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Actualités - CHRONOLOGIE

Le Chouf en ébullition après l’attentat contre Hamadé et la mort de son compagnon Colère à Mazraat el-Chouf et fermeture générale à Baakline (photo)

À Mazraat el-Chouf, village d’origine de l’officier des Forces de sécurité intérieure Ghazi Bou Karroum, tué lors de la tentative d’assassinat du ministre Marwan Hamadé à Beyrouth, la colère grondait hier et semblait même l’emporter sur la tristesse chez les habitants toujours sous le choc. Allant au-delà de la tragédie représentée par la perte d’un parent et d’un ami, ils considéraient invariablement l’incident comme un « message au chef du PSP, Walid Joumblatt ». Le mot « révolte » est revenu souvent dans la bouche des plus jeunes. À Baakline, village de Marwan Hamadé, la nouvelle a été accueillie le matin par une fermeture aussi immédiate que spontanée des commerces, et un regroupement d’habitants et de personnalités en colère. À l’arrivée de la dépouille mortelle de la victime, Ghazi Bou Karroum, à son village natal, dans un cercueil recouvert par le drapeau du Parti socialiste progressiste (PSP), des milliers de partisans l’ont accueilli par des slogans où ils exprimaient toute leur révolte, assurant qu’ils étaient prêts à mourir pour la politique de leur leader, selon des témoins. Ils sont arrivés par groupes dans des voitures recouvertes d’immenses drapeaux du PSP. Pour sa famille, le défunt est le « martyr du Liban, de la liberté et de l’indépendance ». « La famille Bou Karroum a déjà compté plusieurs martyrs », déclare Nachaat Bou Karroum, un parent. « Ghazi est le dernier de la liste. Il avait auparavant perdu un frère dans la guerre de la Montagne. » Cet officier de 43 ans, « aimé et apprécié de tous », nous dira-t-on simplement, était le père de trois enfants en bas âge, deux filles et un garçon. L’histoire de son épouse est particulièrement poignante puisqu’elle se retrouve veuve pour la seconde fois, après avoir perdu un premier mari au combat. Ghazi Bou Karroum a rejoint les FSI en 1992 et était membre du PSP. Il était rattaché au service de M. Hamadé depuis quatre ans environ. Toutefois, vu la nature du crime, la discussion a facilement pris une tournure politique, les membres de la famille considérant que « ce sont les libertés et la ligne politique de Walid Joumblatt qui sont visées par cette explosion ». « C’est un message non seulement au leader du PSP, mais à tous les hommes libres au Liban et au Moyen-Orient », souligne Nachaat Bou Karroum. Les parents de la victime se sont refusés à faire des pronostics sur la partie responsable de l’attentat, rappelant que M. Joumblatt a demandé à ses troupes de garder le calme. Cela n’empêche pas l’un d’eux de lâcher un peu plus tard : « Celui qui a tué Kamal Joumblatt peut tuer n’importe qui. » Ils s’attendent cependant à de grandes foules qui prendront part aux funérailles de la victime aujourd’hui, et pas seulement des habitants de la région. « Nous nous sentons très soutenus pas l’ensemble des Libanais, cette tragédie touche tout le monde », affirme Nachaat Bou Karroum. À l’extérieur de la salle où les condoléances sont reçues par la famille, des groupes de jeunes gens principalement se tiennent là, comme incapables de s’éloigner, avec des mines renfrognées et un regard fulminant. « La jeunesse est en ébullition », nous lance l’un d’eux, refusant d’être nommé. Un autre soulève : « Imaginez ce qui se serait passé si un malheur était arrivé à Marwan Hamadé. » Interrogés sur ce qu’ils pensent de la partie responsable de l’attentat, ils répondent d’un air énigmatique : « Tout le monde sait qui est coupable », refusant d’en dire plus. Adoptant un ton plus mesuré, un cheikh druze (lui aussi requérant l’anonymat), marchant en tête d’une délégation du village de Aramoun, souligne que « toute la communauté a fortement dénoncé cet attentat qui vise l’union nationale, comme nous avons dénoncé les arrestations qui ont eu lieu dans la région ». Il ajoute, avec un sourire qui contraste quelque peu avec la gravité de ses paroles : « Nous attendons la conclusion de l’enquête, l’État devant faire la lumière sur cette affaire. » Rassemblement spontané Baakline et le reste du Chouf ressemblaient hier à un désert. L’écrasante majorité des commerces demeuraient fermés dans l’après-midi, alors que les passants et les automobilistes se faisaient rares. La fermeture des commerces et des écoles s’est produite spontanément à Baakline dès le matin, sitôt que la nouvelle de l’attentat contre le fils du village, Marwan Hamadé, a été annoncée. La place du village a aussitôt été investie par une foule d’habitants mais aussi de personnalités. La présidente de la municipalité de Baakline, Noha Ghosseini, a prononcé un mot dans lequel elle a stigmatisé « la main criminelle et lâche, motivée par un désir de trahison et de vengeance, qui a atteint l’un des symboles de nationalisme de ce pays ». Elle a ajouté que « ce terrorisme ne freinera pas notre combat en faveur de la liberté, de la dignité et de l’indépendance, et n’entravera en rien notre détermination ni celle de Walid Joumblatt et de ses compagnons, dont le député Hamadé ». Le calme revenu, dans l’après-midi, les rares habitants rencontrés restaient sous le choc. « Les gens se sentent à nouveau insécurisés », souligne le patron d’une échoppe, une des rares qui avaient rouvert ses portes. Un chauffeur de taxi s’étonne que « le député Marwan Hamadé, un homme aimé et respecté de tous, qui n’a jamais fait de mal à personne, soit ainsi visé par un attentat ». Suzanne BAAKLINI
À Mazraat el-Chouf, village d’origine de l’officier des Forces de sécurité intérieure Ghazi Bou Karroum, tué lors de la tentative d’assassinat du ministre Marwan Hamadé à Beyrouth, la colère grondait hier et semblait même l’emporter sur la tristesse chez les habitants toujours sous le choc. Allant au-delà de la tragédie représentée par la perte d’un parent et...