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Actualités - REPORTAGE

Reportage Désabusés, des chiites irakiens trouvent refuge dans des orangeraies

Dans un décor d’orangers, de dattiers et de champs de tournesol resplendissants, quelque 150 Irakiens chiites, fuyant les violences quotidiennes de leur région, ont trouvé refuge dans une école délabrée de Jdaïdet al-Aghawat au nord de Bagdad. « Ils l’ont égorgé comme un mouton », affirme Haïdar Abdel Salam, 25 ans, en racontant comment un « ami » a été tué devant ses yeux simplement parce qu’il était chiite. Haïdar et les huit membres de sa famille ont alors décidé de fuir leur maison, dans le quartier Qatoun de Baaqouba, la capitale de la province de Diyala, au nord de Bagdad, pour se rendre dans les orangeraies de Jdaïdet al-Aghawat, également au nord de Bagdad, où vivent majoritairement des chiites. Traversée à la fois par le Tigre et le Diyala, la région verdoyante de Diyala contraste avec l’aridité du reste de l’Irak. Mais la beauté de cette région contraste surtout avec l’horreur quotidienne qu’on y vit désormais. Surnommée « Mini-Irak » en raison des mélanges ethniques et religieux qu’on y trouve, cette région de 1,3 million d’habitants est secouée par des violences quotidiennes. Rien qu’en juillet, un attentat à la bombe a tué 24 personnes, dont une majorité d’enfants à Khairnabat, et 27 chauffeurs de bus, en majorité chiites, ont été enlevés et certains tués. « Ils ont tué mon voisin. Ils ont tué trop de gens », accuse Abdel Khalek, 31 ans, le frère de Haïdar. Ces réfugiés racontent qu’ils ont reçu des menaces de mort, que leurs maisons ont été attaquées. Ils n’avaient pas le choix et ont donc fui. Ils campent désormais sur des matelas de mousse, sans eau ni électricité, se lavant à l’eau boueuse du canal à proximité. Privés de tout revenu, ils vivent désormais de l’aumône des villageois. « Je n’arrive pas à croire ce qui nous arrive. Nous sommes maudits ! », crie Ismaïl Khalil, 27 ans, en brandissant le poing tandis que des larmes roulent sur son visage. Khalès, la deuxième plus grande ville de la région derrière Baaqouba, a également été le théâtre de plusieurs attentats ces deux dernières années. Les entrées du marché sont barricadées et les habitants, à majorité chiite, se sentent comme en état de siège. Sur les murs, des bannières de funérailles : « Tué dans un attentat criminel et lâche. » « La normalité que nous vivons est un mensonge. Nous sommes pris au piège », estime Mohammad Khalil. Cet étudiant de 22 ans ne connaît pas le résultat de ses examens universitaires. Il ne peut se rendre à la faculté par peur d’être tué ou kidnappé. Mais la terreur ne frappe pas que les chiites. Les habitants sunnites de la région ne s’aventurent plus non plus sur l’autoroute Baaqouba-Bagdad par peur des milices chiites. Ainsi, une députée sunnite de la région, Tayseer al-Machhadani a-t-elle été kidnappée par des miliciens le 1er juillet alors qu’elle revenait de la capitale. « À Bagdad, on raconte que tous les sunnites de Diyala sont des tueurs de chiites », assure Daham Hussein, 25 ans, un soldat sunnite. Certains tentent toutefois d’apaiser les tensions entre les communautés. Comme le cheikh sunnite Ali al-Jumaili de la ville de Al-Kubat : « Quatre chiites de mon village ont été menacés. Mais je ne le permets pas, c’est une bêtise. Mes deux femmes sont chiites », affirme-t-il. Le colonel irakien Hamid Mahdi résume la situation : « Ce n’est pas de l’occupation américaine dont nous devons nous soucier, mais du terrorisme arabe. Nos voisins veulent faire dérailler la démocratie irakienne à tout prix. » 150 000 irakiens ont été forcés de se déplacer en raison du conflit, selon un rapport de l’ONU publié mardi. Sam Dagher/AFP

Dans un décor d’orangers, de dattiers et de champs de tournesol resplendissants, quelque 150 Irakiens chiites, fuyant les violences quotidiennes de leur région, ont trouvé refuge dans une école délabrée de Jdaïdet al-Aghawat au nord de Bagdad.
« Ils l’ont égorgé comme un mouton », affirme Haïdar Abdel Salam, 25 ans, en racontant comment un « ami » a été tué...