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Actualités - OPINION

Au parfum

«C’est bien. Peut mieux faire. » Ainsi pourrait-on résumer le jugement favorable et cependant empreint de réserve que portent les États-Unis sur les dernières initiatives du régime de Damas. Colin Powell, qui s’est entretenu jeudi à New York avec Farouk el-Chareh, s’est félicité de la « bonne volonté » dont fait preuve en ce moment la Syrie sur les deux dossiers litigieux de l’Irak et du Liban. Il a salué la disposition de Damas à mieux contrôler sa frontière avec l’Irak de même que l’allègement en cours du dispositif militaire syrien au Liban, soulignant toutefois que Washington attend maintenant des actions, et non des promesses d’agir. À défaut d’un franc certificat de bonne conduite, c’est donc un encouragement à persévérer sur la bonne voie que vient de délivrer l’Oncle Sam à une Syrie souvent qualifiée d’ État voyou, mais dont les États-Unis – ou du moins les « arabistes » du département d’État – ne désespèrent apparemment pas de faire en définitive un fidèle, loyal, dévoué et très présentable client. Une telle perspective ne pourrait que répondre d’ailleurs aux vœux de Damas, dont la radio officielle applaudissait chaleureusement hier à la nette amélioration des relations syro-US, initiée par la rencontre de New York. Depuis l’effondrement de l’Union soviétique, son principal fournisseur d’armements, la Syrie – qui a fait de la paix avec Israël une option stratégique – n’a cessé de chercher en réalité à se placer sous l’ombrelle américaine. Mais la Syrie a ses conditions et elles sont loin de se limiter, comme le veut la formule consacrée, à l’évacuation intégrale des territoires occupés et à la restitution de ses droits au peuple palestinien. Au centre de ces rêves de grandeur, de ces ambitions à peine cachées, qui contraignent en permanence Damas à la plus acrobatique des démarches, figure à l’évidence ce Liban qui connaît aujourd’hui avec la résolution 1559 de l’Onu un regain de préoccupation internationale. C’est dire que, plus que jamais, la Syrie fait penser aujourd’hui à l’un de ces jongleurs à la prodigieuse adresse, qui constaterait soudain, en plein spectacle, qu’il fait voltiger dans les airs un ballon de trop. Ces ballons, ce sont les diverses frontières du paradis baassiste, et le ballon de trop c’est, à l’évidence, l’irakien. Car Damas a réussi à sécuriser sa frontière turque, jadis gravement menacée, et est plutôt tranquille sur son flanc jordanien. Au Golan, c’est depuis trente ans le calme plat, puisque la Syrie – qui a supprimé en quelque sorte sa frontière avec le Liban – a réussi à faire de notre propre frontière avec Israël son seul front ouvert avec l’ennemi ! Restait cette frontière irakienne entrouverte au passage des combattants, et au moyen de laquelle Bachar el-Assad escomptait rendre aux Américains de l’Accountability Act la monnaie de leur pièce. Et c’est bien un second Accountability Act, onusien celui-là bien que non encore assorti de sanctions, qui a décidé les Syriens à arrêter les frais. Et à s’engager à faire patrouiller leurs soldats côte à côte avec les Marines de George W. Bush, sans trop s’inquiéter d’une promiscuité qui, en d’autres temps, eut pu être fort embarrassante, s’agissant après tout en effet de la plus farouchement, la plus agressivement pro-israélienne des administrations US. Tant de trésors de pragmatisme, tant de hasardeuses prouesses ne rendent que plus inexplicables l’énorme méconnaissance du fait libanais, la stupéfiante maladresse dont aura fait montre, au fil des ans, la Syrie dans sa gestion des affaires de notre pays. Cela dit, il faudra bien qu’on nous explique pourquoi le très vaste refus politique et populaire de la reconduction du mandat du président Lahoud passait il y a peu, à Damas, pour un intolérable acte de collusion avec le Satan américain. Et pourquoi les hommes de Damas, qui, au demeurant, comptent dans leurs rangs maints transfuges, clients « retournés » et autres repentis des amitiés israéliennes, ont entrepris de taxer de trahison un leader national de la stature de Walid Joumblatt. On a fini par les faire taire, car on a du flair pour eux. Là où cela compte vraiment, Satan a soudain cessé de puer le soufre. ———————— P-S : « Plutôt aller faire l’éboueur à New York », comme l’a lancé jeudi soir à la télévision un Joumblatt suffoquant de dégoût ? Que non, Walid Bey. Car si les cireurs de bottes sont légion ici et que la concurrence bat même son plein, c’est précisément de vaillants éboueurs qu’a le plus besoin ce pays livré à la plus néfaste des pollutions : la politique. I.G. Issa GORAIEB
«C’est bien. Peut mieux faire. » Ainsi pourrait-on résumer le jugement favorable et cependant empreint de réserve que portent les États-Unis sur les dernières initiatives du régime de Damas. Colin Powell, qui s’est entretenu jeudi à New York avec Farouk el-Chareh, s’est félicité de la « bonne volonté » dont fait preuve en ce moment la Syrie sur les deux dossiers...