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Actualités - REPORTAGE

Six ans après avoir connu l’enfer, la petite fille torturée n’en a pas fini avec les misères Fatmé recolle les morceaux de sa vie dans l’indifférence générale

Des vies gâchées, il y en a tant dans le monde. Mais celle-là fait plus mal que les autres, car, à un moment donné, Fatmé avait ému le Liban, avant de retomber dans l’oubli et dans la misère. Qui se souvient encore de la petite employée de maison torturée par son employeuse ? Son cas avait pourtant mobilisé les Libanais, et même un des fils du roi Fahd d’Arabie. Pendant des semaines, elle avait fait la une de l’actualité. Politiciens et dames impliquées dans l’action sociale avaient alors promis de lui assurer un avenir meilleur pour compenser les malheurs déjà subis dans sa jeune vie. Puis les médias se sont intéressés à d’autres drames, et Fatmé a été abandonnée à son sort, celui d’une pauvre fille traumatisée, vivant entre son père, sa marâtre, sa mère et sa dizaine de frères et sœurs, dans un véritable taudis à l’extrême nord du Liban. Six ans après les faits, qui se soucie encore de cette adolescente, qui a vite appris, à ses dépens, à ne pas croire les adultes, surtout s’ils sont puissants ? C’est une histoire banale dans cet autre Liban, dont certains veulent ignorer jusqu’à l’existence. Il faut faire preuve de détermination pour tenter de retrouver la petite Fatmé. La plupart des personnes interrogées ne se souviennent plus de son histoire, qui avait pourtant fait pleurer le Liban six ans auparavant. Mais les gens ont la mémoire courte, et puis il y a tant de malheurs... Son cas est cependant exemplaire et illustre à merveille les malheurs d’une enfance maltraitée, abandonnée et victime de la méchanceté des adultes, du manque de sérieux et de sincérité des responsables, et des failles de la justice. Bref, une histoire tellement sordide, qui, grâce à la mobilisation des médias, avait pris une allure de conte de fées. Dans un magnifique élan de solidarité, toutes les bonnes volontés du Liban, et même d’ailleurs, s’étaient donné rendez-vous pour aider la petite fille à dépasser le drame et à changer le cours de sa vie. Six ans après, que reste-t-il des belles promesses ? Pour le savoir, nous avons voulu retrouver l’héroïne de l’histoire. Une peine allégée par la Cour de cassation À Tripoli, où avait eu lieu le drame, Fatmé ayant été transportée d’urgence à l’hôpital islamique, en octobre 1998, très rares sont ceux qui acceptent de se souvenir de l’affaire. « C’est fini, la justice a suivi son cours et l’employeuse a été condamnée. Pourquoi en parler encore ? » est la seule réponse obtenue. Si l’on fouille les archives, on se souvient en effet que la cour d’appel du Liban-Nord avait condamné l’employeuse tortionnaire, Hanane Yéhia, à onze ans de prison et au versement d’un montant de 25 millions de livres d’indemnités à la petite. Quant à son époux, Marwan Yéhia, il avait été condamné à un an de prison et au versement d’une indemnité réduite. Mais la Cour de cassation, elle, avait été plus clémente, surtout que l’accusée principale avait fait preuve de bonne volonté. Enceinte, elle avait promis d’accepter les traitements suggérés. Finalement, le verdict est tombé : six ans de prison pour Hanane et le versement d’indemnités s’élevant à 20 millions de livres. Quant à l’époux, il avait été acquitté. Enfin, le père de la petite, Moukheiber Jassem, avait été condamné à trois ans de prison et à une amende d’un million de livres pour avoir violé les dispositions de la loi interdisant le travail des enfants de moins de 13 ans. C’est donc ayant en tête tous ces éléments que nous avons pris le chemin de Karkha, selon la carte dernier village à la frontière nord libano-syrienne. Tripoli, Halba, Kobeyate, Chadra... Les villages défilent dans