Combien d’hommes peuvent concentrer autant de malheurs en une seule existence ? La vie de Ghassan Tuéni ressemble à une tragédie grecque. Mais c’est sans doute le propre des grands hommes que de connaître les pires douleurs sur terre, comme s’ils devaient payer d’une façon ou d’une autre les honneurs qu’ils ont engrangés. En ce jour triste, si triste, c’est vers cet homme qui a été – qui est toujours – un modèle et qui a inspiré des générations de journalistes, que vont les pensées des Libanais. Vieux comme un patriarche, presque plié en deux par la douleur, il reste immense, aussi grand dans l’épreuve qu’il a pu l’être dans les jours fastes. On aurait pu le croire écrasé par la perte, brisé, détruit, il est encore plus impressionnant qu’avant, dans sa détermination, son courage et son refus de se complaire dans les lamentations. Chaque nouveau drame lui donne un peu plus de force et une plus grande conscience de son rôle qui dépasse les frontières d’un pays. Les hommes ont une vie, Ghassan Tuéni, lui, a un destin. Scarlett HADDAD