père Boulad. Benoît XVI, enchaîne-t-il, « connaît assez bien » la théologie musulmane « pour dire que l’islam est indissociable de la politique et d’un projet global de société ». Quant aux réactions virulentes dans les pays musulmans, le père Boulad les estime « compréhensibles bien que souvent irraisonnées et parfois violentes ». « Le propos du pape obligera chacun à sortir ce qu’il a sur le cœur, sans faux-semblants », dit-il. Et ainsi, affirme-t-il, « quand on dit que l’islam est une religion de tolérance, j’en attends les preuves, et constate surtout que dans les 57 pays à majorité musulmane, il n’y a pas de liberté religieuse ». Un musulman ne peut pas devenir librement chrétien en Égypte, pays de 72 millions d’habitants, où la minorité chrétienne est de 10 %, (6 millions de coptes-orthodoxes, 200 000 catholiques et 200 000 protestants). « Si c’est le cas, l’alternative est la clandestinité totale ou l’exil, alors qu’un chrétien qui épouse une musulmane est forcé de se convertir à l’islam », souligne-t-il. « Cela le pape le sait : il est très lucide, et sans illusions sur la réciprocité religieuse, ou plutôt son absence », affirme ce catholique égyptien, ancien vice-président de l’organisation Caritas dans le monde arabe. Pour le père Boulad, le « courant massif est celui de l’islamisation de la société ». « On voile les filles de plus en plus jeunes, et la poussée de l’intégrisme se poursuit, avec une radicalisation des esprits », dit-il, notant que la charia, la loi islamique, est considérée source de la loi dans la Constitution. Il y a, dit-il, une « schizophrénie musulmane » à l’égard de la femme, « objet de convoitise et d’interdit ». « La sexualité est un problème central », pense ce prêtre qui a étudié au Liban, en France et aux États-Unis. En Égypte, estime ce spécialiste de Teilhard de Chardin, « on retrouve chez les musulmans, comme chez les chrétiens (coptes-orthodoxes), une absence de pensée de critique, et l’attirance pour le fondamentalisme ». Le père Boulad ne se dit toutefois pas sans espoir. « L’islam est-il réformable ? C’est toute la question, et je souhaite de tout cœur qu’il s’adapte à une époque pluraliste dans des États où le temporel et le spirituel sont séparés. » « Aujourd’hui, d’après lui, le monde arabe s’est emparé du modernisme, c’est-à-dire l’écorce de la modernité, avec ses techniques et produits, mais il ne pourra indéfiniment résister à la modernité, qui passe par la pensée critique. »
Recteur des collèges jésuites du Caire, le père Henri Boulad estime le temps venu de « la clarté, de la sortie de l’ambiguïté » avec l’islam « face à la poussée de l’intégrisme musulman ».
Ce catholique égyptien, né à Alexandrie en 1931, considère que le propos de Benoît XVI sur l’islam, pour « malheureux et regrettable » qu’il soit, n’était pas « pur hasard »...