Rechercher
Rechercher

Actualités - OPINION

Préjugé favorable de l’opinion pour la personne même de Karamé

C’est indéniable : Omar Karamé bénéficie d’un capital appréciable de sympathie chez les Libanais. Même ceux qui lui ont refusé la confiance à la Chambre ont surenchéri d’éloges en ce qui concerne sa personne propre. C’est là un atout qui atténue l’effet-discrédit de la majorité étique obtenue à la Chambre par son équipe. Mais chat échaudé craint l’eau froide. Aussi, au-delà du préjugé populaire jouant en faveur du président du Conseil, la vraie question reste de savoir s’il va pouvoir, s’il va savoir, faire quelque chose de bon. Naturellement, les ministres répondent par la positive. L’un d’eux souligne même que la popularité manifeste de Karamé contrebalance parfaitement son insuccès parlementaire relatif. Ajoutant que l’opposition et les abstentionnistes sont, sinon de mauvaise foi, du moins coincés dans une logique de refus obtuse. N’ont-ils pas rejeté les offres de participer au gouvernement, au redressement, la main tendue à tous, dès sa désignation, par le président Karamé ? Ne sont-ils pas responsables de la non-mise en place de ce cabinet d’union nationale, dont le pays aurait eu besoin ? Ce ministre relève que nombre de ceux qui avaient voté l’amendement de l’article 49 de la Constitution ont refusé d’accorder la confiance aux Trente. Certains d’entre eux, ajoute-t-il, semblent d’ailleurs regretter d’avoir choisi la prorogation du mandat Lahoud. Et ont donc voulu se démarquer du pouvoir qu’ils ont eux-mêmes investi, à l’occasion du débat de confiance. En d’autres termes, selon la logique de ce ministre, ces politiciens déçus ou frustrés font payer au cabinet leur soudain ressentiment contre le régime. Les prudents ont préféré voyager, pour échapper aux relances et aux pressions. Pour ne pas revivre en somme l’expérience de l’amendement qui leur avait été imposé. Et qui, pour beaucoup, se confirme comme un bien mauvais choix en définitive. Dans ce sens qu’il attire sur le Liban, qui s’en serait bien passé, l’animosité de la légalité internationale, USA et France en tête, à cause de la 1559. À ce propos, un ancien ministre trouve aujourd’hui que face à cette question, le Liban officiel va résolument en sens interdit. Il estime que la rallonge de trois ans concédée au régime risque d’avoir bien des répercussions négatives. Tant à l’intérieur même, entre forces politiques libanaises, que du fait des pressions, voire des éventuelles sanctions, extérieures sur le Liban comme sur la Syrie. Menace d’autant plus pesante que la prorogation s’est voulue comme un pied-de-nez à la légalité internationale. Qui la veille même avait enjoint le respect de la Constitution libanaise en l’état et du principe démocratique de l’alternance. En sus des injonctions de cessation des immixtions, du retrait militaire syrien, de la neutralisation du Hezbollah comme des camps palestiniens ou des cellules armées subversives. Du fait de son défi, le Liban est désormais placé en quarantaine. Sous haute surveillance internationale, le secrétaire général de l’Onu, Kofi Annan, étant chargé de remettre un rapport détaillé sur la 1559 au Conseil de sécurité dans quatre mois. Dans ce climat, Omar Karamé affiche une détermination à tout crin d’appliquer de rapides mesures en ce qui concerne des sujets de préoccupation sociale urgente, comme l’électricité, le pain ou les carburants. Parallèlement, il entend engager sinon une réforme administrative de fond, du moins une correction de trajectoire. Par le biais des organismes de contrôle et de leur dynamisation. L’opposition se montre généralement sceptique sur les possibilités d’action efficace du gouvernement. Car, fait-elle valoir, il va devoir se consacrer à l’élaboration de la loi électorale comme à la préparation des élections. Auxquelles nombre de ses membres, candidats à la députation, vont pratiquement se consacrer en exclusivité. Mais un ministre répond que l’opinion jugera sur les actes, non pas sur le volume de la confiance obtenue par le gouvernement auprès des politiciens. Ni sur le discours politique du cabinet, qui n’est développé que pour respecter les formes, l’essentiel résidant dans les tâches urgentes à accomplir dans le domaine socio-économique. De son côté, un ancien ministre observe que le président Lahoud va sans aucun doute soutenir à fond Karamé, puisqu’ils partagent la même priorité de l’action sociale. Selon cette personnalité, ce soutien, cette cohésion au sein du pouvoir devraient permettre à l’équipe en place d’accomplir des réalisations que le gouvernement Hariri n’avait pu mener à bien. L’ancien ministre rappelle les blocages provoqués par les querelles entre les présidents. Ainsi que les multiples interventions de Damas pour faire respecter une trêve entre eux, afin d’éviter une crise de pouvoir. À son avis, c’est la persistance de ce conflit qui a causé le départ de Hariri et son remplacement par un Karamé qui semble mieux s’entendre avec le régime. Un accord confirmé par le président Lahoud lui-même qui a demandé aux ministres de coopérer à fond avec le président Karamé, ajoutant que lui-même s’entend parfaitement avec lui et qu’il n’y aura plus de querelles au sein du pouvoir. Qu’il n’y aura plus de copartage et de politisation de l’Administration. Mais l’appui du régime et celui de Damas sont loin d’être suffisants, affirment les opposants. Qui pensent que le gouvernement est trop faible politiquement pour prendre des décisions importantes, comme s’aligner sagement sur la 1559. Ou même pour accomplir des réalisations socio-économiques consistantes, vu qu’il a trop peu de temps devant lui. De plus, notent les opposants, le gouvernement est principalement soutenu à la Chambre par le bloc Berry. Or ce dernier groupe n’est pas particulièrement favorable à des réformes incluant, par exemple, la disparition du Conseil du Sud. Encore plus important pour les berriyistes à l’orée des élections. Et dont l’éviction est prévue dans le projet de budget 2005 établi par Siniora. Philippe ABI-AKL
C’est indéniable : Omar Karamé bénéficie d’un capital appréciable de sympathie chez les Libanais. Même ceux qui lui ont refusé la confiance à la Chambre ont surenchéri d’éloges en ce qui concerne sa personne propre. C’est là un atout qui atténue l’effet-discrédit de la majorité étique obtenue à la Chambre par son équipe.
Mais chat échaudé craint l’eau...