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Actualités - CHRONOLOGIE

AWTTE 2004 - Selon lui, la conjoncture politique fait fuir certains investisseurs Walid ben Talal refuse le Sérail et appelle Lahoud et Hariri à coopérer

Ouverture solennelle hier au Biel du forum arabo-international du tourisme et du voyage (AWTTE 2004). L’émir Walid ben Talal était là, au titre du plus grand investisseur arabe dans le secteur de l’hôtellerie dans la région. Le président de la République, Émile Lahoud, était également présent : il parrainait la manifestation. Mais c’est le politique qui a primé dans l’intervention de l’émir qui a obtenu la nationalité libanaise il y a dix ans, pour faciliter ses investissements au pays du Cèdre. « Permettez moi de laisser de côté le tourisme pour parler de politique », dit l’émir, sans détours, devant le parterre d’hommes d’affaires rassemblés au pavillon Royal, donnant ainsi le ton de l’ensemble de son discours. En moins de soixante minutes, il a ainsi abordé tous les méandres de la vie politique libanaise, persuadant l’auditoire qu’il est un homme averti, qui suit au jour le jour l’évolution de l’actualité. Walid ben Talal a rendu un vibrant hommage au chef de l’État qu’il a qualifié de « père spirituel de la guerre de libération du Liban-Sud », mais, dans le même temps, il a démenti, du moins pour le court terme, toutes les rumeurs autour de son éventuelle désignation à la tête du prochain gouvernement. Walid ben Talal était clair dans sa position de soutien à la première magistrature de l’État. Cela ne l’a pas empêché d’appeler avec beaucoup de courage les nos 1 et 3 de l’État à coopérer, parce que de nombreux investisseurs, dont il a tenu à taire le nom, lui ont récemment proposé de lui céder leurs projets dans le but ultime de se désengager du marché libanais. « Le problème sécuritaire, qui a émergé dernièrement, sera j’en suis sûr dépassé incessamment. Les investisseurs sont inquiets de la situation politique qui ne les encourage pas à se maintenir dans le pays. » Les compteurs sont en marche « Il est temps de faire place à l’entente. L’entente est indispensable. C’est une revendication populaire. Les compteurs de la dette sont en marche », a-t-il insisté à plusieurs reprises, avant de mettre l’accent sur l’importance d’un plan global de redressement économique sans lequel le sauvetage du Liban relève de l’impossible. Pour illustrer les tiraillements politiques qui entravent la mise en œuvre de projets de développement dans le pays, Walid ben Talal a par exemple souligné que les autorités concernées n’ont pas réussi jusqu’à présent à confier à une partie l’élaboration de l’étude de faisabilité économique d’un aéroport au Liban-Nord. Il a par ailleurs critiqué la concentration des projets de développement dans certaines régions, en l’occurrence la capitale. « Solidere est un bon projet et je le soutiens. Mais la plupart des autres régions du pays ploient sous la pauvreté. » Rappelant les nombreuses critiques dont son discours à l’inauguration de l’hôtel Mövenpick avait fait l’objet, l’émir a déclaré que le Liban officiel a été contraint au bout du compte à mettre au point un plan pour la réduction de sa dette lors de la conférence des bailleurs de fonds de Paris II. « Les plans de redressement ne sont pas l’apanage des seuls pays socialistes. » Amendements en France et aux EU Walid ben Talal n’a pas mâché ses mots, en évoquant l’opposition. S’il l’a invitée à tendre la main au chef de l’État, l’émir a déclaré en substance : « Je suis de près certains opposants qui ont certes le droit de faire entendre leur voix. Mais il n’est pas permis que cette opposition atteigne un seuil qui est inacceptable, même dans les pays démocratiques évolués. » « La question de la prorogation de votre mandat est derrière nous. Aujourd’hui, il faut regarder vers l’avenir. La prorogation de votre mandat n’est pas la première en son genre et ne sera pas le dernière dans l’histoire moderne du Liban », a-t-il dit à l’adresse du chef de l’État, soulignant qu’il est étonné du « tapage » fait autour de cette