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Actualités - OPINION

L’ÉDITORIAL de Issa GORAIEB Les surmenés

Les vacances, c’est sacré. Elles sont essentielles à votre équilibre, à votre bonne forme physique et mentale... et, par voie de conséquence, à votre productivité au sein de l’entreprise : c’est ce que vous expliquera suavement votre directeur du personnel si vous essayez de vous faire plutôt rémunérer ce sacro-saint congé annuel en arguant que les temps sont bien durs, que quelques heures de travail supplémentaires ne vous effraient pas et qu’un petit extra serait le bienvenu. Il faut croire cependant que moins on les a méritées ces vacances, et plus elles en deviennent sacrées. Fatigués, les héros publics ? Certes, mais ce n’est pas à force de vous avoir servis, d’avoir veillé nuit et jour à votre tranquillité et votre bien-être. Et quand l’essentiel de l’activité politique se réduit à pourfendre ses partenaires-rivaux tout en se gardant de leurs coups, il y a forcément surmenage. Rien de plus normal, dès lors, que le président de la République aille se dorer au soleil de la Côte d’Azur, une fois expédiées ses actuelles visites officielles en Pologne et en Biélorussie. Ou que le Premier ministre s’offre à son tour un peu de farniente en Sardaigne ou ailleurs. Il en va de même pour les deux douzaines et demie de membres d’un gouvernement éclaté, frappé de paralysie et pour lequel ces vacances estivales n’affectent en rien, de toute manière, la singulière vacance du pouvoir dont il est la triste image. Idem enfin pour le Parlement qui, sans égard pour le calendrier, est depuis belle lurette déjà une assemblée d’aoûtiens : de dénoncer cette léthargie de l’Exécutif ne décharge guère d’ailleurs M. Nabih Berry de sa part de responsabilité dans le vide effrayant qui nous entoure. Car que laisse derrière lui tout ce beau monde qui part en vacances ? Une République en hibernation chaude si l’on peut dire, un pays où tout ou presque est suspendu, pétrifié, sur fond de marasme économique, de malaise social et d’incertitude politique. Une dette publique considérable, la grogne à répétition des syndicats, le personnel médical dans son ensemble menaçant de descendre dans la rue pour arracher son dû à une CNSS défaillante, à l’image d’une Administration qui, pour sa part, n’a jamais cessé d’être en vacances : tout cela ne vaut apparemment guère que nos illustres surmenés bouleversent leur programme de loisirs, qu’ils emploient ce qui reste de leur énergie à y apporter des solutions. Ou qu’ils fassent semblant du moins, ce qui ne devrait pourtant pas leur être trop difficile. Mais alors, que vous donnera-t-on à lire tout au long de cet été ? Le choix semble devoir se limiter à ces médiocres thrillers que sont l’échéance présidentielle et la vertueuse et subite campagne anticorruption enclenchée la semaine dernière : c’est-à-dire un peu tard pour étoffer crédiblement les états de service du régime finissant ; et un tantinet trop tôt pour faire office de programme, dans la perspective d’une prorogation de l’actuel sexennat. Là, il n’y a pas de relâche qui tienne ; et les épisodes promettent d’être nombreux, en attendant que se prononce l’oracle syrien. N’abusez pas toutefois de toute cette revigorante littérature : vous risqueriez d’y gâcher... vos vacances.
Les vacances, c’est sacré. Elles sont essentielles à votre équilibre, à votre bonne forme physique et mentale... et, par voie de conséquence, à votre productivité au sein de l’entreprise : c’est ce que vous expliquera suavement votre directeur du personnel si vous essayez de vous faire plutôt rémunérer ce sacro-saint congé annuel en arguant que les temps sont bien...