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Actualités - CHRONOLOGIE

Foire De Francfort L’édition arabe fragilisée par de nombreux problèmes… (photo)

FRANCFORT – de Zeina ZALZAL La 56e édition de la Foire du livre de Francfort, en honorant cette année la littérature du monde arabe, a néanmoins permis de mettre au jour les difficultés auxquelles fait face le secteur éditorial des pays du Moyen-Orient. Pas une conférence, pas une table ronde, pas une discussion entre auteurs sans que ne soient mentionnés les problèmes de censure, de piratages ou d’inexistence d’une politique de soutien au livre dans ces pays. Et c’est vrai qu’en y regardant de plus près, les stands des éditeurs des pays arabes, pour foisonner d’ouvrages, n’en restent pas moins moroses côté créativité. Des ouvrages académiques, quelques romans et plaquettes de poèmes, des livres religieux, des manuels de cuisine (le chef Ramzi a son propre stand à Francfort !), mais rien à comparer avec la grande variété de productions que présente le pavillon francais voisin, pour ne citer que cet exemple. Pouvoir d’achat et Internet Une morosité qui s’explique par la fragilité d’un secteur en difficulté depuis quelques années. « L’édition arabe souffre de nombreux problèmes », affirment les professionnels. Le premier étant, selon Bachar Chébaro, secrétaire de l’Association des éditeurs arabes, « le faible pouvoir d’achat qui rend le livre très coûteux pour une large frange de la population. Ce qui entraîne, du coup, les éditeurs a réduire le nombre de leur tirage. Au Liban, par exemple, qui est le premier éditeur du monde arabe au niveau de la diversité et de la qualité des ouvrages (l’Égypte est le premier en production de masse), le tirage d’un roman s’élève à 3000 exemplaires, et celui d’un recueil de poésie n’atteint pas les 2000 », indique-t-il. Autre facteur de régression de la lecture et donc de l’édition dans le monde arabe, l’Internet qui éclipse totalement chez la jeune génération le livre. « D’autant que, malheureusement, nous n’avons pas de tradition de lecture dans nos pays. L’initiation à la lecture n’existe ni au niveau des familles ni véritablement à l’école, où le livre reste purement et simplement un manuel d’apprentissage », assure le responsable de cet organisme qui regroupe des éditeurs indépendants. La place prépondérante du livre académique dans la production arabe confirme ce constat. Il existe environ un millier d’éditeurs (de livres non religieux) dans le monde arabe et 80 % de leur chiffre d’affaires est réalisé par les ouvrages scolaires et universitaires. Livres religieux et scolaires Le manque de vraies libraires et de bibliothèques publiques ne favorise pas le secteur du livre dans ces pays. Par ailleurs, la littérature arabe bute sur des frontières. Celles de la censure. Qui varie, elle, d’un pays à l’autre. « Elle est nettement moins pesante au Liban qu’en Arabie saoudite », assure un éditeur libanais. Mais elle reste quand même bien présente et revêt différentes facettes : politique, religieuse ou même géographique. Un livre paraissant au Maroc n’arrive pas systématiquement aux mains du lecteur libanais. Et, vice versa, certains ouvrages édités au Liban ne pourront pénétrer, pour des raisons complexes et variées, certains territoires… « La libre circulation de la production est confrontée à un problème de chasse gardée des marchés », soutient pour sa part un éditeur libanais qui explique que cette situation touche particulièrement le Liban, « car contrairement à l’Égypte qui est un pays de production et de consommation locale, le Liban est un pays de production et de consommation panarabe », dit-il. Sauf que le piratage peut absorber une grande part du marché de l’éditeur ! Une habitude assez developpée dans toute la région. À titre d’exemple, les Mounged édités par la Librairie orientale, sont énormément piratés en Iran, un des pays non signataires de la convention des droits de la propriété intellectuelle. « En matière de belles lettres, les ouvrages d’auteurs très connus, comme Hanane el-Cheikh ou Adonis, sont systématiquement piratés. Et là aussi, ce sont leurs éditeurs qui trinquent… » Autre grande plaie : l’inexistence de fonds gouvernementaux de soutien au livre, exception faite des ouvrages religieux dont la diffusion est favorisée par certains régimes politiques. En Arabie saoudite, un commentaire du Coran peut dépasser les 100 000 exemplaires, tandis que le chiffre d’or d’un roman arabe contemporain n’atteint pas les 2 000 exemplaires. « Le livre religieux reste le plus vendu dans le monde arabe », confirment les éditeurs. Mais même ce domaine est soumis aux clivages politiques. « Tel livre d’exégèse est permis dans un pays et interdit dans un autre », assure un éditeur participant à la foire. Des problèmes nombreux et variés auxquels sont confrontés les éditeurs du monde arabe et auxquels certains espèrent trouver des solutions par le biais de contacts établis à Francfort. En négociant, notamment, le coût des droits occidentaux (très élevé si on le compare au nombre de tirages du livre traduit), en s’inspirant des politiques culturelles et pédagogiques appliquées dans les pays occidentaux ou encore en essayant non seulement d’acheter des traductions, mais aussi d’en proposer aux marchés non arabes… « Si nous étions aidés par nos États, nous aurions pu, par exemple, organiser des braderies, comme cela se fait en Europe pour encourager les gens à acheter des livres. Une initiative qui pourrait porter ses fruits, mais que nous ne pouvons pas réaliser seuls, en raison du faible tirage et donc de la faible marge de bénéfices que nous avons », lance, en conclusion, le secretaire de l’Association des éditeurs arabes.
FRANCFORT – de Zeina ZALZAL
La 56e édition de la Foire du livre de Francfort, en honorant cette année la littérature du monde arabe, a néanmoins permis de mettre au jour les difficultés auxquelles fait face le secteur éditorial des pays du Moyen-Orient. Pas une conférence, pas une table ronde, pas une discussion entre auteurs sans que ne soient mentionnés les problèmes de...