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Actualités - CHRONOLOGIE

Environnement - Une ONG écologique dénonce la réapparition des « délais administratifs » Les carrières sévissent illégalement au Liban-Sud et dans la Békaa-Ouest(photos)

Ni l’interdiction qui les a frappés depuis octobre 2002 ni les plans directeurs successifs n’ont jusque-là réussi à empêcher les propriétaires de carrières « protégés » de poursuivre leur travail de défiguration des sites naturels, notamment forestiers. Dans les différentes régions, du Sud au Nord en passant par la Békaa, les habitants se plaignent des explosions qui ont lieu la nuit et du ballet incessant des camions dans les rues étroites des villages. Ces carrières sont en général illégales et exploitées de manière sauvage, sans restriction aucune. Le nouveau ministre de l’Environnement, Wi’am Wahhab, a fait de la fermeture des carrières illégales son principal cheval de bataille. Il reste à espérer qu’il parviendra à résoudre le problème des « protections politiques » qui freinent la résolution de ce dossier, comme il l’a promis. Dans le domaine des carrières, le Liban-Sud et la Békaa-Ouest ne sont pas en reste. L’Association du développement de l’homme et de l’environnement a tenu hier, en collaboration avec d’autres ONG écologiques, une conférence de presse au siège de l’association T.E.R.R.E. à Baabda, pour dénoncer la reprise des travaux dans plusieurs carrières au Liban-Sud et dans la Békaa-Ouest, notamment dans la région de Jabal Rihane (et au bord du Litani), à Jezzine (Aramta, Kfarhouna et Khallet Khazem principalement) et jusqu’au secteur de Marjeyoun. Photos à l’appui, Fadlallah Hassoun, vice-président de l’Association du développement de l’homme et de l’environnement, a expliqué que « plusieurs carrières illégales sévissent dans la région, malgré les ordres de fermeture sous scellés qui ont été donnés à plusieurs reprises ». Des carrières à Aïchiyé et Khallet Khazem, à titre d’exemple, bénéficient apparemment de délais administratifs qui leur permettent de détruire des espaces verts, et il en va de même pour des sites à Rihane, Aramta, Azour et Qatarani. Et ainsi de suite... « Les arbres sont abattus la nuit et leur bois vendu sur le marché, alors que l’extraction de sable ou de pierre, selon les sites, se fait le jour », explique M. Hassoun. Dans certaines usines de taillage de pierre, sous prétexte de travailler des pierres importées, on en extrait secrètement sur des sites locaux, souligne le militant écologique. Dans des villages comme Kfarhouna, où la nature rocheuse est particulièrement belle, les désagréments nés du travail des carrières empêchent les habitants, longtemps maintenus loin de chez eux par l’occupation israélienne, de revenir habiter leur village, selon des témoignages. « Certaines personnes qui ont voulu s’informer sur le déroulement du travail dans les carrières, dont des journalistes, ont été agressés et menacés », poursuit M. Hassoun. Il déclare que les représentants d’ONG écologiques comptent avoir des entretiens avec divers responsables, dont le ministre de l’Environnement, pour essayer d’obtenir la fermeture des sites. « Au pire des cas, nous descendrons dans la rue », souligne-t-il. Dans son communiqué, l’association demande « la fermeture définitive de ces carrières et l’interdiction des délais administratifs et des permis non étudiés ». Par conséquent, l’association appelle à « la mise au point d’un plan directeur pour l’organisation des carrières, dans une perspective de préservation de la santé publique et de l’environnement ». « La pire catastrophe écologique causée par l’homme » La région dont parle l’association présente un grand intérêt écologique, comme il apparaît clairement dans son communiqué. Rihane, plus spécifiquement, s’étend de 550 à 1 450 mètres d’altitude. Elle est composée d’une nature montagneuse, de rivières et de vallées, d’où le fait qu’elle est recouverte d’une végétation très variée. Les sources d’eau, souterraines et superficielles, y sont nombreuses et sont généralement très vulnérables à l’exploitation sauvage des carrières ainsi qu’aux dépotoirs non contrôlés. Par ailleurs, les carrières n’épargnent pas les pinèdes, dans un pays où les espaces verts ne constituent plus que 6 % ou moins de la superficie globale... À Rihane, selon le communiqué, poussent des plantes rares ou endémiques qui font partie d’écosystèmes différents. De plus, le ciel de Jabal Rihane est l’un des couloirs empruntés par les oiseaux migrateurs (l’itinéraire est Freidess-Rihane-Arnoun). Rappelons qu’à Ebel es-Saqi (Marjeyoun), l’un des villages touchés par les carrières actuellement, selon l’ONG, une réserve a été créée pour protéger, notamment, les oiseaux migrateurs qui y passent. « En affectant les sources d’eau, les carrières auraient ainsi eu un impact sur la population mondiale d’oiseaux », insiste M. Hassoun. Il poursuit : « L’occupation israélienne a gravement affecté l’état de l’environnement au Sud, surtout que l’occupant a abattu un grand nombre d’arbres et a construit des positions et des routes militaires en pleine forêt. Mais ces actes n’ont pas réussi à enlaidir cette région dont la beauté est considérable, ni à nous désespérer d’y établir un développement durable après la libération. Toutefois, de toutes les catastrophes écologiques causées par l’homme, l’exploitation sauvage des carrières est la plus nocive pour cette région. » Et pour tout le pays. À quand une solution qui privilégie l’intérêt national (économique autant qu’écologique) au détriment des intérêts personnels d’une mince catégorie de la population ? Suzanne BAAKLINI

Ni l’interdiction qui les a frappés depuis octobre 2002 ni les plans directeurs successifs n’ont jusque-là réussi à empêcher les propriétaires de carrières « protégés » de poursuivre leur travail de défiguration des sites naturels, notamment forestiers. Dans les différentes régions, du Sud au Nord en passant par la Békaa, les habitants se plaignent des explosions...