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Actualités - CHRONOLOGIE

ENTRETIEN - Le ministre invite les banques à « rogner sur leur rentabilité » Sami Haddad : « Les 2/3 des impôts vont au service de la dette »

Depuis la prise de fonctions du gouvernement actuel, soit depuis neuf mois et demi, la masse de la dette s’est accrue de 2 milliards de dollars et le service de la dette de 200 millions de dollars. À l’heure actuelle, les deux tiers des impôts vont au remboursement des intérêts de la dette. Chaque matin, les intérêts comptabilisés sur la dette sont de l’ordre de 10 millions de dollars. De tels chiffres ne peuvent laisser indifférent un économiste-technicien de la trempe de Sami Haddad, ministre de l’Économie et du Commerce. Dans un entretien à bâtons rompus à «L’Orient-Le Jour», Sami Haddad livre entre autres détails certaines des réactions du board du FMI lors de l’entretien avec la délégation libanaise qui accompagnait le Premier ministre Fouad Siniora en visite officielle à Washington. Le FMI se serait interrogé sur la contribution des agents libanais au processus de restructuration des finances publiques, notamment les établissements bancaires, levier de l’économie libanaise. Les désaccords d’ordre politique retardent le coup d’envoi des réformes. Les politiques s’indignent que rien ne bouge et redoutent tout ce qui change. Étrange paradoxe. Le ministre de l’Économie et du Commerce s’explique : le diagnostic du mal libanais est établi depuis fort longtemps. Les remèdes aussi. Les solutions ont été évoquées lors de la conférence Paris II, dans la loi de finances présentée par Fouad Siniora en 2004 et par le FMI dans son article 4 relatif au Liban. Le programme de réformes de l’actuel gouvernement n’apporte rien de nouveau et surtout ne prétend pas renfermer une formule magique. Le programme a obtenu l’aval d’organismes économiques mondiaux tels la Banque mondiale et le FMI. Ce dernier est disposé à apporter sa contribution à la conférence de Beyrouth 1 alors qu’il s’était abstenu de le faire lors de Paris II. Mais son financement est conditionné. Et ce sont ces conditions-là qui font l’objet d’une polémique entre les différentes parties prenantes à la vie politique libanaise. « Un apport du FMI encouragerait les autres participants à Beyrouth 1 à accroître leur contribution au Liban », assure Sami Haddad, qui fait état d’une disposition tous azimuts des pays arabes notamment du Koweït de venir en aide au Liban. « Les Libanais n’ont qu’à tendre la main pour recevoir ce qu’ils désirent », dit-il, n’hésitant pas à user de métaphores pour souligner la bonne volonté de la communauté internationale dont il a personnellement identifié les interlocuteurs. Selon lui, les responsables libanais étaient conscients de l’importance d’une coopération avec le FMI bien avant la déclaration de l’ambassadeur des États-Unis, Jeffrey Feltman, qui leur avait conseillé une coordination avec le Fonds. Si un pays comme le Brésil gouverné par un président socialiste, Lula da Silva, a été le dernier en date à avoir recours aux aides du FMI, pourquoi le Liban ne ferait-il pas de même ? s’est interrogé l’ancien responsable de la Banque mondiale. L’apport des banques Pour Sami Haddad, le temps presse. Les finances de l’État sont en mauvais état. Et le cercle infernal du service de la dette risque d’engloutir les bonnes et mauvaises âmes. D’après lui, la responsabilité de la gestion de la dette incombe a priori aux ministres détenteurs de portefeuilles à caractère économique. Ils ont le devoir de réagir et de passer en premier à l’action. La libéralisation du prix du pétrole préconisée par la feuille de route du gouvernement ne peut être un mauvais pas. Les recettes fiscales sur base du prix du pétrole fixé par l’État s’élevaient à 800 milliards de livres. Aujourd’hui, avec la flambée des prix du brut, ces recettes ne représentent plus que 200 milliards de livres, soit un manque à gagner pour le Trésor de 600 millions de dollars. Dans le même prolongement, il estime que le relèvement de la TVA préconisé dans le plan de réformes du gouvernement n’affecte pas outre mesure les couches sociales les plus démunies. Les produits de première nécessité sont exemptés de cette taxe, rappelle-t-il. Quant aux banques libanaises, Sami Haddad, faisant référence au FMI, souligne l’importance de leur contribution aux efforts de restructuration de la dette publique. « L’État est leur plus gros client et leur bonne santé en est tributaire », relève-t-il. Le ministre de l’Économie souligne que le système libanais, les banques en l’occurrence, sont détenteurs de la majeure partie de la dette publique. « Le fait de rogner sur leur rentabilité sur une durée d’un ou deux ans contibuerait à faire sortir l’État du cercle vicieux du service de la dette », souligne-t-il, ajoutant que « le problème de la dette est un problème qui ne saurait être résolu sans un effort de la part de toutes les composantes économiques de la société ». Sami Haddad estime que la relation qui existe entre l’État et les banques est malsaine dans la mesure où les établissements de crédit ne peuvent indéfiniment continuer à financer la dette publique. Affirmant que le Liban n’est pas encore à un point de non-retour et que tout peut-être rattrapé, il rappelle que le nombre de permis de construction délivrés au cours du premier trimestre de l’année en cours est un chiffre record, alors que les revenus de l’État provenant de la TVA sont supérieurs à ceux enregistrés au cours des trois premiers mois de 2005 et de 2004. Liliane MOKBEL
Depuis la prise de fonctions du gouvernement actuel, soit depuis neuf mois et demi, la masse de la dette s’est accrue de 2 milliards de dollars et le service de la dette de 200 millions de dollars. À l’heure actuelle, les deux tiers des impôts vont au remboursement des intérêts de la dette. Chaque matin, les intérêts comptabilisés sur la dette sont de l’ordre de 10 millions de...