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SINISTRES - Des actes criminels, accusent les responsables Du nord au sud, les forêts du pays ravagées par les incendies (photos)

Depuis quelques jours, comme chaque année en période d’étiage, des incendies à répétition font rage dans l’ensemble du pays, alimentés par des vents chauds et secs d’une rare violence. Alors que la sécheresse sévit et que la pluie se fait toujours attendre. Alors que le gouvernement rechigne encore à acquérir des canadairs, avions équipés de réservoirs d’eau pour éteindre les incendies de forêt. Du nord au sud, en passant par le Mont-Liban, des centaines d’hectares de forêts continuent de partir en fumée, détruits par des sinistres aux multiples foyers. Des sinistres dont l’origine criminelle n’est un secret pour personne, alors que les coupables continuent de sévir, dans l’impunité la plus totale. Que reste-t-il aujourd’hui des forêts du Akkar, des bois de Beit-Méry, de Fanar et de Mkallès, alors que 5 000 volontaires de la Défense civile, assistés de l’armée libanaise, se relaient sans arrêt pour éteindre les sinistres qui ravagent le pays, et que 3 000 d’entre eux sont sur place, en permanence ? « Nul ne le sait encore, déplore le brigadier Darwiche Hobeika, à la direction de la Défense civile. Nous sommes pour le moment trop occupés à éteindre les feux qui n’en finissent pas de se déclarer dans l’ensemble du pays, pour pouvoir donner la moindre estimation. » L’armée libanaise estime, elle, les superficies brûlées à 450 dounoums (l’équivalent de 45 hectares), dans l’ensemble des régions libanaises. En effet, des dizaines d’incendies se sont déclarés ces derniers jours dans les régions de Brih, Beit-Méry, Mkallès, Fanar, Araya, Sharoun, Aley, Kfarsaloun, Wadi Amik, Saadyate, Wadi Haret el-Sett, Betchay, Jamhour, Kornet, Koueykhate, Dahr Nassar au Akkar, Charbila, ainsi que Saïda et Sarba au sud. Ravivées par un vent chaud et violent Mais rien qu’au Akkar, les habitants ont estimé à 200 hectares les superficies d’arbres fruitiers détruites par le sinistre, dans la nuit de mardi à mercredi. À Beit-Méry, le même soir, les flammes, se propageant à grande vitesse, ont ravagé les bois de Deir el-Kalaa, menaçant le couvent et les ruines du même nom, et ont balayé, au passage, les installations électriques d’un restaurant de la région, avant de poursuivre leur course folle vers la vallée, d’une part, et vers Mkallès, de l’autre. La journée d’hier, les incendies semblaient circonscrits dans cette région, mais dans l’après-midi, les flammes ont été ravivées par le vent chaud et sec, détrompant la vigilance des pompiers. Débordés les pompiers ? « Nous travaillons d’arrache-pied et arrivons à éteindre les foyers, observe l’un d’eux, de la Défense civile. Vous ne pouvez imaginer le travail que les hommes sont capables d’abattre », ajoute-t-il fièrement, tout en ajoutant que l’armée vient à leur rescousse lorsqu’ils sont débordés. En effet, les soldats et les hélicoptères de l’armée ont prêté main-forte aux membres de la Défense civile durant les longues heures de lutte contre les sinistres. Même si les moyens mis en œuvre semblent dérisoires face à la voracité des flammes, alimentées par la force du vent. Brûler pour s’approprier Mais quelle est donc la raison de ces incendies ravageurs ? « Ces incendies sont allumés délibérément pour différentes raisons », dénonce le brigadier Darwiche Hobeika. Et de préciser qu’à la veille de la saison d’hiver, « certaines personnes mettent le feu aux bois et forêts, exprès, afin d’en utiliser le charbon après les incendies pour se réchauffer en hiver ». « Parfois même, explique le brigadier Hobeika, durant l’opération de cueillette des pommes de pins, les habitants brûlent les brindilles et les hautes herbes afin de dégager les pommes de pin tombées des arbres, facilitant ainsi le travail de cueillette. Le feu prend vite et devient rapidement incontrôlable. » « Le comble, poursuit le brigadier, c’est que dans certaines régions où il