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Actualités - OPINION

Vie politique - Sensible amélioration du climat relationnel Entre Damas et Bkerké, de bons sentiments, mais encore rien de tangible

Le défilé incessant à Bkerké de personnalités proches de la Syrie, de ces « amis communs » dont certains sont des « repentis » qui étaient naguère violemment hostiles au patriarcat, montre qu’il y a un effort de rapprochement déployé par les décideurs. Ce qui s’inscrit d’ailleurs dans leur ligne actuelle d’apaisement, illustrée par la trêve imposée aux présidents. Mis sous forte pression par les Américains, confrontés à d’explicites menaces israéliennes, les Syriens n’ont pas envie de se tracasser avec des remous sur cette scène libanaise confiée à leur gestion. Mais le dialogue avec Bkerké reste pour l’heure aussi balbutiant qu’indirect. Il y a des échanges d’idées ou de propositions avec les visiteurs. Mais sans engagement ni projet précis. Et la page du clivage n’est encore tournée qu’au niveau des intentions; guère plus. Mgr Youssef Béchara, qui chapeaute comme on sait la Rencontre de Kornet Chehwane pour le compte du siège patriarcal, précise ainsi que tout ce que l’on entend dire, ici ou là, sur des médiations actives n’est que pure rumeur. Il ajoute en substance qu’il n’y a tout simplement pas de rapports effectifs entre Bkerké et Damas. L’on peut même craindre, dit-il, que certaines personnes qui se dévouent pour une réconciliation brassent de l’air à de simples fins d’intérêts personnels variés. Ou pour se faire mousser. Car, souligne le prélat, les résultats sur le terrain ne sont toujours pas visibles. Sans compter que les retombées ne semblent toujours pas aller dans le bon sens. S’il existe vraiment une volonté de corriger la trajectoire, les autorités syriennes savent parfaitement ce que le patriarche demande, poursuit Mgr Béchara. Qui soutient que les positions patriarcales reflètent en réalité l’avis du Liban, en tant qu’entité distincte. Il conclut en répétant que le rapprochement évoqué par certains a besoin de sortir du cadre verbal, pour se traduire en initiatives et en actes palpables. Visant à mettre un terme à des failles connues. Qu’en est-il au juste du côté de Damas ? On peut à ce sujet se reporter aux récentes déclarations du ministre syrien de l’Information. Qui prend soin de souligner, pour commencer, que les relations libano-syriennes sont régies par des constantes étayées de barrières protectrices. Ce qui laisse entendre que le fond y est déjà, qu’on ne saurait y toucher. Une impression que ce ministre conforte en ajoutant qu’il existe une différence entre les remarques critiques portant sur des défauts déterminés qu’il faut corriger, et les attaques ou accusations qui ne découlent manifestement pas d’un bon esprit, d’une bonne volonté. Au sujet de la présidentielle, l’officiel syrien affirme que c’est là une affaire libanaise interne dans laquelle la Syrie n’a rien à voir. Il cite dans ce cadre le président Bachar el-Assad, qui avait relevé qu’il appartient aux Libanais de faire leur choix. En oubliant que le chef de l’État syrien avait quand même évoqué deux ou trois conditions de qualification dont l’attachement de tout président libanais à la ligne arabe, autrement dit à l’alliance organique avec la Syrie. Le ministre syrien de l’Information soutient simplement que le président libanais doit savoir préserver de bonnes relations entre les deux États frères. Il répète que l’essentiel reste que les Libanais s’accordent en fonction de l’intérêt bien compris de leur pays. Pour conclure en affirmant que la Syrie se tient à égale distance de toutes les composantes libanaises. Cela étant, sur place, nombre d’opposants pensent que la présidentielle représente une bonne plate-forme pour assainir les relations bilatérales. Le patriarche pour sa part tient devant ses visiteurs des propos très clairs. Dont il ressort que l’échéance doit être considérée, avant tout, sous l’angle du respect de la Constitution, des lois en vigueur et des institutions. Il indique que le Liban doit entretenir avec la Syrie les meilleures relations, mais d’égal à égal, dans un cadre de souveraineté et d’indépendance effectives. Personnellement, le patriarche Sfeir apprécie l’estime que lui manifeste verbalement la direction syrienne. Tout en jugeant que ce climat positif doit encore se traduire en dispositions correctrices tangibles. Selon certains témoins, le patriarche Sfeir souhaite un président qui n’ait aucune raison de rougir de la manière dont il aura accédé à ses fonctions. Car celui qui a honte de son passé ou de son présent ne peut avoir foi dans l’avenir. Le cardinal refuse, bien évidemment, d’entrer dans le jeu des pronostics ou des noms. Surtout que les conseils qu’il avait jadis cru de son devoir de donner, après forte sollicitation, n’avaient pas été entendus. Pressé de donner son avis, il avait en effet présenté une liste de cinq noms que l’on avait totalement ignorée. Sur un plan pratique et rapproché, certains suggèrent que Mgr Sfeir se rende en Syrie à l’occasion de l’édification d’une cathédrale pour abriter les reliques de saint Maron. Il y serait accueilli en grande pompe par les autorités syriennes, le président Assad en tête. Mais cette suggestion n’est pas favorablement accueillie à l’Est. Où l’on reprend les arguments avancés jadis par Mgr Sfeir lui-même : la visite à Damas revêtant, par la force des choses, un caractère essentiellement politique, il faut qu’elle soit justifiée par des données déterminées, pour ne pas dire par un accord précis. Mgr Béchara relève que l’occasion indiquée est certes importante, et que le pape lui-même a visité la Syrie. Mais pour ce qui est du cardinal, on ne peut s’arrêter à des éléments de forme, pour ne pas dire de protocole, car le vrai sujet, c’est la relation qui doit exister entre le Liban et la Syrie. Pour que la visite soit utile, pour qu’elle ait un sens, elle doit donc être précédée par des engagements et des réformes déterminés qu’elle viendrait couronner. Philippe ABI-AKL
Le défilé incessant à Bkerké de personnalités proches de la Syrie, de ces « amis communs » dont certains sont des « repentis » qui étaient naguère violemment hostiles au patriarcat, montre qu’il y a un effort de rapprochement déployé par les décideurs. Ce qui s’inscrit d’ailleurs dans leur ligne actuelle d’apaisement, illustrée par la trêve imposée aux...