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Actualités - RENCONTRE

RENCONTRE - À Beyrouth, pour un concert unique au Grand Sérail Claire Levacher, Madame le chef d’orchestre : « La musique transcende notre condition humaine… »

Elle a dirigé, hier dimanche 22 juin, l’Orchestre symphonique national libanais dans la cour extérieure du Grand Sérail de Beyrouth. Double innovation: un concert en plein air dans ce lieu majestueux et l’Orchestre symphonique placé sous la houlette de Madame le chef d’orchestre (oui elle préfère cette désignation à Madame la chef… «C’est un peu lourd », dit-elle dans un petit rire. Rencontre donc avec Claire Levacher qui va « officier », en clôture de la « France expose » et à la veille de la fête de la musique, sous un ciel d’été, avec des partitions de Bizet, Mozart et Brahms. Pourquoi ce choix ? «J’ai proposé autre chose, confesse t-elle, mais on a préféré un menu pour grand public donnant surtout la priorité à la tradition symphonique. » Une jeune femme toute simple et presque frêle (« une acharnée de travail », se définit-elle), avec des cheveux blonds, coupés mi-courts, un peu à la Jeanne d’Arc (il faut préciser qu’elle est rouenaise), un chemisier bleu et un pantalon bleu-marine, le tout pour un regard clair, des traits mobiles et surtout une grande douceur dans la voix et les gestes. Être femme et chef d’orchestre pose-t-il des problèmes de direction ? « Je n’ai jamais pensé à cette question, confie-elle. Au niveau musical je ne crois pas qu’il y a une difficulté; c’est la fonction du pouvoir qui est discutable. Je n’ai jamais eu de difficulté de contact. Et puis la musique n’est ni homme ni femme »… Et c’est quoi pour vous la musique ? « Un art qui nous permet de transcender notre condition humaine… » Mais pour mieux cerner et comprendre cette passion de la musique chez une femme qui est tout aussi bien mère et épouse, Claire Levacher évoque son parcours et ses débuts. « Tout a commencé à cinq ans et demi avec mes cours de piano et surtout depuis qu’on m’avait inscrit au Conservatoire à mi-temps, tout comme mes frères et sœurs d’ailleurs. Mais mon professeur, avec qui j’avais une profonde relation maternelle, m’a été d’une grande inspiration au travail. C’est vers douze ans, sans savoir exactement pourquoi, que j’avais déjà décidé de faire de la “ direction”. Inutile de dire que mes parents ne m’ont pas prise au sérieux. Et pourtant c’était très sérieux. On ne peut plus sérieux! Alors, je demande ce qu’il faut faire pour tracer cette voie. Écritures, harmonies et sciences de la composition me disent mes supérieurs au Conservatoire. Alors, je m’acquitte de mes tâches jusqu’au moment de passer un séjour d’un an et demi au Michigan (sous la férule de Gustav Meir) aux États-Unis pour un cours de perfectionnement, et puis ce sera Vienne (sous les directives de Leopold Hager). À Trévisse, je gagne mon premier concours, et après un autre à Tokyo, j’assume le poste de professeur d’initiation à la direction du Conservatoire national symphonique de Paris. Cela dure cinq ans et me voilà actuellement directeur musical de l’Orchestre des lauréats du Conservatoire de Paris.» A-t-elle une préférence pour certaines partitions ou aime-t-elle diriger particulièrement les œuvres de certains compositeurs? « Avant Bach, je n’ai pas beaucoup de recherche stylistique. Mozart est trop difficile pour moi (!). J’aime sans nul doute les romantiques… Schubert. Mais aussi Mahler... Sans oublier mon étiquette française : Debussy, Ravel... Ce qui est important, c’est le lyrique… Carmen, La Traviata.» Et comment a-t-elle trouvé l’Orchestre national libanais et le pays ? « L’Orchestre symphonique libanais a une énergie remarquable. Même trop d’énergie à mon sens, qui va parfois jusqu’à l’exaltation. Il est surtout d’une discipline sans faille et extraordinairement ouvert. Donner un concert dans ce cadre prestigieux est magnifique… Quant au Liban, c’est mon second séjour ici, le premier étant mon passage à Baalbeck pour accompagner l’Orchestre des lauréats pour la prestation de Carmen. L’accueil qui est réservé aux étrangers est fabuleux (probablement à cause de ces liens ancestraux avec la France). Je me sens facilement intégrée ici. On a l’impression d’être des cousins... On devient vite familier et c’est agréable… L’abord des gens si chaleureux, la gastronomie si riche (délicieux mézzés avec mention pour la purée d’aubergines!), plus une ville sur la mer fait que tout cela est spécial… Et puis, comme n’importe quelle rencontre, c’est toujours unique.» A-t-elle le trac avant un concert ? « Oui, mais pas comme avec un piano. Je n’ai pas la patte pianistique. Mais avec l’orchestre c’est un peu différent: comme je suis dos au public, j’en arrive à l’oublier... C’est sûr je ne suis pas pianiste mais je ne sais pas si je suis chef d’orchestre ! » Jolie pirouette maestro ! Et modestie quand tu nous tiens, tiens ! Edgar DAVIDIAN
Elle a dirigé, hier dimanche 22 juin, l’Orchestre symphonique national libanais dans la cour extérieure du Grand Sérail de Beyrouth. Double innovation: un concert en plein air dans ce lieu majestueux et l’Orchestre symphonique placé sous la houlette de Madame le chef d’orchestre (oui elle préfère cette désignation à Madame la chef… «C’est un peu lourd », dit-elle...