un paysage verdoyant et la voiture poursuit sa montée, alors que l’asphalte se fait de plus en plus rare. À l’approche de Wadi Khaled, il disparaît même complètement, et les seuls points de repère sont les barrages des SR syriens. Ce Liban-là ressemble à un monde totalement inconnu, des chemins de terre, des maisons qui tiennent plus de l’étable que du domicile et au milieu de tout ce paysage tout droit sorti du Moyen Âge, un « Salon soussou pour dames » (en français s’il vous plaît) à Machta-Hammoud. Pour quelles clientes ? Nous ne le saurons pas car nous traversons le village à l’heure de la prière, et seul le haut-parleur de la mosquée indique qu’il y a des vivants dans ce coin perdu. Le chemin continue, de plus en plus difficile, et nous avons l’impression de ne jamais pouvoir atteindre notre destination. À mesure que nous nous approchons de la frontière syrienne, les motos flambant neuves se multiplient. Avec les vans cabossés, elles sont l’unique moyen de locomotion des habitants. Les motos sont bien sûr dépourvues de plaques d’immatriculation. Au détour d’un virage, nous nous retrouvons face à un chemin plus carossable que les autres. C’est par là que les clandestins entrent en Syrie, à pied et à travers champs. La route s’arrête devant la mosquée Enfin, c’est le dernier village, aisément reconnaissable parce que la route s’y arrête. Mais aucune pancarte n’indique son nom. Karkha commence par sa mosquée qui a tout l’air abandonnée. Au-delà, dispersées au hasard, sans la moindre route ni même un sentier, quelques maisons délabrées. Apparemment, le village semble désert, écrasé sous la chaleur du soleil aux rayons destructeurs. Même la voiture, garée devant la mosquée, n’attire pas les curieux. Finalement, c’est grâce à une femme qui suspend son linge que nous trouverons enfin la maison de Fatmé : une petite cabane à laquelle on a visiblement rajouté une chambre en béton. L’été est venu très vite à Karkha, car la grosse installation de la chauferette au mazout – la sobia – est encore en place ainsi que les tapis qui recouvrent le sol de la chambre à coucher des quinze personnes qui habitent sous ce toit. La salle principale, elle, n’a ni tapis ni carrelage, rien que des murs et un sol de béton nus et gris, sinistres. Une dame en abaya, à l’allure imposante et au regard perçant, accueille les visiteurs. C’est Rachidé, la première épouse de Moukheiber Jassem, le père de Fatmé. Autoritaire, elle est visiblement le chef de la maisonnée et parle à la place de tout le monde. Elle commence par invectiver les journalistes qui, selon elle, ont abandonné Fatmé et n’ont rien fait pour elle. Au son de sa voix, des enfants pointent le bout de leur nez. Il y en a près de six, qui déboulent sans cesse, avec des frimousses sales et de beaux yeux verts écarquillés de curiosité. Rachidé ne leur adresse pas un regard. Elle est la mère des trois aînés, deux garçons et une fille, déjà des adultes. Les neuf autres enfants, dont Fatmé est l’aînée, ont été mis au monde par Wardé, la femme aux yeux verts, totalement dominée, semble-t-il, par Rachidé. Le père, Moukheiber Jassem, un bel homme d’une cinquantaine d’années, est heureux comme un pacha dans cette tribu où tout le monde est à son service et où Rachidé règne en maîtresse. Il n’est pas besoin d’être fin psychologue pour comprendre comment fonctionne cette famille, où douze enfants doivent cohabiter avec trois adultes, sans la moindre intimité. Dans la grande salle sombre, tous sont là, pieds nus, assis par terre ou sur des chaises en plastique. Sauf Fatmé. Chacun veut raconter son histoire, mais elle n’est pas là pour confirmer ou infirmer, se cachant par timidité. « Ma fille est traumatisée, dit le papa. Elle ne fait plus confiance aux gens. Elle est complexée. » Il n’a pas encore digéré cette histoire. « J’ai fait trois mois de