Actualités - OPINION
LE POINT Guerre de tranchées
Par MERVILLE Christian, le 17 novembre 2005 à 00h00
« Les dirigeants du Likoud paniquent. » « Avec Amir Peretz aux commandes, le Parti travailliste va certainement se transformer en un minisyndicat de brutes. » Les chaises n’ont pas encore commencé à voler, mais cela ne saurait tarder. Dans cette perpétuelle foire d’empoigne qu’est l’arène israélienne, on ne répugne jamais à la dramatisation, surtout au lendemain de ce séisme qu’aura constitué l’inattendue propulsion du patron de l’Histadrout à la tête de la deuxième formation politique du pays, avec tout ce que cela implique de bouleversements à venir. Et d’abord, ces élections anticipées dont personne au départ ne voulait mais qui n’en paraissent pas moins inéluctables, déjà marquées, avant même que la date n’en soit fixée par un ton de défi qui n’augure rien de bon. À Tunis où il participe au Sommet mondial sur la société de l’information, Sylvan Shalom a donné le ton dès hier : ils veulent une consultation populaire, a-t-il fulminé, eh bien soit, et le mois de mars est le bon mois. Auparavant, il faudra à chacun une bonne dose de patience et de ténacité pour déblayer la voie devant lui.
Ainsi du successeur de l’infortuné Shimon Peres. En effet, à part Benyamin Ben Eliezer, tous les ténors du parti critiquent la manière dont ont été amorcées les manœuvres censées aboutir au retrait des huit ministres travaillistes, dont les lettres de démission ont d’ores et déjà été remises au nouveau boss. Les vieux grognards jugent pour leur part qu’on aurait pu adopter un ton plus modéré, plus respectueux des usages, en un mot en prenant plus de temps. À quoi le principal intéressé fait répondre par l’un de ses infidèles lieutenants : « Puisque nous sommes d’accord sur la nécessité de claquer la porte, quelle différence cela ferait-il d’attendre une ou deux semaines supplémentaires ? » Pour en arriver là, la Constitution prévoit un vote par la Knesset sur son autodissolution, suivi d’un examen du texte par la commission des lois et enfin trois nouveaux votes successifs. Depuis le début de la semaine, des tractations sont en cours pour constituer un noyau d’inconditionnels autour de Peretz, comprenant Eithan Cabel, Ephraïm Sneh, Youli Tamir et bien entendu Ben Eliezer. Le slogan du groupe : maintenant que le retrait de Gaza est achevé, il n’y a plus de raison de continuer à apporter notre caution à ce cabinet.
Le Premier ministre, lui, fait courir le bruit qu’il pourrait fort bien prendre la tête d’un nouveau groupement, déjà baptisé « Ein li eretz aheret » (Je n’ai pas d’autre terre), titre d’une ballade d’Ehoud Manor, un chanteur très populaire dans le pays. Jugement d’un politologue local : « Il s’agit d’un ballon d’essai. » Et d’expliquer que la tactique a déjà réussi par le passé et que la menace est propre à effrayer tous les « likoudnik » qui ne voudraient pour rien au monde perdre les privilèges (postes officiels, fonds gouvernementaux, etc.) dont ils jouissent. En réalité, « Arik » est bien moins faible que ses adversaires veulent le laisser croire, malgré les problèmes que lui posent ses fils – hier Gilad, aujourd’hui Omri. Dans un domaine aussi nauséabond, tout le monde ou presque paraît logé à la même enseigne, et la « probité candide » n’est pas toujours le propre de ceux qui, en politique surtout et en Israël comme partout ailleurs, aiment à se draper de lin blanc. En attendant un décantage de la situation, plutôt aléatoire dans un très proche avenir, le Premier ministre espère gagner du temps. En accord avec le chef de sa coalition, Gideon Sa’ar, il a décidé dimanche de reporter le vote sur le projet de budget 2006, en attendant l’élaboration d’un plan de lutte contre la pauvreté, a-t-il fait valoir ; en réalité dans l’espoir de mettre sur pied une nouvelle majorité dont seraient exclus les travaillistes, ce qui lui sera d’autant plus difficile que le temps ne travaille pas pour lui. Qu’à cela ne tienne : ses lieutenants battent déjà la campagne avec pour double objectif la mise en échec de la guérilla travailliste et des manœuvres de Benjamin Netanyahu visant à lui permettre de supplanter son rival. Le chef de la diplomatie rappelle à cet égard la nécessité de présenter un front uni lors de la consultation populaire à venir. « Chaque fois que nous avons affronté le verdict des urnes en rangs dispersés, nous avons perdu la bataille », a-t-il martelé hier.
Au fait, les sondages d’opinion, que disent-ils ? Les projections donnent aux travaillistes un gain de cinq mandats (27 députés contre 22 actuellement), car ils mordraient sur la droite classique, laquelle perdrait trois sièges (37 contre 40), le grand vaincu devant être le Shinoui, qui ne serait plus crédité que de neuf députés, contre quinze aujourd’hui. Fort bien, mais les instituts spécialisés s’étaient lourdement trompés, la semaine dernière, en donnant Peres grand vainqueur face à son adversaire. C’est pourquoi chaque camp revoit ses calculs en prévoyant une éventuelle fuite en avant dont feraient les frais… devinez qui.
Christian MERVILLE
« Les dirigeants du Likoud paniquent. » « Avec Amir Peretz aux commandes, le Parti travailliste va certainement se transformer en un minisyndicat de brutes. » Les chaises n’ont pas encore commencé à voler, mais cela ne saurait tarder. Dans cette perpétuelle foire d’empoigne qu’est l’arène israélienne, on ne répugne jamais à la dramatisation, surtout au lendemain de ce séisme...
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