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Actualités - CHRONOLOGIE

Le subtil jeu d’équilibrisme de Poutine

Au G8 de Sea Island, Vladimir Poutine a soutenu George W. Bush sur l’Irak, mais sans abonder dans son sens sur le rôle de l’Otan et la dette de Bagdad, et il est resté prudent sur son idée de « Grand Moyen-Orient ». À deux ans de prendre la présidence du G8, la Russie joue un subtil jeu d’équilibre, consistant à rester en bons termes avec Washington sans pour autant lui faire de concessions au détriment de ses intérêts. Détendu et souvent souriant sur la véranda d’un pavillon au milieu de palmiers, face à l’Atlantique, le président russe n’a pas hésité à prendre la défense de son homologue américain à propos des critiques dont sa politique irakienne fait l’objet aux États-Unis. « C’est de la politique interne. Les adversaires politiques (démocrates) de Bush n’ont aucun droit moral de critiquer sa position : en leur temps, ils ont fait la même chose, il suffit de nous rappeler les bombardements en Yougoslavie » sous la présidence Clinton, dit-il. La Russie a par ailleurs approuvé le document du G8 sur le « Grand Moyen-Orient », mais en soulignant que Washington avait dû d’abord revoir sa copie en profondeur pour éviter d’imposer d’en haut des réformes d’importation. Et pour marquer le coup, elle a refusé de verser son obole à un fonds de 100 millions de dollars créé pour favoriser la démocratie. « En attendant de voir si la Russie participe réellement aux décisions » sur son utilisation, a précisé M. Poutine. De même, Moscou n’a pas suivi Washington qui souhaitait une annulation rapide et quasi totale de la dette irakienne. La Russie est d’accord pour oublier une partie substantielle des 8,5 milliards de dollars que lui doit Bagdad, mais sous certaines conditions et pas nécessairement avant la fin de l’année. L’entretien Poutine-Bush à Sea Island a par ailleurs été suivi de l’annonce que l’Otan invitait la Russie à des manœuvres navales dans l’Atlantique Nord cet automne. Mais l’amitié retrouvée a des limites, et M. Poutine est sceptique sur un renforcement du rôle de l’Otan en Irak souhaité par M. Bush. « L’Otan a perdu son ennemi (l’URSS), elle s’en cherche un », plaisante-t-il. Pour le règlement en Irak, « il vaut mieux que le rôle principal soit confié à l’Onu ». De même, il a décidé – peut-être en pensant à l’opinion publique en Russie, où l’ancien président américain Ronald Reagan, perçu comme l’un des « tombeurs » de l’URSS, n’était pas un héros positif – de ne pas assister aux obsèques de cet « homme d’État éminent ». Et, aux pressions rituelles des Américains pour que Moscou cesse sa coopération nucléaire civile avec l’Iran, soupçonné d’arrière-pensées militaires, il a répondu par un « niet » poli tout aussi rituel. À la différence des sommets passés, où elle semblait s’enfermer délibérément dans un isolement médiatique hautain, la Russie a fait en Géorgie un effort de communication pour les journalistes russes et russophones, organisant, face au feu roulant de l’appareil d’information américain, une demi-douzaine de briefings de ses diplomates et experts. Certains de ces experts se sont d’ailleurs exprimés – certes à titre personnel et anonyme – avec une liberté de ton séduisante, voire surprenante, par exemple sur le « Grand Moyen-Orient ». Ce serait ainsi, aux yeux de l’un d’entre eux, un « rideau de fumée » cachant une volonté de présence militaire américaine pour sécuriser les livraisons de pétrole au moment où la stabilité de l’Arabie saoudite semble fragile. Ce n’était pas, de toute évidence, l’avis officiel de la délégation russe.
Au G8 de Sea Island, Vladimir Poutine a soutenu George W. Bush sur l’Irak, mais sans abonder dans son sens sur le rôle de l’Otan et la dette de Bagdad, et il est resté prudent sur son idée de « Grand Moyen-Orient ». À deux ans de prendre la présidence du G8, la Russie joue un subtil jeu d’équilibre, consistant à rester en bons termes avec Washington sans pour autant lui...