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Actualités - OPINION

La capitale, mère des batailles

C’est un peu normal : Beyrouth accapare la vedette. Il en aurait été autrement, sans doute, si à l’Est l’opposition avait pu s’unifier. Pour une confrontation « idéologique » avec le pouvoir. Ou, plutôt, avec le système placé sous tutelle. Mais il n’en pas été ainsi. Et dès lors, l’intérêt se reporte sur un autre enjeu politique : la carrière de Hariri. Qui se joue, pour ce Sidonien, dans son fief (« usurpé » selon ses contempteurs) de Beyrouth. En 1998, il y avait souverainement, mais avec l’assentiment de tous ou presque, présidé au montage de la mosaïque municipale. Cette fois, il a plus de mal à disposer les pièces comme il l’entend. En fait, il a dû, sous l’amicale pression des décideurs, avaler une couleuvre de taille : concéder deux sièges à Tammam Salam. Qui avait été reçu auparavant par les hautes autorités syriennes. Peut-être sur suggestion d’autres hautes autorités moins éloignées. Pourquoi Hariri en perte de vitesse ? Sans doute parce qu’en 2000 il a tout écrasé aux législatives. Alors les décideurs estiment qu’il faut un peu élaguer un arbre trop vite, trop haut, poussé en graine. Ils n’aiment pas, on le sait depuis longtemps, voir des têtes trop dépasser : ça nuit à la visibilité. Mais ils n’apprécient pas non plus une trop forte dépréciation de valeurs aussi sûres, côté entregent, que Hariri. Ils lui laissent donc le haut du pavé à Beyrouth, pour qu’il dose la liste consensuelle. Et lui permettent de faire la fine bouche côté Kataëb. Ce qui est, du reste, symptomatique d’un climat sourdement empoisonné au sein du pouvoir. L’enjeu occulte étant à moyen terme la présidentielle. Et, en amont, les législatives de l’an prochain. C’est dans ces perspectives que les municipales revêtent à Beyrouth une importance qu’elles n’ont pas ailleurs. Elles semblent en effet devoir préfigurer les alliances de base pour les législatives. Non seulement dans la capitale mais également dans d’autres régions où les mêmes forces politiques auraient intérêt à coopérer. Un exemple entre mille : si d’aventure Hariri devait s’accorder, au niveau de la députation, avec le Hezbollah (ce qui paraît un peu difficile pour le moment), cela pourrait concerner autant Ghobayré, hors Beyrouth, que Basta. En tout cas, dans la capitale, à part le cas Hariri, bien des pôles entendent dès les municipales montrer qu’ils ne sont pas, ou plus, aussi faibles qu’on peut le croire. Il y a donc une tendance générale à faire de ce scrutin printanier un baromètre pour divers rapports de force. Entre lahoudistes et haririens, certes, mais entre divers partis également. Dont certains, le club des six plus précisément, font cause commune face au milliardaire. En s’appuyant non pas sur la Syrie en tant que telle, mais sur ses recommandations en faveur d’une formule de consensus. Cependant, il faut le répéter, Hariri n’a pas reçu d’injonction concernant les Kataëb de Karim Pakradouni. Il refuse donc, jusqu’à cette heure, de réintégrer leur représentant, Jerbaka, dans la liste dite principale qu’il va coacher pour l’hôtel de ville. Le président du Conseil a explicité tout récemment, et tout longuement, sa position à l’officier syrien traitant du dossier libanais, le général Ghazi Rustom, reçu de nuit à Koraytem. Rencontre « de touche finale » qui ne s’est terminée qu’à l’aube d’hier jeudi. Parallèlement (est-ce une forme de pression ?) des sources ont fait courir ce bruit : après les municipales, Hariri serait remplacé au Sérail par une personnalité plus cool et plus coulante. Dans la perspective de la présidentielle, entendre de la reconduction. Mais les officiels s’accordent à affirmer, en se référant aux avis syriens, qu’aucun changement de cabinet n’est envisagé avant la présidentielle. Certains ajoutent qu’il faut se contenter de voir l’hégémonie haririenne sur Beyrouth fortement réduite. Via Tammam Salam et les six. C’est un lot de consolation tout à fait relatif : après tout Hariri n’a jamais cessé d’inviter Salam, et même Sélim Hoss, à une entente générale, d’une part. D’autre part, il reste assez fort pour faire obstruction aux Kataëb proches de Baabda, ainsi du reste qu’aux Ahbache. De plus, il a opposé une fin de non-recevoir très sèche à ceux qui demandaient que son fidèle Abdel Meneem Ariss cède la présidence du conseil municipal à un autre, après trois ans (sur six) d’exercice. Ariss semble donc assuré d’un nouveau sexennat. Tous les présidents ne peuvent en dire autant. Philippe ABI-AKL
C’est un peu normal : Beyrouth accapare la vedette. Il en aurait été autrement, sans doute, si à l’Est l’opposition avait pu s’unifier. Pour une confrontation « idéologique » avec le pouvoir. Ou, plutôt, avec le système placé sous tutelle. Mais il n’en pas été ainsi. Et dès lors, l’intérêt se reporte sur un autre enjeu politique : la carrière de Hariri.
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