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Actualités - OPINION

Les décideurs apparemment résolus à faire respecter la trêve

L’astuce est aussi simple qu’éprouvée : chaque fois que la Syrie décrète une trêve sur la scène politique libanaise, les protagonistes font mine de s’incliner. Et ne tardent pas à reprendre leurs querelles. En s’accusant réciproquement, pour se mettre à l’abri des foudres des démiurges, d’avoir ouvert le feu. On se demande donc si ce scénario classique ne va pas de nouveau être appliqué. L’enjeu de la présidentielle est en effet si important qu’on voit mal les joueurs accepter de rester sur la touche, en prenant le risque que l’adversaire prenne l’initiative et l’avantage. Mais un ministre informé indique que Damas veille au grain. Et maintient des contacts de surveillance pour prévenir les débordements. Parce que, maintenant, les Syriens sont déjà fixés sur ce que pensent ou veulent les différentes parties libanaises. Pour eux, la controverse sur l’amendement de l’article 49 n’est pas seulement inutile, mais encore fortement redoutable et préjudiciable. Dans ce sens que le climat de défi entretenu par les reconductionnistes et leurs adversaires risque de déstabiliser le pays, en aggravant en outre ses difficultés économiques et financières. Les deux camps sont donc invités à mettre l’arme au pied. À se mettre en congé forcé. En attendant que sonne, pas avant l’automne, l’heure des décisions. Diversion Pour meubler la pause, poursuit ce ministre, il n’est pas interdit de porter son attention sur les déclarations de candidatures et sur les programmes affichés par les postulants. Surtout en ce qui concerne les propositions d’ordre économique. Vu que, tout à fait normalement, ce domaine représente la toute première priorité du prochain régime. On peut donc passer le temps en comparant les idées relatives au redressement, à l’allégement de la dette publique et à la réduction du déficit budgétaire. Ainsi, le mois prochain, ou le suivant, le tableau se serait mieux décanté, tant sur le plan extérieur, qui motive essentiellement les décideurs, que sur le plan intérieur. Où par leurs exposés comme par leurs contacts, les compétiteurs offriraient des raisons de les choisir, ou pas, aux différents centres d’influence du pays. Ou du dehors, étant donné que les Syriens, grands électeurs reconnus, sauraient sans doute à quoi s’en tenir par rapport à leurs relations avec l’Amérique. Et quoi faire alors avec la présidentielle libanaise. Pour l’heure, ajoute la personnalité citée, la Syrie ne se préoccupe pas de la reconduction ou de l’élection d’un nouveau chef de l’État. Elle laisse toutes les éventualités ouvertes. Ce qui plonge les intéressés dans les affres d’un lourd suspense. Cette tension nerveuse étouffée est par elle-même explosive. Et malgré les pressantes recommandations de Damas, il est possible que la trêve vole en éclats à tout moment. Récupération D’autant que les opposants qui échappent, en principe, à l’influence politique syrienne ne sont pas concernés par la loi du silence radio. Ils estiment d’ailleurs qu’en l’imposant, la Syrie souhaite éviter que le débat entre Libanais n’aboutisse à un rejet aussi clair que définitif d’une solution parachutée. Autrement dit que le sujet de la présidentielle ne soit pratiquement tranché entre Libanais. Ce qui ferait perdre à la Syrie une carte importante en termes de négociations avec les States. Un risque d’autant plus accentué, poursuivent les opposants, que c’est le président Bachar el-Assad qui a cru devoir inviter lui-même les Libanais à s’exprimer. Le prenant au mot, ils y ont été de leurs prises de position, largement hostiles à l’amendement de la Constitution, en vue de la reconduction. Plus de 45 députés et ministres se sont ouvertement prononcés dans ce sens. Et bien d’autres, sans doute plus prudents, n’en pensent pas moins pareillement, avouent-ils en privé. Dès lors, la majorité des deux tiers nécessaire pour la révision est déjà inexistante. Pour inverser le mouvement, il faudrait une intervention syrienne flagrante. Qui paraît, pour le moment, exclue, car Damas ne veut pas rompre avec l’Occident, malgré les difficultés du dialogue. Sans compter que la Syrie ne souhaite pas se trouver contrainte de prendre parti pour un camp libanais contre l’autre. Elle préfère donc calmer le jeu, pour bien garder la main. D’où ce constat des opposants : l’on a bien permis aux Libanais de dire ce qu’ils pensent, mais cela ne signifie pas qu’on leur cède le pouvoir de choisir. Au moment voulu, la solution serait encore une fois téléguidée. En prenant ou non en compte l’avis de la majorité libanaise, selon qu’elle serait conforme ou non aux intérêts des décideurs. C’est ce que souligne d’ailleurs le patriarche Sfeir. Qui note que jusqu’à nouvel ordre, l’échéance présidentielle reste aux mains de parties non libanaises. Ajoutant que, jadis, les Libanais savaient qui allait être leur président. Tandis qu’aujourd’hui, certains d’entre eux attendent patiemment que le mot de passe leur tombe du ciel. Émile KHOURY
L’astuce est aussi simple qu’éprouvée : chaque fois que la Syrie décrète une trêve sur la scène politique libanaise, les protagonistes font mine de s’incliner. Et ne tardent pas à reprendre leurs querelles. En s’accusant réciproquement, pour se mettre à l’abri des foudres des démiurges, d’avoir ouvert le feu. On se demande donc si ce scénario classique ne va pas...