prison et j’ai payé une amende d’un million de livres, et ma fille n’a rien reçu. Tout le monde lui a menti. » Rachidé renchérit : « Elle n’a pas obtenu un sou. Où sont passées les belles promesses ? » Elle se lance dans une interminable complainte, à peine interrompue par l’arrivée d’une adolescente menue et timide aux grands yeux verts insondables. Frêle et timide, elle cache ses pieds Fatmé est la seule de la famille Jassem à ne pas être pieds nus. Au contraire, malgré la chaleur, elle est chaussée de grosses bottes. Depuis qu’elle a perdu huit orteils, elle n’ose plus découvrir ses pieds, et même avec les bottes, elle cherche à les dissimuler sous la chaise. Fatmé est encore plus touchante que lorsqu’on la voyait pleurant dans son lit d’hôpital ou affrontant de sa voix fluette son ancienne tortionnaire devant le tribunal. D’abord, six ans après, elle paraît toujours aussi menue. Et nous qui craignions qu’elle n’ait été mariée entre-temps... Questionnée sur son âge, elle répond en rougissant : « Treize ou quatorze ans. » Interrogée, sa mère ne peut pas être plus précise. « Vous savez, j’ai eu tellement d’autres enfants depuis. Je ne m’en souviens plus. » Autrement dit, au moment du drame, en octobre 1998, Fatmé avait six ou sept ans, alors que la presse avait parlé de dix ans. Les parents avaient donc triché sur son âge pour atténuer l’impact de placer une petite fille de six ans. Nous sommes encore sous le choc de cette révélation et déjà le papa cherche à se défendre. « Vous savez, lorsque j’ai accepté de placer ma fille chez Hanane Yéhia, elle m’avait dit qu’elle l’enverrait à l’école et qu’elle avait juste besoin d’elle pour tenir compagnie à son bébé d’un an. Je n’aurais jamais pu imaginer qu’elle se comporterait ainsi. Elle est venue jusque chez moi pour me demander de lui confier ma fille, en affirmant être une proche parente du député Mohammed Yéhia (originaire de la région). Elle était très aimable. » Fatmé a-t-elle gardé de la rancœur envers ses parents ? « Non, dit-elle avec détermination. Je suis partie de mon plein gré. Personne ne m’y a obligée et je ne pouvais pas savoir qu’elle se comporterait ainsi. » Fatmé n’aime pas évoquer les moments terribles vécus chez son employeuse. « J’ai déjà tout raconté devant le juge et au tribunal. J’essaye d’oublier, et la plupart du temps, je n’y pense pas. » Les indemnités n’ont jamais été payées Depuis sa confrontation avec Hanane Yéhia devant la cour, Fatmé n’est plus sortie de son village. Malgré les promesses, plus personne n’est venu la voir. Ni psychologue ni médecin. Elle a été livrée à elle-même et à ses parents. Pourtant, le tribunal avait condamné son père, coupable de l’avoir placée alors qu’elle n’avait pas l’âge limite (13 ans). « Si j’étais aussi mauvais, pourquoi me l’aurait-on renvoyée ? Pourquoi aucune association ne l’a-t-elle prise en charge ? » s’étonne le papa qui enfonce ainsi un peu plus le clou. En fait, ce qui choque le plus la famille Jassem, c’est que Mme Yéhia n’a jamais versé un sou de la somme prévue en guise d’indemnités. « Alors que moi, j’ai tout payé, insiste le père. Et c’est le droit de Fatmé d’avoir cette somme, une petite compensation pour les souffrances subies. » Pendant tout cet échange, Fatmé ne pipe mot. Avec ses yeux graves, trop grands pour son visage, elle écoute attentivement. Elle voudrait en fait qu’on ne parle plus de cette affaire. Pourtant, elle ajoute avec un doux sourire : « J’ai gardé tous les jouets qui m’avaient été offerts sur mon lit d’hôpital. Des peluches, des poupées, des chaussons. Mes frères et sœurs en profitent maintenant. » Fatmé est très protectrice à l’égard de ses sœurs et frères. Elle se lève sans cesse pour s’occuper d’eux et surtout pour éviter d’être constamment observée. Mais elle refuse catégoriquement de se faire photographier. « Je ne veux