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Actualités - CHRONOLOGIE

Vie universitaire - Le nouveau recteur de l’USJ axe son premier discours sur la dimension citoyenne du rôle du corps professoral L’enseignant doit lutter pour que le Liban redevienne une nation souveraine et indépendante, souligne Chamussy(photos)

L’Université Saint-Joseph a célébré hier, comme chaque année, sa fête patronale au campus des sciences et technologies, à Mar Roukoz, en présence, notamment, de Mme Nayla Moawad, députée de Zghorta, du recteur de l’USJ, le père René Chamussy, du recteur émérite, le père Sélim Abou, des vice-recteurs et du secrétaire général de l’université, des doyens de faculté et directeurs d’institut. La cérémonie a regroupé un millier d’enseignants des différentes institutions de l’USJ à Beyrouth et dans les trois centres régionaux du Liban-Nord (Tripoli), du Liban-Sud (Saïda) et de la Békaa (Zahlé). Ont également assisté à la cérémonie une délégation des étudiants, une délégation du personnel des services généraux et des laboratoires de l’université et les chefs des services administratifs de l’Hôtel-Dieu, le président et les membres de l’association des anciens, ainsi que les membres libanais du conseil stratégique de l’université. La messe solennelle a été concélébrée par le père Chamussy et plusieurs prêtres, enseignants à l’USJ ou aumôniers d’étudiants. Après la messe, les personnes présentes se sont retrouvées dans l’amphithéâtre Jean-Ducruet pour écouter le premier message du nouveau recteur de l’USJ, ayant pour thème : « Les enseignants-chercheurs, acteurs du monde universitaire ». L’allocution a été suivie du traditionnel déjeuner auquel étaient conviés tous les enseignants. Dans son discours, le père Chamussy a mis l’accent sur la dimension citoyenne du rôle de l’enseignant, évoquant, par ailleurs, les rapports entre l’enseignant et l’étudiant. Le recteur a notamment souligné sur ce plan qu’il revient aux enseignants de « tout faire pour que les étudiants comprennent l’importance du service public, quel qu’en soit l’état de délabrement, de même qu’il leur revient à eux-mêmes de s’engager au service de leur pays, de lutter, de travailler, de parler, d’écrire pour que le Liban redevienne ce qu’il devrait être : une nation souveraine, indépendante et qui redécouvre les qualités qui ne peuvent qu’être celles d’un pays libre, fier de sa justice comme des services qu’il se doit d’assurer aux plus pauvres ». Après avoir brièvement rappelé les dimensions essentielles de l’université et évoqué les différents acteurs du monde universitaire (enseignants, étudiants, personnel des services généraux, anciens), le père Chamussy a déclaré : « À lire les différentes définitions de l’enseignant à l’université on ne peut qu’être étonné par la multiplicité des approches. Si l’Unesco insiste avant tout sur la dimension “service public” de la profession d’enseignant à l’université, si les Français envisagent l’affaire sous l’angle des “contrats” qui lient les enseignants à leur pouvoir de tutelle, si les Canadiens pensent d’abord la situation de ces enseignants en fonction de leur appartenance à la “communauté universitaire”, l’USJ, quant à elle, se fait plutôt impérative : être enseignant, c’est adhérer à des valeurs, à une mission, c’est faire siens des objectifs définis en d’autres sphères de pouvoir, c’est respecter des statuts. Je m’en voudrais de critiquer une telle approche qui, après tout, est la nôtre ; il n’empêche que la prise en considération des autres perspectives ne peut qu’être bénéfique. La profession d’enseignant à l’université n’est pas simplement le fruit d’une adhésion à une charte ou un contrat avec une institution, elle est aussi une appartenance à une communauté, un engagement dans un service que nous pouvons qualifier de public, elle est enfin une implication dans un réseau de relations au bénéfice toujours de l’étudiant. » Les volets de la profession d’universitaire Et d’ajouter : « Cela dit, il est important de dire quelques mots sur chacun de ces volets de la profession d’universitaire. 