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Actualités - CHRONOLOGIE

EXPOSITION - Une salle a été dédiée à l’artiste au théâtre al-Madina Rétrospective sur la vie de Noha el-Radi, militante et écologiste

Elle aimait la lecture, le jardinage, les voyages, le monde, elle était païenne et elle aimait les volcans. Noha el-Radi vivait en exil au Liban depuis 1995. L’artiste irakienne nous a quittés en août 2004. Aujourd’hui, le théâtre al-Madina lui consacre une exposition, sorte de rétrospective d’une vie, pour marquer l’inauguration de la salle qui portera désormais son nom. «Il ne s’agit effectivement et malheureusement pas d’une rétrospective de ses œuvres et notamment de ses céramiques, car ces dernières sont éparpillées un peu partout dans le monde et surtout en Irak», indique Amal Traboulsi, propriétaire de la galerie Épreuve d’artiste et curatrice de l’exposition. «Peintre, sculptrice, céramiste et écrivain, Noha al-Radi, née à Bagdad en 1941, ne manquait jamais de moyen d’expression, signale Saleh Barakat, propriétaire de la galerie Agial et ami de l’artiste. Lorsqu’elle ne pouvait avoir accès aux matériaux conventionnels, elle utilisait n’importe quelle bricole qui lui tombait sous la main. C’est ainsi que lors du blocus imposé à l’Irak, elle a créé toute une gamme de sculptures intitulées “Embargo Art”». La récupération, c’est tout un art chez elle. «Un morceau de taule rouillée, un fil de fer, des clous, un bout de bois mort... Ses doigts d’artiste faisaient de tous ces petits riens un univers miraculeux, à mi-chemin entre le jouet et la sculpture», écrivait Soha Bsat Boustany en hommage à son amie. Traboulsi ajoute que el-Radi pratiquait ce qu’elle appelle la «peinture message», «qui se veut très importante plastiquement. Lors de nos balades nombreuses au bord de la mer, elle ramassait tout ce qu’elle trouvait. Des morceaux de bois dont elle réalisait des cadres pour ses toiles en trompe-l’œil, des cailloux…» Écologique dans l’âme, Noha el-Radi disait: «La nature morte est en train de devenir réalité si nous n’y prenons garde: on ne trouvera plus les oiseaux que sur les timbres, les arbres et les papillons qu’en peinture, les fleurs seront remplacées par les ordures, la mer aura les quelques poissons qui l’auront échappé belle, et on ne se souviendra de la nature que dans des cadres en bois.» Le critique d’art Joseph Tarrab fait remarquer que «l’approche écologique de l’Irakienne de Beyrouth Noha el-Radi est douce, gentille, mesurée, modeste, féminine… Elle entreprend de commémorer (…) l’olivier, le cèdre, le palmier, le banian, les poissons, dans des cadres en bois empailletés, et les couchers de soleil, la mer, la corniche, Raouché…» «Comme les humains sont menacés de disparition au même titre que les autres espèces, ajoute Tarrab, elle commémore ses connaissances et amis dans des portraits naïfs et appliqués, tout en bricolant des animaux amusants à l’aide d’os de récupération et des personnages drôles avec des pierres trouvées, assemblées et peintes. Le tout avec ce sourire oriental qui frise le Mektoub et le Maalech. Le monde est foutu ou en voie de l’être? Qu’y pouvons-nous?» La guerre, l’exil, l’identité. Des thèmes qui lui tenaient également à cœur. L’exposition à al-Madina en témoigne. Il y a là des toiles de différentes dimensions, dont une fresque commandée par May Joumblatt, illustrant la dynastie Joumblatt à Beiteddine. Mais aussi, des papillons, des cages d’oiseaux, des matelas, des morceaux de bois, des galets, des écrits... El-Radi a réalisé des décors de théâtre pour Nidal el-Achkar, son amie de toujours. Cette dernière se souvient qu’elle lui a demandé un jour son avis sur une couleur: le mauve. «Elle m’a répondu: Ajoute-y du doré.» Elle qui a suivi son ambassadeur de père en Inde et en Iran, qui a fait des études à Londres au Byam Shaw School of Art au début des années 60, enseigné à l’AUB de 1971 à 1975, et dont les œuvres picturales ont été exposées à Londres, Berlin et Washington, fine observatrice, elle brosse des portraits de gens de son entourage. Une femme libre, qui ne mâchait pas ses mots dans Baghdad Diaries, un journal-témoignage où l’auteur publiait tout fort ce que ses compatriotes n’osent pas ou n’ont pas l’opportunité de dire. Sans prendre un ton ouvertement accusateur, elle y expose les faits et exprime tour à tour son étonnement, son incompréhension et sa révolte. Des moments d’intensité dramatique mais aussi une bonne dose d’humour noir et d’autodérision. M.G.H.
Elle aimait la lecture, le jardinage, les voyages, le monde, elle était païenne et elle aimait les volcans. Noha el-Radi vivait en exil au Liban depuis 1995. L’artiste irakienne nous a quittés en août 2004. Aujourd’hui, le théâtre al-Madina lui consacre une exposition, sorte de rétrospective d’une vie, pour marquer l’inauguration de la salle qui portera désormais son...