pas. Ni moi ni mes frères et sœurs. » Elle hurle presque. Cette adolescente qui paraît si douce et si renfermée est capable d’un grand entêtement. En elle, il y a comme une grande cassure. Elle est d’ailleurs très différente du reste de sa famille, silencieuse, ordonnée, tout est intériorisé chez elle. Lorsqu’elle écoute son père ou sa belle-mère parler, rien ne filtre sur son visage, même si elle affiche une grande loyauté à leur égard. Sa mère, elle, est totalement effacée, servant le café, arrangeant les chaises, mais cédant visiblement le leadership de la maisonnée à la première épouse de son mari. Hraoui, Farès, Fadel et les autres Celui-ci se lance dans une longue diatribe sur les responsables. « Lorsque Fatmé était à l’Hôpital américain, tout le monde est venu la voir et nous a fait plein de promesses. Le président Élias Hraoui m’a appelé et m’a dit : “Si tu as besoin de quoi que ce soit, donne un coup de pied à la porte et entre. Ne te laisse arrêter par personne”. J’ai voulu me rendre chez lui. Je n’ai jamais pu dépasser la grille noire. Même chose pour tous les autres. Lorsque j’ai tenté de relancer le vice-président du Conseil, M. Issam Farès, un de ses conseillers m’a dit “Maurice Fadel a promis de prendre Fatmé en charge. Allez le voir”. » Maurice Fadel avait en effet promis de subvenir à tous les besoins de la petite jusqu’à son mariage. Il a effectivement payé un million de livres chaque année pendant deux ans, et après, plus rien. L’émir Fayçal ben Fahd, qui avait été ému par son cas et qui avait promis de la prendre en charge, a effectivement payé les frais médicaux à l’Hôpital américain, puis le père a été convoqué à l’ambassade d’Arabie saoudite où on lui a remis un chèque de 10 000 dollars. Bien entendu, Moukheiber Jassem n’en a pas profité pour ouvrir un compte bancaire au nom de sa fille. Il a tout dépensé. « J’ai fait faire des travaux à la maison. Il fallait bien, et l’argent s’en va très vite. Maintenant, il faudrait des chaussures spéciales pour Fatmé et nous n’avons pas les moyens de les lui acheter. » Le papa a tenté de relancer l’émir, mais on lui a dit qu’il était mort peu de temps après le drame de Fatmé. Et la porte de l’ambassade s’est refermée pour Moukheiber Jassem. Un beau jour, des visiteurs sont venus le voir dans son village, envoyés par Mme Randa Berry. Ils ont promis de revenir pour s’occuper de la petite ou l’envoyer dans une association spécialisée. Mais ils n’ont plus jamais donné signe de vie. Le père se lamente : « Je ne peux même pas me rendre à Tripoli pour relancer les avocates, car le trajet coûte au moins 10 000 livres. » Les avocates Ghada Ibrahim et Salima Rifé s’étaient spontanément proposées pour défendre la petite Fatmé. Mais c’est surtout Mme Ibrahim qui s’était démenée pour la petite, s’occupant d’elle avec tendresse et essayant de lui redonner confiance en elle face aux juges et aux accusés. Mme Ibrahim est restée en contact avec Fatmé, mais les soucis du quotidien étant ce qu’ils sont, les relations se sont quelque peu espacées. Interrogée par L’Orient-Le Jour, Ghada Ibrahim a déclaré qu’elle tenterait de relancer l’affaire du paiement des indemnités, mais lorsqu’elle avait essayé d’obtenir l’exécution du jugement, on lui avait dit que Mme Yéhia ne possède rien en son nom et qu’elle n’est pas solvable. Maintenant qu’elle s’apprête à être libérée, ayant bientôt purgé sa peine, il faudra tenter de remettre cette question sur le tapis. Mme Yéhia, qui était enceinte au moment du procès, a mis au monde un enfant en prison, ce qui avait poussé les juges à être plus indulgents à son égard, la tendance générale étant de rapprocher autant que possible un enfant de sa mère. Hanane bientôt libre Les parents de Fatmé ne décolèrent pas. Ainsi, la tortionnaire, dont on n’a jamais vraiment compris les motivations puisque, selon