question. Ainsi, il a relevé que la Constitution française a été amendée à plusieurs reprises et que la dernière en date a porté sur la durée du mandat présidentiel, alors que la Loi fondamentale américaine a fait l’objet de 27 amendements. Dans un plaidoyer sans précédent en faveur du président de la République, Walid ben Talal a estimé que d’aucuns pourraient s’opposer à sa politique mais nul ne peut contester « son intégrité totale et rare, surtout ces temps-ci et dans un pays qui ploie sous le poids d’une dette qui approche les 40 milliards de dollars ». Walid ben Talal a même cité le président syrien Bachar el-Assad. « Je ne suis pas en mesure de divulguer tout ce qu’on s’est dit lors de notre entretien. Mais il m’a assuré personnellement de son estime et de sa confiance sans limite en vous. Et il vous considère, comme le père spirituel de la libération de la plupart des terres du Liban-Sud. » Médias et contraintes Voulant faire montre d’objectivité, il a exhorté le n° 1 de l’État à mettre à profit l’opportunité que représentent les trois prochaines années de la prorogation de son mandat pour honorer ses engagements pris lors de son discours d’investiture, à savoir l’édification de l’État des institutions et l’éradication de la corruption. L’émir s’en est pris à un moment donné à certains médias. Il a tenu à répéter le terme « certains » pour dissiper toute interprétation intempestive de ses propos. Il a ainsi regretté que certains médias libanais ne reflètent pas la réalité lorsqu’ils évoquent le président de la République. Il a invité ces médias à prendre contact directement avec lui pour « régler les contraintes dont ils font l’objet ». « À partir de cette tribune, je m’engage à leur trouver une solution pour faciliter leur tâche, c’est-à-dire devenir objectifs dans leur approche des sujets ». Dans les dix dernières minutes, Walid ben Talal s’est décidé enfin à parler du tourisme. Après le Mövenpick et le Four Season’s de Beyrouth, il est en passe de procéder à la pose de la première pierre d’un troisième hôtel dans la capitale libanaise. L’émir à Bkerké Dans la journée, l’émir al-Walid s’était rendu en compagnie de sa tante, Mme Leïla Riad el-Solh, et l’avocat Joseph Louis Abou Charaf à Bkerké, où il a eu un tête-à-tête de dix minutes avec le patriarche Sfeir. Prié par la presse de dire s’il a envie de prendre part à la vie politique dans le pays, l’émir a répondu en affirmant que l’heure n’est pas aux discussions politiques. Ce qui ne l’a cependant pas empêché de s’étendre longuement sur la politique locale, en réponse à d’autres questions qui lui ont été posées, critiquant particulièrement l’opposition. « La situation politique est sans doute délicate. Elle l’est davantage sur le plan économique. Nous espérons seulement, après la prolongation du mandat du président Lahoud, que certains individus retrouveront la raison et accepteront le fait accompli, qui découle d’une décision prise par la majorité absolue du Parlement lorsque celle-ci avait prorogé le mandat présidentiel. » Plus tard, le bureau de l’émir al-Walid a publié un communiqué dans lequel il a indiqué qu’après son tête-à-tête avec le patriarche Sfeir, l’homme d’affaires saoudien a exposé à son hôte le programme d’activités de la fondation qu’il préside ainsi que « les projets qu’elle soutient dans toutes les régions libanaises et les aides qu’elle accorde aux Libanais, toutes appartenances communautaires confondues ». Le communiqué précise que l’émir a fait don au patriarcat maronite d’un million de dollars, dont 400 000 seront consacrés à la modernisation de la bibliothèque de Bkerké. Le reste, poursuit le texte, est destiné à financer un certain nombre de projets humanitaires. Liliane MOKBEL
Ouverture solennelle hier au Biel du forum arabo-international du tourisme et du voyage (AWTTE 2004). L’émir Walid ben Talal était là, au titre du plus grand investisseur arabe dans le secteur de l’hôtellerie dans la région. Le président de la République, Émile Lahoud, était également présent : il parrainait la manifestation. Mais c’est le politique qui a primé dans...