n’existe pas de cadastre, notamment dans le nord du pays, les propriétaires terriens brûlent les forêts pour agrandir leurs terres, s’appropriant des étendues appartenant à l’État. » Et d’indiquer que dans ces régions, on identifie chaque terrain non pas en fonction de sa superficie, mais selon une description bien particulière. Ainsi, si un terrain s’étend, selon la description qui en est faite, d’un rocher jusqu’à l’orée de la forêt, rien n’empêche le propriétaire dudit terrain d’incendier la forêt, repoussant ainsi les limites de son terrain pour l’agrandir. « C’est du vol légalisé », accuse-t-il. De son côté, un militaire de faction à Beit-Méry a déploré le manque de civisme de la population qu’il accuse de jeter toutes sortes de déchets inflammables dans les bois, avant d’y mettre le feu, sans se soucier des conséquences de son geste. « J’ai personnellement ramassé des dizaines de pneus qui brûlaient dans la région de Deir el-Kalaa et qui alimentaient le feu, dit-il. Que faire contre l’insouciance des gens ? » demande-t-il aussi. Face à ces sinistres qui se sont multipliés dans le pays, à l’heure où le nouveau gouvernement était annoncé, le ministre désigné de l’Environnement, Wi’am Wahhab, a demandé à la Défense civile, à l’armée libanaise et aux habitants de redoubler d’efforts pour faire face à la situation et circonscrire les foyers d’incendies qui ravagent annuellement le pays. Mais en attendant que le gouvernement se décide à se pencher sur le problème et à envisager des mesures efficaces contre un fléau qui menace le capital forestier du pays, les incendies continuent toujours de sévir et les forêts du Liban de partir en fumée. Anne-Marie EL-HAGE Des mesures de prévention prônées par l’AFDC Les forêts qui partent en fumée et la catastrophe écologique (ou l’une d’elles) qui se déroule en permanence sous nos yeux ne semblent pas jusqu’à présent émouvoir outre-mesure nos responsables pour lesquels les priorités se trouvent ailleurs... Les multiples foyers qui se sont déclenchés ces derniers jours ont poussé l’Association de protection et de développement des forêts (AFDC) à réagir, demandant aux responsables, aux forces de l’ordre, aux municipalités et à la population de combattre les irrégularités et d’éviter les activités qui pourraient résulter en un incendie, en cette période de l’année particulièrement dangereuse, surtout quand elle est caractérisée par des vents secs. À la population, l’AFDC demande de ne pas allumer de feux en milieu forestier (ce qui est contraire à la loi) sous quelque prétexte que ce soit avant l’arrivée de la saison des pluies. L’association s’adresse plus particulièrement aux agriculteurs qui ont recours à cette pratique pour se débarrasser des mauvaises herbes. Elle demande également aux forces de l’ordre, à l’armée et aux gardes forestiers d’intervenir rapidement à la vue de la fumée, et aux municipalités de rester vigilantes quant aux contraventions (sachant que les incendies sont souvent d’origine criminelle, dans l’objectif de produire du charbon pour l’hiver). L’association rappelle qu’il suffit d’appliquer la loi à l’encontre des contrevenants. L’AFDC revendique, par ailleurs, la création d’un appareil spécialisé dans la lutte contre les incendies, qui doit être doté de ressources humaines, d’équipements et de l’expérience nécessaires pour cette mission. Elle rappelle que la création de cet organisme est conforme à de multiples recommandations parlementaires rejetées, à l’époque, par le ministère de l’Agriculture. Or, considère l’AFDC, « le problème des incendies se répétera chaque année jusqu’à ce que le gouvernement en fasse une priorité ».

Depuis quelques jours, comme chaque année en période d’étiage, des incendies à répétition font rage dans l’ensemble du pays, alimentés par des vents chauds et secs d’une rare violence. Alors que la sécheresse sévit et que la pluie se fait toujours attendre. Alors que le gouvernement rechigne encore à acquérir des canadairs, avions équipés de réservoirs d’eau...