les experts médicaux, les médicaments qu’elle prétendait prendre n’avaient aucune influence sur son comportement, retrouvera bientôt la liberté et reprendra le cours de sa vie, alors que celle de leur fille est gâchée. En fait, comme le lance le fils aîné de Moukheiber Jassem, Aref, toute la famille pensait pouvoir vivre des mannes qui allaient pleuvoir sur Fatmé. Le père, un berger, qui peut occasionnellement travailler la terre, ne fait plus rien et les jeunes sont sans travail, sans voiture, entassés dans ce taudis qui leur sert de maison. Mais rien n’est venu. Et la personne la plus détestée dans cette famille est incontestablement Nayla Moawad, qui avait violemment critiqué le père pour avoir placé sa fille dans une famille, mais sans jamais chercher à aider Fatmé ou à combattre ses pratiques chez les autres. « Vous savez, déclare Aref, dans ce coin, tout le monde multiplie les enfants pour les placer dans les familles. C’est la principale ressource. Et nul ne vient jamais les condamner pour cela. Seulement mon père a dû subir les foudres de Mme Moawad, sans que rien ne soit fait pour aider les familles à gagner leur vie. Au Liban, les responsables ne font rien d’autre que parler. Lorsque les médias s’intéressent à une affaire, ils se précipitent pour avoir le beau rôle, mais cela ne va jamais plus loin. Le pauvre n’a le droit que de payer. Hanane Yéhia ne versera pas un sou et mon père, lui, a dû s’acquitter d’une amende. Voilà la justice du Liban. Et toutes ces dames de la haute société qui se font photographier avec des enfants comme de bonnes fées, qu’ont-elles fait pour Fatmé, qui, malgré son jeune âge, a bien plus souffert que des gens dans une vie entière ?... Lorsqu’on a dit à une responsable : « si on ne fait rien, la vie de Fatmé sera gâchée », elle a haussé les épaules. « Mais de toute manière, qu’aurait été sa vie : mariée à un pauvre hère du village, elle aurait eu une dizaine d’enfants et voilà »... Tant de cynisme, c’est presque incroyable. Imaginez que mon père a été voir Bahia Hariri qui lui a dit : demandez-moi ce que vous voulez, mais pas de l’argent. À qui faut-il donc demander de l’argent ? Aux pauvres ? » Fatmé écoute sans rien dire. Dès qu’on aborde son drame, elle se referme comme une huître. Elle se lève pour s’occuper de ses frères et sœurs, mais accepte de répondre à une question sur son avenir. « Je voudrais être institutrice. J’essaie d’être brave à l’école. J’ai des amies à l’école et j’aime beaucoup les maîtresses. » Pour elle, l’école, c’est l’espace de rêve et d’évasion. C’est avec les livres qu’elle essaie d’oublier ce qui lui est arrivé et qu’elle quitte en rêve son village. Elle demande timidement si elle peut parler à son avocate, et une fois le numéro composé, elle s’accroche au portable, le visage soudain illuminé. Fatmé méritait mieux que notre oubli. Si elle a trop bon cœur pour garder de la rancœur ou de la haine, elle restera à jamais marquée par sa terrible expérience et surtout par l’immense médiatisation et le tout aussi immense silence qui l’a suivie. Une terrible leçon pour une enfant, entourée de parents qui ne se soucient que de leur propre confort et dont la vie s’écoulera comme un interminable jour sans pain parce que les adultes ne tiennent pas parole. Il y a des dizaines de Fatmé au Liban. L’une d’elles au moins aurait pu être sauvée si l’indifférence et l’égoïsme ne régnaient pas en maîtres sur les cœurs des Libanais. Scarlett HADDAD
Des vies gâchées, il y en a tant dans le monde. Mais celle-là fait plus mal que les autres, car, à un moment donné, Fatmé avait ému le Liban, avant de retomber dans l’oubli et dans la misère. Qui se souvient encore de la petite employée de maison torturée par son employeuse ? Son cas avait pourtant mobilisé les Libanais, et même un des fils du roi Fahd d’Arabie. Pendant...