1- La mission d’abord. Il est sûr que parler de “mission” pour un enseignant n’est pas un fait spécifique qui marquerait l’Université Saint-Joseph. Tout universitaire en quelque pays du monde se voit investi d’une mission. Le problème est que, partout ailleurs, les missions de l’enseignant sont précisées par la loi et tendent à se multiplier comme autant de tâches à accomplir, alors qu’à l’USJ, la “mission” de l’enseignant se voit consignée dans une charte qui est plus valorielle que normative, et qui fonctionne autour de concepts majeurs sans lesquels nous ne serions pas ce que nous sommes. Qu’il nous suffise ici d’en évoquer les axes majeurs : la recherche de la qualité et de l’excellence, le souci d’une formation intégrale de la personne, l’ouverture à tous, l’implication en tout domaine au plan national, régional et international, le biculturalisme et le plurilinguisme. » 2- « Cette participation à une telle recherche pourrait en fait sceller l’appartenance des enseignants à l’USJ. Une telle appartenance, nous l’avons dit, est souvent mise en doute. Comme elle l’est d’ailleurs par certains anciens peu portés à se retrouver dans leurs amicales, ou même par des étudiants qui estiment que leur appartenance à l’USJ se réduit à la participation à quelques cours. Les enseignants doivent savoir ce qui se trame en leur université ; ils doivent aussi pouvoir participer à leur mesure aux grandes mutations qui se jouent ; ils doivent enfin être valorisés dans la mesure du possible. Certes, la différenciation inévitable qui intervient entre cadrés et vacataires pose problème, et ce sont ces derniers qui sentent le besoin pressant d’être valorisés. Une saine politique devrait nous conduire à poursuivre notre effort en vue d’augmenter encore le nombre des cadrés – à mi-temps tout au moins en certaines facultés. Il devrait par ailleurs pouvoir être tenu compte du désir de participation de vacataires, de ceux tout particulièrement exerçant dans plusieurs institutions. » 3- « S’il est évident que les enseignants de l’USJ investis d’une mission se doivent de redécouvrir leur appartenance à la communauté universitaire, ils se doivent tout aussi bien – la charte de l’USJ, comme les documents de l’Unesco nous le redisent – de “servir la communauté en tant que citoyens responsables”. Si l’Université se veut un pôle d’excellence, c’est pour le pays, pour la région avant tout autre chose. Aussi bien revient-il aux enseignants de tout faire pour que leurs étudiants comprennent l’importance du service public, quel qu’en soit l’état de délabrement, de même qu’il leur revient à eux-mêmes de s’engager au service de leur pays, de lutter, de travailler, de parler, d’écrire pour que le Liban redevienne ce qu’il devrait être : une nation souveraine, indépendante et qui redécouvre les qualités qui ne peuvent qu’être celles d’un pays libre, fier de sa justice comme des services qu’il se doit d’assurer aux plus pauvres. 4- « Investi d’une mission, impliqué dans une communauté universitaire qui le soutient, engagé dans un travail au service de son pays, l’enseignant se doit enfin de s’intégrer dans les rouages de la machine universitaire pour, avec l’administration, avec les étudiants – et non pas contre eux ni malgré eux – parvenir à construire ce monde auquel ensemble nous travaillons. Cet engagement n’est ni simple ni évident. Il exige en effet que le jeu relationnel qui doit exister entre l’administration et l’enseignant puisse fonctionner harmonieusement, ce qui implique une communication forte, un réel respect des personnes, un souci de collaborer sans faille. Une relation plus vraie avec l’étudiant Et le père Chamussy de poursuivre : « Je ne m’étendrai pas sur le discours universitaire. D’autres en ont parlé mieux que moi ; qu’il nous suffise d’évoquer ce grand psychanalyste qui sut opposer le maître politique qui jouit du pouvoir que lui confère l’idée qu’il a prise sur les choses, au maître universitaire qui jouit du savoir en vertu duquel il s’identifie aux autorités, aux savants, aux grands auteurs. Des deux côtés, on retrouve un dangereux “discours de maîtrise” toujours porté à écraser l’autre, l’étudiant en somme... En fait, il ne fait pas de doute qu’un tel discours puisse évoluer et nous sommes persuadés que les modalités de mise en place d’un nouveau système à l’université ne peuvent que contraindre l’enseignant à modifier son discours, et ce du seul fait que désormais ce qui est au cœur du système, ce n’est plus le pouvoir que donne le savoir, mais c’est l’étudiant qui peine avec l’enseignant pour acquérir ce savoir. Et c’est alors que ressurgit ici le problème de la relation enseignant-étudiant. » « L’enseignant de l’université est, paraît-il, mal à l’aise. Pourtant investi d’une mission, il a beaucoup à faire et à dire. Membre d’une communauté universitaire, il peut toujours aller plus avant dans son implication avec ceux qui gèrent facultés et instituts. Voué à être au service d’un pays, il est tenu d’être