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Actualités - OPINION

Un tempo apaisant, aujourd’hui, place du Musée

Le chef d’orchestre, soucieux d’effets tranquillisants, sinon soporifiques, télécommande aujourd’hui, place du Musée, siège du Conseil des ministres, une prestation musicale sobre. Pour pallier le manque évident d’harmonie entre exécutants, il leur est demandé de faire le moins de tapage possible. Et d’apporter ainsi la preuve qu’ils respectent bien la trêve qui leur a été gentiment recommandée. Soit au cours des sauts qu’ils ont dû effectuer à Anjar, soit par des coups de fil ou par émissaires interposés. Cette reprise en main se fait, comme toujours, au nom de la stabilité, mère de détente. En principe, le citoyen doit y trouver son compte dans la mesure où les responsables, faute de pouvoir se crêper le chignon, seraient tentés de s’occuper en s’occupant des vrais problèmes, notamment économiques, du pays. Il y faut quand même un peu de désintéressement. Et beaucoup de sceptiques se demandent jusqu’à quand les dirigeants, obnubilés en leur for intérieur par la bataille de la présidentielle, pourront retenir leurs pulsions combatives. Ainsi, tous les sages conseils du monde, et des décideurs, n’ont pas pu empêcher Ghazi Aridi de se déchaîner contre les manipulateurs qui exploitent le filon de la lutte anticorruption. Pour se présenter en preux chevaliers blancs, alors même que, selon le ministre de la Culture, ils couvrent la pourriture. Mais Aridi, font valoir des professionnels, n’a pas lui-même ouvert le feu. Il n’aurait fait, selon eux, que commenter les propos en flèche tenus par le chef de l’État à Fiyadieh. On sait en effet que le président Lahoud a martelé qu’il n’y a pas de régime corrompu, mais des corrupteurs et des pourris sous tous les régimes. Engeance, ajoutait-il, que tout le monde connaît. Une attaque au pas de charge, comme il sied dans l’art militaire. La riposte d’Aridi a donc été vive. Cependant, il faut le souligner, sa réaction n’a été avalisée ni par son chef de file, Walid Joumblatt, ni par Rafic Hariri, qu’il avait l’air de défendre (et qu’il avait récemment accompagné, lors de la fameuse visite à Ghazalé). Les deux leaders ont fait savoir autour d’eux que les sorties du ministre ne reflétaient pas leurs vues propres et se trouvaient enregistrées à titre strictement personnel. Une position conforme aux engagements pris, suite aux recommandations de Ghazalé, de mettre une sourdine, voire un terme, aux empoignades verbales sur la scène politique libanaise. Sourde rancœur C’est ce même esprit d’apaisement qui devrait prévaloir aujourd’hui en Conseil des ministres. Mais les intéressés ont du mal à dissimuler les ressentiments qu’ils éprouvent. En effet, les critiques du président Lahoud, le 1er août, ont été vite interprétées comme des attaques quasi frontales contre des pôles déterminés. D’autant que, selon des sources informées, le président aurait clairement déclaré à un leader présent à ses côtés, mais pas au second, qu’il ne le visait pas. Les loyalistes soutiennent d’ailleurs que les gens ont tort de laisser voir qu’ils se sentent pris à partie. Parce que dans ce cas, avancent ces subtiles tacticiens, on peut penser qu’il n’y a pas de fumée sans feu. Donc celui qui craindrait d’être désigné comme coupable aurait quelques raisons de culpabiliser. C’est en somme une variante de l’adage français : qui se sent morveux se mouche. Au-delà de la perfidie à peine voilée de telles considérations, les arguments de ces loyalistes offrent quand même l’avantage de circonscrire le sinistre au lieu de l’attiser. Ce qui aurait été le cas s’ils avaient été encore plus loin que le chef de l’État dans la voie de la dénonciation. Au contraire, ils disent que le président n’avait personne de précis en tête et évoquait un mal général connu. Ajoutant qu’on ne doit pas oublier qu’il s’adressait à des officiers fraîchement promus, pour les orienter et leur rappeler leur devoir à l’égard de l’application des lois, loin de toute influence politicienne. Ces justifications, des opposants les jugent friables, pour ne pas dire bancales. Pour eux, la logique élémentaire veut que le chef de l’État n’aurait certainement pas tenu à Fiyadieh les mêmes propos ciblés s’il n’y avait pas eu la présidentielle en jeu. Ce qui signifie, d’après ces contestataires, qu’en passant à l’offensive, le président confirme qu’il n’a pas l’intention de dételer. D’autant qu’il a mis l’accent sur son attachement aux engagements pris dans le discours d’investiture, il y a six ans. Les opposants ajoutent qu’un tel acte de foi ne se comprend que dans la durée. C’est-à-dire qu’il prend tout son sens si le régime a encore devant lui six autres années, et non pas quelques brèves semaines. Donc, toujours d’après ces sources, la reconduction est bien en vue, du côté de Baabda. À ce propos, cependant, les opposants pensent que les loyalistes jouent assez maladroitement la partie. En montrant les crocs, au lieu de se montrer conciliants, ils braquent encore plus une opinion qui ne leur est pas naturellement favorable. Ou , plus exactement, que l’idée d’une dérogation constitutionnelle à des fins particulières hérisse. Philippe ABI-AKL
Le chef d’orchestre, soucieux d’effets tranquillisants, sinon soporifiques, télécommande aujourd’hui, place du Musée, siège du Conseil des ministres, une prestation musicale sobre. Pour pallier le manque évident d’harmonie entre exécutants, il leur est demandé de faire le moins de tapage possible. Et d’apporter ainsi la preuve qu’ils respectent bien la trêve qui...