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Aoun : « Une erreur commise à Taëf nous a valu les assassinats de Moawad et Hariri, l’incarcération de Geagea et mon exil »

Un débat avant l’heure, mais qui prouve déjà l’impérieuse nécessité pour tous les Libanais de se mettre autour d’une table et de dialoguer franchement, en toute sincérité et en toute liberté, une fois que les Syriens auront définitivement quitté le pays et que la crise politique actuelle aura été surmontée. Telle est l’impression principale qui se dégage de l’émission organisée hier par la Future TV avec le député Boutros Harb sur l’accord de Taëf. L’émission a surtout mis en évidence deux points essentiels : le consensus interlibanais sur les réformes internes conclues à Taëf, et la volonté évidente de Damas de ne pas appliquer l’accord pour des raisons hégémoniques. « Pour justifier leur présence au Liban, les Syriens ont interprété Taëf comme ils le voulaient », a affirmé M. Harb qui était l’un des députés présents à Taëf. Il a ensuite dénoncé les dérives policières et totalitaires dans l’application de l’accord en raison de la présence syrienne. « La mafia libano-syrienne a étendu ses tentacules sur l’ensemble du pays qu’elle a pillé, créant des antagonismes entre les deux peuples libanais et syrien », a-t-il poursuivi. Abordant ensuite la clause de Taëf sur le retrait syrien, il a précisé qu’elle était actuellement « en cours d’application », et que l’opposition plurielle ne la considérerait comme réellement appliquée que lorsque le retrait total des services de renseignements syriens et des forces syriennes sera terminé et que les ingérences syriennes cesseront. M. Harb a plaidé en faveur d’une « relecture de Taëf de A à Z, parce que l’accord a été dénaturé et appliqué sélectivement », estimant qu’il n’y avait, au plan libanais, « aucun conflit sur le contenu de Taëf, mais une intention (syrienne) manifeste de ne pas appliquer le document ». Joint par téléphone, l’ancien Premier ministre Michel Aoun a estimé à son tour qu’une « erreur » fondamentale avait été commise à Taëf : les députés n’ont pas obtenu de programmation explicite et claire du retrait syrien, et par conséquent aucune garantie de l’application de la clause relative à ce retrait. « Cette erreur de Taëf nous a coûté quatre crimes : le président René Moawad a été assassiné, j’ai été exilé, Samir Geagea est entré en prison, et Rafic Hariri a été assassiné », a-t-il souligné, résumant ainsi quinze ans de présence syrienne. Le général Aoun a donné lecture à l’antenne de la lettre qu’il avait adressée à l’époque au président français François Mitterrand, dans laquelle il avait affirmé soutenir les réformes constitutionnelles, en exprimant cependant des craintes quant aux mécanismes prévoyant le retrait syrien et quant à l’intention réelle de Damas de se retirer du pays. Michel Aoun a souligné, dans le même esprit, qu’il reconnaît la Constitution et qu’il est pour l’application de toutes les autres clauses de Taëf. Prenant la parole à l’issue de l’intervention du général Aoun, Boutros Harb a indiqué : « Nous avons peut-être commis une erreur à son égard ». Il a toutefois expliqué que les députés avaient obtenu des garanties arabes et internationales à l’époque, selon lesquelles les Syriens se retireraient du Liban. « Notre erreur a été de croire en la communauté internationale comme garantie d’application de Taëf », a-t-il indiqué, rappelant le contexte politique de l’époque, à savoir l’alliance américano-syrienne dans le cadre de la guerre de libération du Koweït, occupé par l’Irak de Saddam Hussein.

Un débat avant l’heure, mais qui prouve déjà l’impérieuse nécessité pour tous les Libanais de se mettre autour d’une table et de dialoguer franchement, en toute sincérité et en toute liberté, une fois que les Syriens auront définitivement quitté le pays et que la crise politique actuelle aura été surmontée. Telle est l’impression principale qui se dégage de l’émission...