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Actualités - OPINION

Le flou commence à se dissiper L’opposition affûte ses armes pour la bataille du tiers de blocage

Tout n’est pas encore tiré au clair. Et ne le sera que lorsque les décideurs auront dévoilé leur plan définitif, donné leur mot d’ordre. Mais un début de décantation s’opère. On sait mieux sur quel pied danser avec la proclamation Lahoud. Qui répond de la sorte à de pressantes invitations, émanant de sources variées, à se déclarer. Afin d’alléger à la fois le suspense et le marasme. Les propos du président, rapportés par ses visiteurs, répondent à diverses interrogations, contredisent ou confirment nombre de spéculations fébriles. En donnant raison à ceux qui avaient pronostiqué une tentative de décrocher un deuxième mandat. Pour parachever la concrétisation du programme initial développé dans le discours d’investiture en 98. Ces engagements, le chef de l’État soutient qu’ils ont été tenus dans leur partie dite stratégique, liée à la stabilité, à la Résistance comme à la Syrie. Mais entravés au plan des mécanismes politiques intérieurs, côté réformes notamment. Le président Lahoud, il convient de le souligner, n’accable à cet égard personne en particulier. Car il pointe du doigt, entre autres causes d’insuccès, les querelles entre les présidents. Et juge qu’en définitive, tout le monde est responsable du blocage. À ce sujet, justement, les opposants de toute coloration qui restent résolus à faire échec à la reconduction se préparent pour la bataille du quorum effectif. On sait en effet que pour être adopté, tout amendement constitutionnel nécessite une majorité des deux tiers. Et même des trois quarts, s’il y a nouvelle tentative. Les contestataires se comptent donc, pour faire en sorte que ces deux tiers ne soient pas atteints au jour J. En principe, c’est chose facile : on sait en effet que 45 parlementaires ont fait savoir publiquement qu’ils sont contre l’amendement. Tandis que 15 autres exprimaient une opposition égale, mais en privé. Mais en pratique, ces chiffres ne veulent pas dire grand-chose. Car beaucoup (et certains l’avouent sans fausse honte) changeraient leur fusil, ou leur veste d’épaule, dès le moment où les décideurs l’exigeraient. C’est exactement comme cela que les choses s’étaient passées en 95 pour la prorogation du mandat Hraoui. Retour à la proclamation Lahoud. Selon une source ministérielle fiable, d’autres initiatives vont être prises dans le même sens, et divulguées en fonction des contingences de l’actualité. Cette personnalité informée indique que la démarche présidentielle était prévue, attendue, depuis la visite de Chareh, et ne constitue donc pas une surprise. À partir de là, les rencontres de Damas vont être désormais sélectives, de nombre limité. Il ne s’agirait plus, selon cette source, de procéder à des consultations élargies, pour en dégager une synthèse. Mais bien, à l’en croire, de mettre au point le scénario devant servir de support à la transmission du fameux mot d’ordre traditionnel. Mystère Mais quel serait-il, ce diktat ? Malgré le regain certain de la cause reconductionniste, ce ministre répète que jusqu’à présent, Damas n’a absolument rien laissé filtrer de ses vues finales. Peut-être pour la bonne raison qu’il n’a pas encore fait ses choix. Sauf, évidemment, de laisser toutes les éventualités ouvertes. Ce qui explique le renflouage, au forceps, d’une option reconduction que l’on croyait mort-née, il y a quelques semaines. Pour cette source, Damas insiste sur ce point d’horizon dégagé, à la veille de la reprise de ses pourparlers avec les Américains, en principe le 27 à Rome. De leur côté, d’autres sources politiques, s’étonnent que nombre de réactions aux propos du chef de l’État se limitent à la surface, sans aborder le fond. Et se contentent d’estimer que cette prise de position déclenche la bataille politique autour de l’échéance présidentielle. Pour ces sources, évidemment loyalistes, il faut prêter attention à la teneur fondamentale du discours présidentiel. À les en croire, il remplit à merveille son rôle de gardien de la Constitution et de régulateur de la République, du moment qu’il se réfère au respect de la volonté parlementaire. Ils ajoutent que sa position n’a rien d’une tentative de passer en force contre la Constitution. Qui prévoit elle-même des mécanismes de révision. Ces cadres soulignent que le président de la République, tout en souhaitant avoir l’opportunité de parachever sa mission, n’a pas manqué de souligner que les députés peuvent décider de choisir un autre. À leur avis, lui aussi laisse toutes les portes ouvertes. Sans chercher à rien imposer. Bien entendu, ce plaidoyer ne convainc par les opposants. Pour qui la requête présidentielle est tout simplement anticonstitutionnelle. Ces fractions estiment que le président, en cautionnant les reconductionnistes directement, a officialisé le déclenchement de la bataille. Ceux d’entre eux qui font partie de ce que l’on appelle la ligne nationale et d’autres qui sont indépendants répètent que Damas n’a pas dit son dernier mot. Et qu’il aurait agi tout autrement s’il avait voulu décréter la reconduction. Pour des piliers de Kornet Chehwane, le régime est en train d’essayer de refaire le coup du 7 août. De passer en force. En allant jusqu’à se dédire par rapport à son serment de ne rien réclamer pour lui-même. De plus, selon ces opposants, en se déclarant de la sorte, le président Lahoud brique la carte syrienne négociatoire face aux Américains. Et fait contrepoids à la convergence entre Bkerké, Dar el-Fatwa et le Conseil supérieur chiite au sujet du rejet de toute manipulation de la Constitution. Ainsi que contrepoids à la jonction Sfeir-Hariri-Joumblatt. Quant aux chefs de file des blocs parlementaires, la plupart d’entre eux ont, dans un même réflexe de prudence, demandé à leurs affidés de rester sur la réserve. Du moment que rien n’est encore joué. Même si certains ont tendance à prendre leurs rêves pour des réalités. Il reste que selon des modérés, la proclamation Lahoud s’inscrit comme l’une des faces de la libanisation. Intervenue après que des voix se furent élevées contre la syrianisation de l’échéance. D’autant plus libanisée, disent-ils, qu’elle se réfère à la volonté parlementaire. Philippe ABI-AKL

Tout n’est pas encore tiré au clair. Et ne le sera que lorsque les décideurs auront dévoilé leur plan définitif, donné leur mot d’ordre. Mais un début de décantation s’opère. On sait mieux sur quel pied danser avec la proclamation Lahoud. Qui répond de la sorte à de pressantes invitations, émanant de sources variées, à se déclarer. Afin d’alléger à la fois le suspense...