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Actualités

Sur les Campus Le papillon estudiantin

Il y a un sentiment omniprésent chez les étudiants en troisième cycle ou récemment diplômés et qui ont autrefois été militants sur les campus... Le sentiment d’avoir vu tout un cycle se terminer, toute une époque désormais révolue. Le constat n’est pas exprimé avec emphase, ou sur un ton tragique. Il est plutôt le fruit d’un profond sentiment d’amertume, un cumul entre la nostalgie à l’état pur et la vision d’une scène estudiantine actuellement en plein désarroi, en perte de vitesse, abandonnée à ses démons: le désengagement, la lassitude, l’émigration, le service militaire et, aussi, parfois, les solutions de facilité. De l’aveu même des responsables concernés, le désintérêt des étudiants va croissant, d’année en année. La mobilisation a cédé la place à la démobilisation. S’il est encore une scène estudiantine active, ce n’est plus que grâce à une poignée d’insoumis, d’indociles, qui refusent contre vents et marées de limiter leur cursus universitaire au simple parcours académique. Ce qui a d’ailleurs quasiment toujours été le cas. Sauf que les années précédentes, la majorité silencieuse était moins nombreuse et savait s’exprimer quand il le fallait. Explications: le mouvement estudiantin d’après-guerre, s’il en est un seul, est né à la fin des années 1990. À l’Est politique, l’élément catalyseur a été le respect des libertés publiques et la dénonciation de la tutelle syrienne sur le Liban. C’est ainsi que la première manifestation d’après-guerre s’est déroulée devant la chaîne de télévision MTV à la suite de l’interdiction par les autorités de la diffusion d’un entretien avec le général Michel Aoun. Le mouvement de contestation avait contaminé l’Université Saint-Joseph, puis quelques autres universités, et devait être le début d’une longue série de manifestations articulées autour de deux thèmes principaux: « libertés » et « souveraineté ». À l’Ouest, la priorité a été donnée, durant le même cycle, au rejet de l’occupation israélienne du Liban-Sud et à la complicité entre Américains et Israéliens. Le point fort de ce cycle d’actions a été la célèbre manifestation d’Arnoun, en 1999, durant laquelle les militants anti-israéliens avaient arraché de leurs mains nues les barbelés installés par les forces israéliennes. Une certaine gauche a également protesté, par certains moments, contre les violations par les États-Unis du droit international et de la souveraineté de nombre de pays, tout particulièrement la Serbie de l’ère Milosevic. Deux mouvements estudiantins – au moins – se sont développés entre 1995 et l’an 2000, ne se rencontrant que très brièvement et sur certains sujets très ponctuels, ayant généralement trait à la défense des libertés publiques. Les résultats se faisaient sentir sur la scène universitaire: un vent nouveau semblait souffler sur les campus, toutes orientations confondues. Les manifestations se multipliaient, les unes après les autres. À Fanar, pour protester contre la présence des barrages syriens, ou à Awkar, devant l’ambassade des États-Unis, pour hurler son ressentiment contre la politique de l’Oncle Sam. Mais, le vent semble avoir progressivement tourné dans les deux premières années de ce début de XXIe siècle, avec de nouvelles hantises et préoccupations. En mai 2000, les Israéliens se sont retirés des territoires occupés du Liban-Sud, ne laissant plus derrière eux que la zone controversée des hameaux de Chébaa. Depuis, la mobilisation estudiantine à l’Ouest s’est polarisée sur la question palestinienne. Entre août 2001 et septembre 2002, les étudiants de l’Est ont perdu une grande partie de leur dynamisme et de leurs atouts. Après le pic de la réconciliation de la Montagne, il y a eu les rafles d’août 2001 et le tabassage du Palais de justice. La série noire a été enrayée par la victoire de Gabriel Murr au Metn, notamment grâce aux jeunes. Victoire de courte durée: il y a eu ensuite la fermeture de la MTV, la destitution de Gabriel Murr, la débandade de l’opposition plurielle, incapable d’organiser une manifestation, et puis le «blackout» total. Aux principes de résistance culturelle prônés par le père Sélim Abou est venue se superposer une paresse inexistentielle, un désengagement progressif des étudiants. Faillite des partis, trop-plein de slogans et trop peu d’actes pratiques, lutte interestudiantine, désespoir grandissant et perte de confiance, crise socio-économique galopante, comportement trop traditionnel au niveau du choix des représentants, manque de génie, d’originalité, de renouveau dans l’action? Plusieurs raisons pourraient être invoquées pour expliquer cet état de pseudostatisme qui a gagné la scène estudiantine. Mais le constat est là, affligeant: la motivation se retrécit comme une peau de chagrin. Il est vrai, cependant, que pour voler de ses ailes, le papillon a besoin de s’enfermer durant un moment dans sa chrysalide, de se préparer à sa mutation. Il reste qu’il ne tient qu’aux jeunes de changer les choses, de s’adapter, si besoin est, à l’air du temps qui passe. Si jamais ils le veulent. Michel HAJJI GEORGIOU Les étudiants qui souhaitent s’exprimer sur les problèmes estudiantins doivent adresser leurs commentaires par fax (01/360390) ou par mail: redaction@lorientlejour.com
Il y a un sentiment omniprésent chez les étudiants en troisième cycle ou récemment diplômés et qui ont autrefois été militants sur les campus... Le sentiment d’avoir vu tout un cycle se terminer, toute une époque désormais révolue. Le constat n’est pas exprimé avec emphase, ou sur un ton tragique. Il est plutôt le fruit d’un profond sentiment d’amertume, un cumul...