pour ceux qui l’entourent un point de référence. Tenu de faire son travail d’enseignant, il lui revient d’inventer une nouvelle relation avec les étudiants. C’est dans la mesure où il accepte ce contrat premier qu’il peut imaginer d’entrer dans une carrière qui lui soit propre et de découvrir les autres dimensions de ce métier. » Les dimensions nouvelles de la profession Et le recteur de l’USJ d’ajouter : « L’image qu’une université peut donner d’elle-même tient en vérité à un élément trop souvent occulté dans le monde des universités privées, il s’agit du rapport entre cadrés et vacataires. Les exigences d’encadrement des étudiants sont en effet d’autant plus grandes que l’on tient à la qualité des diplômes attribués. D’où notre souci, à l’université, de repenser ce problème et d’instituer une véritable carrière pour tous ceux qui voudraient ou pourraient se consacrer ou consacrer tout au moins une part de leur temps à l’enseignement à l’université. Un tel objectif est toutefois difficile à réaliser dans la mesure où il pèse inévitablement sur les finances de l’institution. Quoi qu’il en soit, c’est, nous le savons, dans ce sens qu’il nous faut aller, en sachant tout aussi bien qu’une telle ouverture ne peut que nous engager à dire aussi aux enseignants qu’aux droits qu’ils acquièrent sont inévitablement liés des devoirs que l’on ne peut occulter. » « Car si être enseignant, sous quelque forme que ce soit, c’est bien assumer tous les éléments que nous avons déjà énumérés, être enseignant cadré, c’est davantage. Et c’est là que l’on découvre les dimensions nouvelles de cette difficile profession. Encore une fois, le temps du professeur qui entre en salle de cours, s’assied et relit les mêmes documents jaunis par le temps qu’il a toujours lus, à moins qu’il ne se lève pour faire au tableau, à la va-vite, un exercice que l’auditoire ne pourra mettre en question, tout cela n’est plus de mise, nous le savons tous. » « L’enseignant est celui qui, par-delà son travail de communicateur/transmetteur de savoir et d’animateur, met en relation l’étudiant avec l’univers de sa propre profession, a ajouté le père Chamussy. S’il ne peut y avoir d’enseignement sans souci de communication et de pédagogie, il ne peut y avoir d’enseignement à l’université sans volonté d’ouvrir cet enseignement disciplinaire précis sur le champ professionnel sur lequel il se doit de déboucher. Il est sûr qu’une telle dimension du travail d’enseignant ne va pas de soi, parce qu’il est des champs professionnels où l’on redoute la concurrence des plus jeunes, parce qu’il en est d’autres qui se qualifient par la rareté des besoins, parce qu’il en est où l’on redoute le renouveau que pourrait apporter la seule présence des nouveaux venus, mais l’engagement à l’université, c’est l’engagement au service d’étudiants qui doivent pouvoir déboucher sur le monde de l’emploi, et il est manifestement du devoir des responsables, comme des enseignants, comme des anciens de l’université de tout faire pour que cette requête toujours pressante ne soit pas sans trouver de réponse. Dans la vision de l’Université Saint-Joseph pour l’horizon 2007, on a souligné que la formation acquise par l’étudiant devait être un “passeport pour l’emploi”. » Et de poursuivre : « Reste à ouvrir la dernière boîte de Pandore. L’enseignant est aussi par définition un chercheur. Lorsque les autorités françaises tentent de préciser les missions de l’enseignant, elles s’expriment ainsi : “Les enseignants participent à l’élaboration et assurent la transmission des connaissances au titre de la formation initiale et continue. Ils assurent la direction, le conseil et l’orientation des étudiants. Ils organisent leurs enseignements au sein d’équipes pédagogiques et en liaison avec les milieux professionnels. Ils établissent à cet effet une coopération avec les entreprises publiques et privées. Ils concourent à la formation des maîtres et à l’éducation permanente”.» En conclusion, le père Chamussy a souligné que « cette dimension-recherche » ne peut être marginalisée, elle fait partie de la « mission de l’USJ » qui nous invite à « développer la recherche fondamentale et appliquée ».

L’Université Saint-Joseph a célébré hier, comme chaque année, sa fête patronale au campus des sciences et technologies, à Mar Roukoz, en présence, notamment, de Mme Nayla Moawad, députée de Zghorta, du recteur de l’USJ, le père René Chamussy, du recteur émérite, le père Sélim Abou, des vice-recteurs et du secrétaire général de l’université, des doyens de...