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Actualités - OPINION

COMMENTAIRE En Chine, la liberté de la presse vit des heures difficiles

Internet censuré, publications fermées, rédactions reprises en main, journalistes emprisonnés : la liberté de la presse est malmenée par Pékin où le pouvoir politique est obsédé par la stabilité. Illustration de cette paranoïa, les sujets sur Google traités par CNN avaient droit à un écran noir hier en Chine, alors même que la chaîne américaine n’y est captée que par quelques privilégiés. La veille, Google avait annoncé le lancement d’une version chinoise censurée de son moteur de recherche. Une logique commerciale dans un marché de 111 millions d’internautes mais qui empêche les Chinois d’accéder à des sites interdits par les autorités. La censure… censurée La plupart des Chinois n’auront cependant même pas vent des concessions faites au Parti communiste chinois (PCC) par le géant américain de l’Internet, la presse ayant dû censurer une information sur... la censure. Ceux qui étaient au courant hier, les journalistes par exemple, préféraient ne pas s’attarder à commenter. « Ce n’est pas étonnant et puis cela cadre bien avec l’ambiance », soupirait un rédacteur dans un quotidien pékinois. Car l’heure n’est pas à la fête dans les rédactions d’un pays qui se targue de posséder des milliers de quotidiens et magazines et des centaines de chaînes de télévision, même s’il est vrai que le ton de la presse tranche aujourd’hui avec le brouet propagandiste qui alimentait l’ensemble des médias il n’y a pas si longtemps encore. L’ouverture économique du pays depuis 25 ans, flanquée de nouvelles libertés individuelles, a progressivement donné naissance à une presse commerciale qui, sous l’impulsion de vieux journalistes résistants et de jeunes disciples motivés, tente d’informer. « Il y a une pratique structurelle dans les médias chinois qui consiste à tester les limites qu’on leur impose », explique Gilles Guiheux, directeur du Centre d’études français sur la Chine contemporaine (CEFC) basé à Hong Kong. Si, en haut lieu, certains des dirigeants les plus réformateurs voient parfois d’un bon œil le regard neuf de certains médias sur la société et ses dérives, donc sur la politique, la ligne dominante place toujours la propagande avant l’information. Et de la propagande à la répression, il n’y a qu’un pas vite franchi par un parti aux commandes depuis 57 ans. « Cela manifeste un sentiment d’insécurité du pouvoir », estime Gilles Guiheux. Les mises au pas se multiplient Depuis fin 2004, les mises au pas de la presse se sont multipliées. Cette semaine, les censeurs du PCC ont fait fermer le supplément hebdomadaire du Quotidien de la Jeunesse de Chine, connu pour ses articles posés mais dérangeants et son décryptage de l’histoire moins orthodoxe que celui du parti. Quelques semaines plus tôt, le Xinjing Bao (Les Nouvelles de Pékin), dont la couverture des informations sociales est jugée trop audacieuse par le gouvernement, a vu trois de ses responsables éditoriaux limogés. Plus grave, le PCC n’hésite pas à emprisonner les journalistes qu’il considère comme dangereux. Deux d’entre eux ont ainsi été condamnés la semaine dernière à des peines allant jusqu’à dix ans de prison, officiellement pour avoir édité leur magazine sans autorisation, officieusement, en raison d’articles consacrés aux conflits liés à des saisies de terres, l’une des principales causes des émeutes populaires en Chine actuellement. Pris en tenailles entre la nécessité de poursuivre l’ouverture du pays, à une époque où l’information est mondiale, et sa survie politique, le PCC choisit la ligne dure. Plus dure ces derniers temps au fur et à mesure que la grogne sociale gagne, semble-t-il, du terrain. « L’espace des possibles pour la presse se resserre », affirme le directeur du CEFC. Philippe MASSONNET (AFP)

Internet censuré, publications fermées, rédactions reprises en main, journalistes emprisonnés : la liberté de la presse est malmenée par Pékin où le pouvoir politique est obsédé par la stabilité.
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